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  • ”Qui a peur de Virginia Woolf ?” au Théâtre de l'Oeuvre

    daniel loayza,pierre-françois garel,julia faure,alain françon,théâtre de l'oeuvre,dominique valadié,wladimir ordanoff,edward albee,qui a peur de virginia woolfMartha est la fille du Président de l’Université, elle est mariée à George depuis plus de vingt ans, il est professeur d’histoire.
    La soirée est déjà bien avancée, Martha invite un jeune couple insignifiant, Honey et Nick, rencontré quelques heures plus tôt. Martha et George entament une dispute d’une violence inouïe : reproches, mensonges et vérités se libèrent par l'effet de l'alcool ; Honey et Nick se révèlent aussi bien différents...

     « Qui a peur de Virginia Woolf ? » - Une première fois : je découvre l’immense succès d’Edward Albee sur scène et c'est au Théâtre de l’Oeuvre. La pièce fut créée en France en 1964, au Théâtre de la Renaissance, avec Madeleine Robinson (Martha), Raymond Gérome (George), Pascale Audret (Honey) et Claude Giraud (Nick).
    Pour ce titre mythique c’est le cinéma qui m’a happé - comment ne pas penser à Elizabeth Taylor et Richard Burton dans le film éponyme de Mike Nichols ? Et puis, mes pensées sont rattrapées par Gena Rowlands dans Une femme sous influence de John Cassavets, Marylin Monroe dans Les Désaxés de John Huston, Faye Dunaway dans Arizona Dream d’Emir Kusturica, Cate Blanchett dans Blue Jasmine de Woody Allen, et mille autres rôles. Ces femmes là n’ont pas froid aux yeux, admirables, sauvages, et désespérément séduisantes. 

    Impitoyable et caractérielle, la Martha d’Edward Albee rafle tout le répertoire du genre féminin. Le désespoir fait la femme, Bette Davis s’y reconnaitrait. Avec un instinct maîtrisé, la comédienne Dominique Valadié comprend et est Martha. D’un naturel désarmant : jamais, Dominique Valadié ne décroche. Intense :  jamais, elle ne se laisse dépasser par l’hystérie. Tenace et souveraine, même dans les recoins les plus sombres de son personnage : toujours, la comédienne dompte cette alchimie compliquée entre abandon total et pudeur amoureuse. 

    Pour provoquer les fantasmes de sa femme insatisfaite, Wladimir Yordanoff est George, il est l’homme, désabusé. Le cynisme fait l’homme, Clark Gabel ou Richard Burton eux-aussi s’y reconnaitraient. En un peu moins alcoolisé, ce George est d’une classe folle, le texte coule, parfait, fluide, les mots semblent naître au moment où ils sont dits, et le comédien se régale à prendre le public en aparté, l’effet est criant de vérité. 

    Pour accentuer la sincérité dans laquelle tous se jettent à corps et âmes perdus, le metteur en scène, Alain Françon, rapproche intimement les protagonistes de la pièce aux spectateurs et  laisse ainsi s’exprimer toutes les couleurs des sentiments. Le décor se fond au Théâtre, en moquettes savamment usées et escalier théâtral, le paroxysme du dépouillement est atteint : le vide, magnifique.

    Ce vide, ce manque de sens, dont souffre les personnages retentit en chacun de nous à différents niveaux. Bouleversés, les spectateurs sont des témoins, loins d’être impartiaux. Comme ce jeune couple, formé par Honey (Julia Faure) et Nick (Pierre-François Garel) qui se mêlent à la danse macabre... Julia Faure est remarquable pour sa fragilité avouée et son sens inné pour une sorte de dérision délicate.

    A grand renfort de mauvaise foi et d’alcool, Martha et George puisent dans tous les arguments fantasmagoriques dont l’être humain est capable : inventions douteuses, mensonges éhontés, violences… Jamais épuisés car certainement tenus par un amour infini, Martha et George abandonnent un public dévasté par l’émotion, comblé par les sentiments et infiniment reconnaissant par tant de générosité de la part de ces artistes.

    L’auteur américain Edward Albee (et la traduction en français de Daniel Loayza) propose une œuvre suspendue dans le temps et l’espace qui a la grâce de laisser à chacun la liberté de ressentir ses propres émotions. « Qui a peur de Virginia Woolf ? » au Théâtre de l'Oeuvre est un instant puissant qui marque au fer rouge, un exploit dramatique renouvelé à chaque représentations, et c'est aussi une expérience extrême qui pourrait s'avérer si proche, si dangereusement proche…

    Laurence Caron-Spokojny

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  • ”La Peur” de Stefan Zweig au Théâtre Michel, prolongation jusqu'au 26 février 2017 !

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    Fritz est avocat, il se voue à sa carrière, Irène est femme au foyer, elle se voue à sa famille. En apparence ils s’aiment, en apparence tout va bien.
    Le couple vit dans le meilleur des Mondes, privilégié par le confort et la réussite de Monsieur, lissé par le bon goût de Madame, tiré à quatre épingles par les us et coutumes de cette société bourgeoise, une image parfaite en somme aux teintes légèrement acidulées comme dans une réclame publicitaire des années 50.

     

    "Mais il est une mollesse de l'atmosphère qui rend plus sensuel que l'orage ou la tempête, une modération du bonheur plus énervante que le malheur".

    Le tableau pourrait s’avérer charmant seulement c’est sans compter sur le regard incisif et la sensibilité exacerbée de son auteur Stefan Zweig. " La Peur" est l'adaptation d'une nouvelle de Zweig, en fin explorateur des âmes, en particulier lorsqu’elles sont en détresse, Stefan Zweig donne chair à la peur. Honte, culpabilité, remord, les ingrédients sont finement choisis puis très délicatement mêlés à l’impatience d’un claquement de talon, à l’angoisse qui froisse le tissus d’une jupe, au désarrois qui ruine le maquillage... La peur possède sa victime, elle se fond en elle pour l’habiter tout à fait, elle se fait femme et anéantie ce qu’il reste d’insouciance. Elle est un implacable monstre froid qui officie de la pire façon qui soit, avec lenteur, une torture sophistiquée, ravageuse. 

    Il n’est pas question que je donne ici un seul autre indice sur « La peur » au Théâtre Michel, la pièce soigne tout particulièrement l’effet de surprise et assure envelopper le spectateur dans une atmosphère Hitchcockienne.  


    Dans cet univers quasi cinématographique, Hélène Degy, Aliocha Itovich et Ophélie Marsaud sont de merveilleux comédiens, leurs jeux relèvent de la performance. Quant à la mise en scène d’Elodie Menant, c’est une danse. Un astucieux ballet où les acteurs donnent vie aux décors, ils semblent se jouer d’eux mais il se pourrait bien que cela soit l’inverse. Les pans de décors glissent entre cours et jardin, ils se rapprochent, se bousculent, se gênent pour finir par tout à fait s’éloigner dans une sorte d’orchestration visuelle du tumulte des sentiments. 

    A noter : si vous allez voir cette pièce avec la personne qui partage votre vie, le diner qui suivra risque d’être un peu pimenté… A voir absolument, la pièce se joue à 19h du jeudi au dimanche, et, est prolongée jusqu'au 26 février 2017.

    Laurence Caron

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  • Pour ne plus jamais avoir peur de la nuit : le Muséum National d’Histoire Naturelle dévoile quelques secrets nocturnes…

    Dans l’écrin du Jardin des Plantes de Paris, entouré par les serres, galeries scientifiques, cabinets de curiosités et autres démonstrations paléontologiques, botaniques ou zoologiques, le Muséum National d’Histoire Naturelle entretient un rapport très privilégié avec le monde de l’imaginaire, parfois même de l’invisible… En cela, l’exposition « Nuit » est une sorte de consécration, le mystère est sondé dans ses recoins les plus obscurs. Et, c’est dans cet univers nocturne que le parcours de l’exposition est engagé.

    nuit,muséum national d'histoire naturelle

    Le chemin est précis, autant que les petits cailloux blancs semés par le Petit Poucet, il n’est pas question de s’y perdre mais plutôt de s’y laisser embarquer à la manière de Peter Pan qui tire les enfants hors de leur

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  • Génial ! L’« Etat de siège » d’Albert Camus au Théâtre de Poche-Montparnasse

    albert camus,état de siège,simon-pierre boireau,claire boyé,victoria,benjamin broux,céline espérin,adrien jolivet,antoine seguin,juliette prillard,théâtre marigny,jacques puisais,vincent léger,charlotte rondelez,poche-montparnasseAu lendemain de la Seconde Guerre Mondiale en 1948, Albert Camus propose un nouvel écrit L'Etat de siège dont le caractère, universel et intemporel, raisonne encore. Il s’agit du déroulé schématique et froid qui précède, établi, entretient et finalement laisse s’écrouler -pour mieux renaître ailleurs- les rouages de la dictature. En référence à Pétain ou Franco, Camus dénonce le fléau du nazisme (entre autres) et l’installe dans une logique implacable.

    Nous entrons dans un monde où «rien ne bouge», «tout va bien» en apparence, jusqu’au jour où La Peur vient bouleverser ce trompe-l’oeil moral et sociétal. La confusion est un terrain propice pour y faire naître ses valeurs : l’asservissement, l’obscurantisme et surtout la manipulation de l’opinion et des es

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  • Somptueux ”AU BUT” de Thomas Bernhard au Théâtre de Poche-Montparnasse, jusqu'au 5 novembre

    thomas bernhard,barbara creutz,christophe perton,léna bréban,théâtre poche montparnasse,dominique valadiéDominique Valadié a un port de reine, le regard perçant, une chevelure de lionne définitivement indomptable et une classe inouïe. Elle est notre Bette Davis française. Il est tout à fait autorisé de la comparer aux Monstres sacrés hollywoodiens. En 2016, elle avait fait autant peur de Virginia Woolf, au Théâtre de l’Oeuvre, que ne l’avait fait Elizabeth Taylor en son temps.

    Dans « Au but » au Théâtre de Poche-Montparnasse, la comédienne s’empare du texte de Thomas Bernhard avec une facilité déconcertante, elle compose sur un rythme musical les ruminations contradictoires et perverses d’une mère terrible. Encore un monstre de chairs et d’os : la mère que personne ne souhaite avoir et aussi celle qu’il ne faut surtout pas être. Egoïste, abusive, destructrice, possessive, jalouse, un étouffant nuage des cendres de sa vie dans lequel la comédienne fait aussi poindre les rayons du désespoir. Troublant et vraiment remuant. 

    Entre ses griffes acérées, la jeune comédienne Léna Bréban est « la fille ». Meurtrie, difficilement et douloureusement silencieuse, les accélérations des battements de son cœur parviennent jusqu’aux rangs des spectateurs atterrés et impuissants.

    L’écrivain autrichien est merveilleusement bien servi, entre les murs de la petite salle du Poche-Montparnasse les sentiments se déploient comme sur la grande scène d’un Opéra. Pour maîtriser le tragique, Christophe Perton réalise une mise en scène intelligente marquée par les contours élégants et griffés d’un pur style Art Déco dans des décors dessinés aussi par Barbara Creutz. L’imagination du spectateur est stimulée, autrement dit « respectée ». C’est une suite de propositions qui projette le spectateur dans une demeure cossue, l’enveloppe d’étoffes chic, puis le fait se promener le long d’une mer glacée tout en lui faisant perdre pied dans un vertigineux tourbillon de violences psychologiques. Dès cette entrée de saison le Théâtre de Poche-Montparnasse met la barre très très très haute...

    Laurence Caron  

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  • Charles Berling met en scène ”Dans la solitude des champs de coton” au Théâtre 14

    theatre 14,charles berling,léonie simaga,alain fromager,massimo troncanetti,marco giusti,sylvain jacques,roxana carrara,frank michelettiC'est un texte mythique. Créée en février 1987, au Théâtre des Amandiers dans une mise en scène de Patrice Chéreau, avec Laurent Mallet et Isaach de Bankolé, la pièce Dans la solitude des champs de coton de Bernard-Marie Koltès (1985) est entrée dans le répertoire du théâtre contemporain.

    En ce très chaud mois de juin, sur les planches du Théâtre 14, dans un monde crépusculaire, terriblement proche, des monologues se cousent  entre un dealer et son client. Empêtrés dans leurs désirs et empêchés par leurs angoisses, le flot de propos est remuant, perturbant, heureusement interrompu par de longs silences, nécessaires – sophistication extrême - pour laisser le temps aux spectateurs vaincus de se remettre des séries d’uppercuts envoyées par l’auteur. Les verbes forts de Koltès, puissamment jetés en pâture à nos esprits avides de savoir, révèlent ce qui ne peut-être dit qu’ici, sur ces planches, à moins que cela soit lu. Alors que la situation appartient au registre du quotidien, presque anodine, nos interrogations muettes sont criées, hautes et fortes, nos hontes, nos désarrois, nos peurs, dévoilés. Koltès est un traducteur de l’époque, du monde, des gens, et tant pis si ça fait mal c'est ça qui est beau.

    Copyright : Nicolas Martinez - Scène nationale Châteauvallon

    Le rôle d’un metteur en scène est de mettre un texte en valeur, et souvent d’en exagérer les contours, révélant les évènements, pour que le sens se fasse bien comprendre. Avec Bernard-Marie Koltès, l’affaire est inverse, ce sont les mots qui décident.
    Les années 80 - époque de la création du texte et de la mise en scène de Patrice Chéreau - sont loin derrière. Les temps ont changé, faut-il encore dénoncer la violence alors que nous la voyons partout ? Charles Berling s’essaie donc à la pudeur, à la décence même, une sorte d’élégance pour éviter le pire. Seulement, malgré lui, on sent bien que le drame parvient à s’extirper pour se faire voir. Inutile de prendre des gants. Tant pis si la violence est difficile à supporter par les temps qui courent, les deux interprètes et la mise en scène se débattent très adroitement avec le fleuve des pensées de Koltès, tant et si bien, qu’ils se fondent dans ces mots abruptes, animales, vrais.

    « La vraie et terrible cruauté est celle de l'homme ou de l'animal qui rend l'homme ou l'animal inachevé, qui l'interrompt comme des points de suspension au milieu d'une phrase, qui se détourne de lui après l'avoir regardé, qui fait, de l'animal ou de l'homme, une erreur du regard, une erreur de jugement, une erreur, comme une lettre qu'on a commencée et qu'on froisse brutalement juste après avoir écrit la date. »  
    Bernard-Marie Koltès (Dans la solitude des champs de coton).

    Le texte est tendu, riche - difficile d’imaginer la tartine que cela a été pour l'apprendre par coeur. « Je ne suis pas là pour donner du plaisir, mais pour combler l'abîme du désir » à 36  années d’écart entre l’écriture de ces répliques si pleines de véracité, et cette nouvelle adaptation, on pourrait croire que cette phrase de Koltès a été écrite uniquement pour Mata Gabin. Avec son phrasé impeccable – bien à la hauteur des plus grandes actrices formées au Conservatoire puis entrées dans les rangs de la Comédie française - elle accompagne son jeu par le langage chorégraphique de son corps, un port de tête, des arabesques de la main, ... Charles Berling s’efface. Humble, en comédien précis et en metteur en scène attentif, il offre toute la place nécessaire à la muse. C’est un déchainement, une performance rare. Entre retenues pudiques et envolées lyriques, il y a de quoi être remué, chahuté.

    Le texte de Koltès semble s’écrire au moment où il est dit. Sans leçon, sans moral, seul l’instant de la rencontre compte. A voir absolument.

    Laurence Caron

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  • IL N’Y A PAS DE AJAR, un monologue contre l'identité au Théâtre de l'Atelier jusqu'au 1er octobre

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    Pour interroger sur un débat grave qui préoccupe grandement notre monde, à savoir la question identitaire, Delphine Horvilleur {Réflexions sur la question antisémite et Vivre avec nos morts - éditions Grasset} convoque Romain Gary et tisse un monologue original dit par un personnage totalement inventé : Abraham, le fils d’Emile Ajar. L’auteure est convaincue que " Gary, ou Ajar, détient une clé pour nous aider à traverser ces temps d'obsessions identitaires" (AFP).

    « L’homme est né libre et partout il est dans les fers. » (Jean-Jacques Rousseau, Du contrat social, Préambule (1762).

    Gary est un visionnaire, cela ne fait aucun doute, l’auteure et rabbin Delphine Horvilleur l’est aussi, c'est ainsi qu'avec l’élégance discrète des timides qui laissent humblement la place aux plus grands qu’eux, Horvilleur dénonce haut nos propres carcans, ceux que nous créons, nous catégorisant dans des réseaux sociaux, appartenances nationales ou régionales, éthniques ou religieuses jusqu’aux questions de genres et d’orientations sexuelles. Qu'il s'agisse de wokisme ou de cancel culture, Horvilleur n’a pas froid aux yeux et n’épargne rien ni personne, c’est une véritable ode à la liberté, une définition du libre arbitre décryptée à grand renfort d’un savoureux humour juif avec cette façon unique de remettre tout en question...

    " Ajar nous rappelle une évidence : nous sommes les enfants des livres que nous avons lus et des histoires qu’on nous a racontées, bien plus que de nos identités d’origine." Delphine Horvilleur.

    Pourrait-on transposer aujourd’hui, au coeur de Belleville, la merveilleuse tendresse qui unit Momo, le petit arabe, et Rosa, la vieille juive (La vie devant soi, Émile Ajar - Prix Goncourt 1975) ? La puissante artiste Johanna Nizard vient secouer les dossiers des fauteuils du Théâtre de l’Atelier, ici personne ne risque de s’assoupir comme il est parfois coutume au théâtre. La salle est en alerte, tendue, attentive, il est de la responsabilité du public de faire honneur à la remarquable performance de la comédienne. La gravité du propos précipitée par la course folle du monde jongle entre un humour cinglant et une sincérité d’une rare radicalité. La mise en scène, réalisée en duo par Johanna Nizard et Arnaud Aldigé, est percutante, terriblement rythmée et d’une densité telle qu’elle semble déborder du plateau de Théâtre de l’Atelier, comme une sensation de trop plein similaire à une révolte qui ne parvient pas ou plus à se contenir. Pourtant, la touche pause a bien été enclenchée, le monologue « Il n’y a pas de Ajar »  permet de prendre du recul, de scruter notre société et parfois de s’attarder dans des recoins bien sombres… Plus d’une heure de spectacle, assurément divertissant, intelligent, spirituel et philosophique, bientôt en tournée dans la toute France, immanquable.

    LC.

    Il n'y a pas de Ajar de Delphine Horvilleur

    Théâtre de l’Atelier , 1 place Charles Dullin 75018 Paris. Du 1er septembre au 1er octobre 2023. Les vendredis et samedis à 19h, les dimanches à 16h, relâche les 8, 9 et 10 sept. Durée 1h15.

    TOURNÉE 2023/2024

    5 décembre 2023 : l’Azimut, Antony | Châtenay-Malabry

    9 décembre 2023 : Théâtre des 2 Rives, Charenton

    13, 14, 15 décembre 2023 : Théâtre NaBonal de Nice, CDN Nice

    17 décembre 2023 : Théâtre de Grasse

    19, 20 décembre 2023 : Bonlieu Scène naBonale Annecy

    10, 11 et 12 janvier 2024 : Scènes du Golfe, Vannes

    16, 17 janvier 2024 : Scène naBonale du Sud-Aquitain

    23 au 26 janvier 2024 : Théâtre Sorano, CDN Toulouse Occitanie

    1er février 2024 : Théâtre d’Avranches

    6, 7 février 2024 : Maison de la Culture de Bourges, Scène naBonale

    9, 10 février 2024 : Halles aux grains | Scène naBonale de Blois

    20, 21, 22 février 2024 : Comédie de Picardie, Amiens

    24, 25 février 2024 : Théâtre Montansier, Versailles

    27 février 2024 : Le Beffroi, Montrouge

    2 mars 2024 : Centre culturel La Courée, Collégien

    9 avril 2024 : Espace Philippe-Auguste, Vernon

    14 mai 2024 : ECAM, Le Kremlin-Bicêtre

    16, 17 mai 2024 : Théâtre de ChaBllon

    21 mai 2024 : Centre Culturel Berenger de Frédol, Villeneuve-les-Maguelone

    23 mai 2024 : Théâtre des Quatre Saisons, Gradignan

    26 mai 2024 : Les Franciscaines, Deauville

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  • Les lumières de Julio Le Parc

    Comme j'aime ce lieu ! Les allées du Palais de Tokyo s'entrecroisent telles des rues, des étages, des dédales, des recoins, un désordre harmonieux, résolument urbain, en expansion constante. La grisaille d'un parking de supermarché de banlieue ou la blancheur d'une galerie contemporaine se suivent pour s'évanouir dans des douves sombres aux formes arrondies. On pose ses valises à l'entrée, avenue du Président Wilson, l'idée est de se perdre, la ballade est aléatoire, tout oublier donc, puis s'en échapper, respirer le grand air (...de Paris) léger, riche et ébloui. Ce vaste chantier accueille (entre autres artistes inventifs), jusqu'au 13 mai 2013, les installations et créations lumineuses du (par conséquent très lumineux) Julio Le Parc dans l'écrin attendu de l'exposition SOLEIL FROID.

    julio le parc,palais de tokyo

    Vue du vernissage de Julio Le Parc, lundi 25 février. © Photo : Didier Plowy  


    Parfaitement mises en scène, les oeuvres de Julio Le Parc s'épanouissent sur un parcours à la fois ludique (les enfants et ados adorent) et initiatique. Il s'agit ici de prendre une leçon radicale d'art contemporain, pourrait-on dire une révision des bases classiques de l'art contemporain ? Soit. De 1950 à aujourd'hui, l'artiste nous en met plein les yeux, cela flash, clignote, déstabilise, ennivre, perturbe, distrait, interroge, enfin c'est beau ! Quelquechose d'inédit, et à la fois très familier, se passe.
    Une chance, pour cette fois, que Julio Le Parc soit exposé au Palais de Tokyo : pour l'anecdote, cette artiste engagé, fervent défenseur des Droits de l'Homme, avait refusé en 1972 une rétrospective au musée d’Art moderne de la Ville de Paris en la jouant à pile ou face...
    © Laurence Caron-Spokojny

    "D’une manière générale, par mes expériences, j’ai cherché à provoquer un comportement différent du spectateur (...) pour trouver avec le public les moyens de combattre la passivité, la dépendance ou le conditionnement idéologique, en développant les capacités de réflexion, de comparaison, d’analyse, de création, d’action." 
    Julio Le Parc 
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  • Je suis totalement fan de Stéphane de Groodt ! Chroniqueur sur Canal+ et auteur de ”Voyage en Absurdie”, Stéphane de Gro

    Stéphane de Groodt,ratp,laurence caron-spokojny,concours d'écriture,poésieLa RATP invite une nouvelle fois les amoureux de la langue française à soumettre leurs poèmes du 17 mars au 13 avril 2014 sur le site www.ratp.fr/grandprixpoesie

    Depuis près de vingt ans, la poésie est un terrain d’expression privilégié pour la RATP, qui propose régulièrement à ses voyageurs des moments d'évasion, de détente et de culture, à travers de nombreuses animations. Cette année, c’est sous la houlette d’un nouveau Président du jury, virtuose facétieux de la langue française – Stéphane de Groodt, journaliste, écrivain et célèbre chroniqueur – que la RATP donne rendez-vous aux amateurs de poésie.

    Héritier de l’humour décalé de Raymond Devos et Pierre Desproges, ce virtuose des jeux de mots, adepte de poésie et de calembours, officie chaque dimanche sur Canal+ aux côtés de Maïtena Biraben dans Le Supplément, avec sa chronique « Retour vers le futur ». Des chroniques dont il propose un florilège dans son best seller « Voyage en Absurdie », paru aux éditions Plon fin 2013.

    "Aimer" la page facebook de Ce qui est remarquable

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  • Les jardins du Château de Versailles

    Le programme de CM2 aborde «la monarchie absolue» : dimanche matin, nous sommes donc à Versailles pour assister au lever du Roi.

    château de versailles,bernar venet

    Arrivés sur place, sous un soleil de plomb, il doit être 10h00, ce qui semble une heure assez raisonnable pour sortir de chez soi un dimanche. Pourtant, l’heure est déjà tardive, des ribambelles de touristes et badauds en tous genres se pressent en une file interminable : il y a 25 km de queue pour acheter les billets à la caisse et idem pour entrer, tous enrubannés sur le parvis du Château. Le coeur n’y est pas, la file d'attente est décourageante et le soleil trop intense pour rester là à espérer entrer dans le fief du pouvoir tout puissant. Ce matin, le Roi pourra faire une grasse matinée. Un peu déçus, nous arpentons les abords du château, nous faisons un tour dans la minuscule boutique totalement inintéressante...Puis, il y a là quelques guichets gardés par de très sympathiques étudiants : personne aux alentours, un prix d’entrée raisonnable, nous nous engouffrons dans la brèche, il était temps de prendre une décision les enfants revendiquent leur déception un peu trop ardemment. Armés de plans, nous nous laissons glisser dans les allées du château, les parterres de fleurs tentent de se hisser sur les majestueuses topiaires des jardins à la française.
    André Le Nôtre, par ses élégantes perspectives, ne cessent de nous rappeler la présence du château et de sa galerie des glaces que nous ne verrons pas cette fois-ci. Jean-Baptiste Colbert, Charles Lebrun et Jules Hardouin Mansart nous indiquent le chemin. Impossible de se perdre, ici tout est ordre et rigueur. Les Bosquets se succèdent, ce sont de grandioses salons de verdure et de pierre où trône souvent un bassin aux présences oniriques. Très peu de bancs sont prévus pour découvrir le spectacle des bassins, à croire que le monarque nous rappelle notre fonction, nous, petit peuple. Il s’agit d’admirer. Les enfants courent, ils espèrent trouver un labyrinthe pour avoir le bonheur de s’y perdre mais l’aventure s’avère vaine. Bachus, Céres, Apollon et Saturne les impressionnent, mais c’est le bosquet de La Salle de Bal qui nous laisse sans voix, vestige unique et intacte de cette époque. 
    Assidus, nous lisons les écriteaux explicatifs de la promenade, nous faisons la moue en découvrant les grosses enceintes qui diffusent la musique de Jean-Baptiste Lully, pendant un instant nous pensions découvrir des orchestres baroques aux interprètes sophistiqués et aux instruments rares... 

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    Pourtant, la promenade est une réussite, même si notre créneau horaire ne correspond pas toujours à la mise en route des jets et jeux d'eau des bassins. Une petite heure, nous prenons le frais, pour déjeuner dans une brasserie arborée au bord du grand canal ; puis nous repartons en faisant les zouaves, marchant d’un pas précieux et cadencé, soulevant des amas de dentelles et agitant des éventails imaginaires... Des figurants en habits qui prennent la pose auprès des touristes, voilà ce qui aurait été une bonne idée, un peu comme au Parc Disney après tout nous avons payé l’entrée... 
    Avant un dernier passage dans les jardins de l’Orangerie, nous embrassons du regard la vue au pied des marches du Château, le rouge et le brun des sculptures d’acier de Bernar Venet y tiennent un rôle remarquable. «Les courbes de mes sculptures contrasteront avec la géométrie angulaire des jardins tandis qu’elles accompagneront les contours circulaires du bassin d’Apollon et du Grand Canal», selon Bernar Venet. Incontestablement, les oeuvres appartiennent au jardin et inversement. 
    Les oeuvres de Jeff Koons ou Takashi Murakami ont inauguré magistralement cette politique artistique de Jean-Jacques Aillagon, si évidente et si naturelle, pour ainsi mêler l’art contemporain à ce classicisme exacerbé. L’insolence de Versailles, sa prétention artistique, la vision radicale de son architecture et sa provocance ornementale sont largement suffisantes pour accueillir les oeuvres les plus contemporaines et les plus innattendues. Versailles, son château et ses jardins, ne prennent aucune ombrage de ce mariage, tout au contraire, les oeuvres se répondent entre elles, elles semblent indissociables. 

    La beauté est résolument intemporelle. 

    Laurence Caron-Spokojny

    Le Château, le Trianon, le domaine de Marie Antoinette, ... nous attendent pour notre prochaine visite. Il est conseillé de venir en semaine et de réserver les billets par internet.  

     

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  • Les Producteurs au Théâtre de Paris

    theatre de paris,alexis michalik,serge postigo,benoit cauden,david eguren,les producteurs,andy cocq,spectacle musical,regis vallee,roxane le texier,alexandre bernot,loai rahman,leo maindron,sebastien paulet,herve lewandowski,melissa linton,veronique hatat,eva tesiorowski,marianne orlowski,carla hugonLa production de spectacles musicaux au Théâtre de Paris est une tradition lointaine, presque oubliée, et assurément regrettée. Des années 70 avec les opéras bouffe d'Offenbach mis en scène par  Maurice Lehmann comme La Périchole ou Barbe-Bleue, jusqu’à Cats et Starmania à la fin des années 80, l’espace scénique du Théâtre de Paris a plusieurs fois prouvé être un écrin parfait pour accueillir chanteurs, musiciens et danseurs. D’ailleurs, Alexis Michalik, l’auteur et metteur en scène, spécialiste des succès à la pelle - comme Le porteur d’histoires, Le cercle des illusionnistes, Edmond ou plus récemment d’Une histoire d’amour - ne s’y est pas trompé et le public, habitué à sillonner ce petit Broadway parisien formé par le Théâtre Mogador, Le Casino de Paris, et le Théâtre de Paris, s’est engouffré à sa suite pour aller applaudir Les Producteurs.

    L'œuvre The Producers a été réalisée à l’origine sur grand écran par Mel Brooks et Thomas Meehan en 1968. Trente ans plus tard, la version scénique a totalisé 2502 représentations en 2001 au Saint-James Theater de Broadway, ce qui lui a valu d’additionner un nombre record de nominations au Tony Awards pour une comédie musicale. Enfin, parce qu’en matière de music-hall il est vital de battre le fer pendant qu’il est chaud, une production londonienne s’est engagée dans cette voie par une tournée triomphante à travers le monde…

    "Dans certaines circonstances un producteur pourrait gagner plus d'argent avec un four qu'avec un succès... (Les Producteurs)

    Avec un mauvais goût assumé, le pitch du film déployant une charge humoristique qui vise le régime nazi, et en particulier la figure d’Hitler, a pour conséquence l’interdiction de sa diffusion sur le territoire allemand dès sa sortie. La guerre est pourtant dépassée de près de trois décennies… Le burlesque hystérique et la débauche de moyens et d’énergie des Producteurs sont autant de messages distillés par Mel Brooks afin de ridiculiser le III ème Reich ou bien encore l’industrie du spectacle et ses magouilles. Cet ensemble, singularisé par des personnages effroyablement mégalomanes, est parfaitement bien perçu par Alexis Michalik qui en offre une lecture toute aussi dingue et bourrée de références piquées chez ses aînés... Le rythme est effréné, les artistes sont déchaînés : du chant, plus ou moins bien maîtrisé, aux numéros de claquettes simples mais efficaces, jusqu’aux démonstrations comiques délicieusement transgressives, le spectacle bat son plein et le public est comblé. On retrouve l'esprit de troupe, une particularité des spectacles de Michalik, cette générosité et ce bonheur de jouer des artistes ont le don de gagner les rangs du public. Côté cour et côté jardin, les musiciens occupent astucieusement les loges qui bordent la scène, une élégante façon de mettre en valeur la musique live tout en profitant de la profondeur totale de l’espace scénique.

    Ces artistes-là n’ont pas froid aux yeux dès qu’il s’agit de chanter, de danser, de grimacer ou même de caricaturer, chacun trouve matière à s’exprimer et à jouer des coudes pour remporter les faveurs du public. Le second degré est de rigueur et la rigolade se saupoudre de quelque chose de suranné, un rien grandguignolesque. Des prolongations ont été annoncées, il est donc encore temps de réserver, un spectacle avec des artistes en nombre, fourni de décors et de multiple costumes, est précieux en ces temps de post covid.

    Laurence Caron

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  • D.I.V.A au Théâtre Montparnasse

    diva,théâtre montparnasse,flore philis,marie menand,alexandra hewson,jazmin black grollemund,mathilde legrand,manon savaryPour se distinguer des tonnes de spectacles qui se chamaillent le public aux coins des rues de Paris, pour les pièces de théâtre, créations musicales et autres boulevards dits inédits : la tache est rude. Le public traîne le pas prétextant une fois la peur des attentats, une autres fois les élections ou bien encore l’indémodable « criiiiiiise »… Pourtant quand il s’agit d’un très bon spectacle, il n’y a pas à tergiverser : les salles sont combles. La loi du meilleur est immanquable. D.I.V.A se place là, tout en haut de l’affiche du Théâtre Montparnasse, en pôle position.

    « Opéras choc et déjantés » : la promesse est gonflée. Se frotter à Verdi, Mozart, Bizet, Puccini et Offenbach n’est pas sans risque. A Paris, les foudres des mélomanes avertis sont bien plus à craindre que les âmes des compositeurs toujours bienveillantes lorsqu’il s’agit de prolonger la vie de leurs œuvres.

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    Ce soir là, le Théâtre Montparnasse est à la fête : Flore Philis, Marie Menand, Alexandra Hewson, Jazmin Black Grollemund et Mathilde Legrand se sont fondues en d’extravagantes divas imaginées par Manon Savary. Le style Savary est impossible à renier pour son héritière, l’espace est envoûté par la musique (en live toujours), décoré de suaves chorégraphies, inondé de paillettes et de lumières, l’exubérance et la joie de vivre rythment l’atmosphère… La fille du père est inspirée, sans nul doute et c’est tout à son honneur, et ajoute un je ne sais quoi de féminité assumée dont chacune des interprètes en livrent une couleur. Irrésistible. Niché dans une loge qui jouxte la scène, un vibrant quatuor à cordes accompagne les envolées lyriques avec infiniment de délicatesse. La musique est maîtresse et ses talentueuses interprètes la servent avec une ardente créativité.

    Hissées sur des podiums comme les lionnes d’un cirque fantastique, les belles cantatrices domptent les plus grands airs d’Opéra, sans peur et sans reproche, la performance est parfaite, les voix sont splendides. Des larmes d’émotion bousculent parfois les éclats de rire, Puccini n’a que quelques mots à dire pour faire basculer les cœurs, surtout lorsque ces mots sont si bien dits…

    Il est ainsi tout à fait possible d’offrir un spectacle d’une grande qualité tout en divertissant un très large public : qu’on se le dise et que le phénomène se propage !
    Absolument POUR TOUS !

    Laurence Caron

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  • Les pirates de « ONE PIECE » envahissent le Musée National de la Marine

    one piece,pirates,laurence caron-spokojny,musée national de la marineDu 23 au 28 octobre, pendant les vacances de la Toussaint, One Piece s'associe au musée national de la Marine pour fêter les 10 ans de l'incontournable série de Toei Animation.
    Une occasion de rencontrer de vrais pirates, une parade avec les personnages de la série sera organisée dans le musée de Paris le 23 octobre à partir de 14 h 00. 

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  • ”VOLPONE ou le Renard” de Ben JONSON au Théâtre de la Madeleine

    Ben Jonson et William Shakespeare étaient amis, et rivaux, ils ont en commun une modernité qui, sur le modèle de la tragédie grecque, rend le texte accessible et compréhensible par tous. 

    ben jonson,volpone,roland bertin,nicolas briançon,théâtre de la madeleine,théâtreDe remarquables comédiens, très bien distribués, s’appliquent sur la scène du Théâtre de la Madeleine à divertir un public tout de suite conquis dès les premières répliques. Roland Bertin est Volpone, sans concession aucune, ce grand comédien se jette corps et âme dans les méandres de ce personnage odieux et sans scrupule. Et comme la sauce prend, emporté par le texte, Roland Bertin en rajoute, des tonnes et des tonnes, sans filet… et c’est parfait. Nicolas Briançon, quant à lui, est un habile et formidable Mosca, subtil et gracieux il délie la trame de la farce sur laquelle une troupe de comédiens épatants s’exercent et remportent la démonstration avec brio. La mise en scène de Nicolas Briançon, très classique, est juste et laisse parfois entrevoir les meilleures pages du théâtre de boulevard.  Les textes sont bien dits, les déplacements sont fluides, la musique est bien choisie, le tableau est réussi. Il s’agit de théâtre, les traditions très anciennes de cet art sont ressuscitées ou revues, quelques danseurs illustrent le propos, le décor, aussi sombre que les personnages, se modifie au gré de l’histoire, et, les postiches des comédiens renouent avec la tradition de la commedia del arte. 
    Volpone est sans aucun doute une des pièces programmées, par les théâtres privés parisiens, à ne surtout pas manquer.

    Laurence Caron-Spokojny

    Une pièce de Ben Jonson - Mise en scène par Nicolas Briançon
    Adaptation Nicolas Briançon et Pierre-Alain Leleu. 
    Avec Roland Bertin, Nicolas Briançon, Anne Charrier, Philippe Laudenbach,Grégoire Bonnet, Pascal Elso, Barbara Probst, Matthias Van Khache et Yves Gasc. Décors Pierre-Yves Leprince. Lumières Gaëlle de Malglaive. Costumes Michel Dussarat.
     RESERVATION ICI.  

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  • Théâtre du Châtelet : De l’autre côté de la lune

    Le Théâtre du Châtelet a toujours ouvert sa saison avec faste, ce mois de septembre est différent. 

    Le Mexique est à l’honneur avec Cruzar la Cara de la Luna.Il s’agit du tout premier «opéra mariachi» : une rencontre entre la musique populaire et l’école classique de l’Opéra. Le compositeur José «Pepe» Martinez et le groupe Mariachis Vargas de Tecalitlán, dont on dit qu’il est le «meilleur mariachi du monde», ont été sollicités par l’Opéra de Huston, pour être accompagnés par le très renommé librettiste et metteur en scène de Broadway, Leonard Foglia. 

    cruzar la cara de la luna,théâtre du châtelet

    L’histoire est dramatiquement universelle, l’immigration mexicaine aux Etats-Unis, quand la nostalgie des origines vient bousculer les contraintes sociales à travers trois générations. 

    Pourtant malgré la noblesse du thème et l’interprétation juste de ses musiciens et chanteurs, Cruzar la Cara de la Luna pâtit d’une mise en scène quasi inexistante, pour une version semi-scénique c’est plutôt embêtant... La musique bat son plein au rythme des trompettes, violons, harpe et vihuela, les rythmes ensoleillés feraient même penser au premiers accents d’une opérette digne de Maurice Lehmann. Seulement, ce n'est pas du tout cela. La découverte de la musique mariachi nous apprend à quel point elle a certainement influencée un grand nombre de compositions, mais en ces murs et sur cette scène cet attrait semble insuffisant. 
    Tout de même, il s’agit du Théâtre du Châtelet, il est dommage de laisser ainsi ces musiciens seuls, statiques, en fond de décors, alors qu’un formidable espace est prêt à vibrer sous leurs pieds...  Entre dimension politique ou folklorisme consensuel, on ne sait pas trop, il y a un manque de parti pris évident. L'idée est originale et audacieuse, mais il s'agit juste de l'idée. Je suis sortie du spectacle en fredonnant, quand on m'a demandé ce que je pensais du spectacle,  j'ai soupiré, en fait je crois que je n'avais pas trop envie d'avouer ma déception.

    Laurence Caron-Spokojny

     

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  • ”Crise de nerfs” au Théâtre de l'Atelier

    Crise de nerfs,3 farces d'Anton P. Tchekhov,Le chant du cygne,Les méfaits du tabac,Une demande en mariage,Peter Stein,Jacques Weber,Manon Combes,Loïc Mobihan,theatre de l‘atelier« Crise de nerfs » réunit trois farces d’Anton Tchekhov sur la scène du Théâtre de l’AtelierLe chant du cygne ou l’agonie d’un vieil artiste, joué tout en confidences, tendres et ironiques ; Les méfaits du tabac, terriblement burlesque et sarcastique ; et, Une demande en mariage, un tableau hystérique et délicieusement joyeux. Dans les trois, Jacques Weber est génial, et il n'est pas le seul ! 

    “Où il y a de l’art, où il y a du talent, il n’y a pas de vieillesse, pas de solitude, pas de maladie, et même la mort, ce n’est qu’une moitié de mort.” extr. Le Chant du Cygne / A. Tchekhov.

    Fellinien à souhait, les cheveux hirsutes et le visage grimé, Weber entre en scène dans la peau de Vassili Vassiliévitch Svetlovidov, un acteur vieillissant qui s’est assoupi dans sa loge après une représentation. Tragique et excentrique, Svetlovidov ratisse les bribes de sa carrière, déjà loin derrière, avec regrets et passion. Weber, avec cette infinie délicatesse qui contraste avec son imposante stature, interprète à la volée, Othello, Lear, Hamlet ou Boris Godounov, avec une décontraction nourrie par tant d’expériences et de travail. Il entremêle les tirades, entre rires (une formidable trouvaille, cette façon de faire sonner son rire comme un ténor lyrique) et larmes sincères. Insolent et malicieux, Weber attrape une tirade de Cyrano et la livre en confidence, comme un cadeau au public (Cyrano de Bergerac ne verra le jour que dix ans plus tard). Tchekhov, s’il s’est retourné dans sa tombe, c’est certainement pour mieux voir et entendre Jacques Weber. D’ailleurs on se félicite de découvrir cette « farce » en début de spectacle et non à la fin, tellement l’instant est puissant, impossible d’en sortir indemne. Dans cette même farce, une sorte d’apparition surnaturelle venue du fin fond du plateau est incarnée par Loïc Mobihan, il est Nikita Ivanytch le souffleur du théâtre. Nullement impressionné par l’ogre qui englouti tout l’espace autour de lui, Loic Mobihan créé un rôle, de sa façon de se mouvoir jusqu’à sa diction, d’une composition infiniment tendre, raffinée et si drôle.

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    Et la bonne tranche de rigolade ne s’arrête pas là, Weber enchaîne seul en scène Les méfaits du Tabac. Le propos se déroule à l’allure d’un cheval fou au galop, le texte de Tchekhov est radical et sobre, Weber est précis. L’auteur décoche ces flèches là où ça fait mal, il a cette incroyable façon de piéger la nature humaine, d’aller au plus profond des sentiments avec le plus élégant des alibis : faire rire. Il s’ensuit Une demande en mariage pour achever définitivement le public dans la folle dramaturgie que cette courte pièce suscite. Les performances de l’intrépide Manon Combes et celle de Loïc Mobihan sont formidablement justes, et se marient merveilleusement aux interventions majestueuses de Jacques Weber qui semble veiller ce jeune monde avec bienveillance et générosité.

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    Pour traiter cette démesure des sentiments, le metteur en scène Peter Stein offre toute sa délicate attention. La mise en scène, comme son nom devrait l’indiquer plus souvent, est une véritable mise en valeur des artistes, des personnages, du texte, enfin de l’auteur. La lecture est vraie, Peter Stein en expert de la dramaturgie, comme un artisan, s’efface, humble, pour exprimer et refléter l’essence même de l’œuvre.

    Définitivement moderne, ces trois farces de Tchekhov dépassent ces truculentes portraitures russes pour livrer un message universel où l’humour et la compassion voisinent, un formidable moment de théâtre, immanquable par ces temps perturbés tant il est réconfortant ! Merci.

    Laurence Caron

    photos : Maria Letizia Piantoni

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  • Mademoiselle Julie de Strindberg au Théâtre de l'Atelier

    Capture d’écran 2019-05-29 à 11.59.16.pngEn Suède, dans les régions les plus septentrionales du pays, lors du solstice d'été, c’est à peine si le soleil se couche, c’est la nuit de la Saint-Jean ; une nuit magique où l’amour est célébré.

    Cette nuit là, Mademoiselle Julie, une jeune aristocrate, solitaire et désespérée, se mêle aux domestiques et séduit Jean, le valet de son père, sous l’œil critique de Kristin, la cuisinière.

    En 1888, « Mademoiselle Julie » le huit clos tragique d’August Strindberg dérange les autorités suédoises, la pièce sera jouée dans toute l’Europe, avant de se produire finalement en Suède en 1906.

    Anna Mouglalis déboule, directe, habitée totalement par la folie de son personnage. Peut-être que cette folie est portée un peu trop haut dès le départ, il est à parier que le jeu de la comédienne va se nuancer au fur et à mesure des représentations pour une meilleure montée en puissance. Ce soir est une première, la tension est palpable. La beauté et la présence féline d’Anna Mouglalis sont magistrales. De ses yeux charbonneux et sa voix grave, elle est une de ces personnalités fascinantes que le public adore ou bien hait. Mademoiselle Julie se déhanche, elle se tient comme un garçon, à moins que cela soit seulement un prétexte pour afficher une allure encore plus provocante, elle revendique une indépendance toute personnelle, peu lui importe, tout est de la faute de sa mère dit-elle. Le tempérament violent du personnage n’impressionne pas du tout son interprète, Anna Mouglalis se jette dans l’arène, instinctive et sans filet. 

    Pour lui faire face, Xavier Legrand interprète le valet du père de Mademoiselle Julie, nullement effacé par le charisme d’Anna Mouglalis, il est déterminé à dompter les excès du personnage qui lui fait face. Xavier Legrand a l’élégance de ces acteurs initiés du Conservatoire, le phrasé est à la fois fluide et texturé, tout prend sens. Jean est terriblement complexe, Xavier Legrand en tisse une interprétation adaptée, extrêmement sophistiquée, rien ne lui échappe, ses propres intentions autant que ses échanges appliqués avec ses partenaires dont il prend grand soin.

    Dans le rôle délicat de la cuisinière, Julie Brochen s’attèle aussi à la mise en scène. Un bijou scénique, parfait, concentré, avec une intensité qui égale la portée du drame noué par Strindberg. Les interprètes sont mis à l’honneur comme il est rare de le voir ces dernières années. Il y a du rythme, des déplacements précis, l’ensemble est sans artifice, des lumières nordiques, douces et froides, une ambiance épurée comme pour mieux révéler la violence des sentiments et la douleur du piège qui se referme... Le combat est sans merci. A la lutte des classes s’ajoute le conflit familial, la quête de reconnaissance, la guerre des sexes, la détresse psychologique, le tumulte des sentiments, un registre immense disséqué par Strindberg, impitoyable.

    A voir absolument, jusqu’au 30 juin au Théâtre de l’Atelier.

    Laurence Caron

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  • « DABADIE OU LES CHOSES DE NOS VIES » au Théâtre de l'Atelier

    theatre,chanson,cinema,sketch,theatre de l'atelier,jean-loup dabadie,clarika,maissiat,mathieu geghre,camille duchemin,emmanuel noblet,damien valade,anne laurin,guillaume prunevieille,maud heintzC'est une avalanche étourdissante. Michel Polnareff, Guy Bedos, Claude Sautet, Michel Piccoli, Romy Schneider, Yves Robert, Serge Reggiani, Régine, Claude Pinoteau, Mireille Matthieu, Claude François, Barbara, Julien Clerc, Johnny Hallyday, Jean-Paul Rappeneau, Jean Becker, Michel Sardou, Yves Montand, Dalida, Barbara, Jacques Dutronc, Johnny Hallyday, Isabelle Boulay – et j’en oublie - ont tous été traversés et souvent propulsés par la plume de Jean-Loup Dabadie. Des mots précieux, fragiles et  puissants, agiles comme des acrobates, mélancoliques ou comiques, en apparence légers et pourtant profonds.

    D’abord romancier, puis journaliste, la télévision, le théâtre, le cinéma et la chanson ont vite fait de se disputer la poésie contemporaine de l’auteur français, certainement le plus fécond des années 60 aux années 80, et au-delà. Il est le premier saltimbanque à entrer à l’Académie française en 2008, Jean-Loup Dabadie sème des mots chics qui parlent d’amours absolus et impossibles, d’humours policés et décalés, et de situations au charme fou. Le dimanche 24 mai 2020, nous sommes tous un peu orphelins, Jean-Loup Dabadie a quitté le monde matériel, il laisse à sa suite une œuvre monumentale.

    Au Théâtre de l’Atelier, il y a toujours un rendez-vous musical, il s’est naturellement inscrit dans la saison théâtrale. « DABADIE OU LES CHOSES DE NOS VIES » arrive à point, en prologue aux fêtes de fin d’année, la douce nostalgie qui émane du spectacle émeut nos vies, ravive de tendres souvenirs et adoucit l’âme. Les artistes, entre dramaturgie et chanson, Clarika, Maissiat, Mathieu Geghre et Emmanuel Noblet ("Réparer les vivants") qui signe aussi une mise en scène ingénieusement ludique, créent un aparté nécessaire dans l'espace-temps qui occupe notre présent, débordant, trop rapide et trop tout. A contre-courant, entre répliques et airs immortels, Jean-Loup Dabadie appuie sur la touche stop, on rewind avec lui, c’est un plaisir rare, partagés par un public soupirant de gratitude, tous ravis de se laisser emporter au large, loin, vers des temps qui ont fondé nos imaginaires. Quant à ceux, plus jeunes, pour lesquels ce grand Monsieur « dit quelque chose » ou pas du tout : allez-y ! Confiants, abandonnez-vous au rythme, unique, c’est de la magie. Place Charles Dullin, on sort en chantant, en se promettant de revoir un film de Sautet, Pinoteau ou Truffaut, déjà assis dans le métro on cherchera avidement un sketch de Bedos en pianotant sur son téléphone. Ici, le tragique n’est pas si grave, l’insouciance est toujours un peu inquiète, l’humour est terriblement décapant tout en demeurant respectueux, et aussi, et surtout, la vie est une affaire sérieuse sous réserve de la vivre autrement.

    Laurence Caron

    Une création originale de et avec : Clarika, Maissiat, Emmanuel Noblet et Mathieu Geghre 
    Montage des textes : Emmanuel Noblet avec Clarika et Maissiat
    Piano, claviers et arrangements : Mathieu Geghre
    Scénographie : Camille Duchemin
    Lumières : Camille Duchemin et Emmanuel Noblet
    Régie générale et régie lumière : Damien Valade
    Régie son : Anne Laurin en alternance avec Guillaume Prunevieille
    Costumes : Maud Heintz

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  • Musée Carnavalet, le roman de Paris

    Voici un Musée, dont on parle peu et que très peu connaisse, pourtant ici coule la véritable source de jouvence de Paris.musée carnavalet,laurence caron-spokojny,exposition

    Depuis 1880, Paris a son musée en plein coeur, du très charmant et non moins très fashion, quartier du  Marais. Cette initiative du baron Haussmann choisie l’hôtel Carnavalet afin d’abriter les témoignages de l’Histoire de Paris. Bâti en 1548, l’édifice fut remanié au XVIIe siècle par François Mansart, Madame de Sévigné y vécut de 1677 à 1696. Carnavalet occupe également, depuis 1989, l’hôtel Le Peletier de Saint-Fargeau bâti en 1688 par Pierre Bullet ;  on comprend alors pourquoi la perte de repère est totale quand on passe d’une aile à l’autre de ces deux hôtels particuliers. 

    musée carnavalet,exposition,laurence caron-spokojnyDans des décors d’origine ou reconstitués, le visiteur entame un voyage à travers le temps, les époques se succèdent en dévoilant ce qu’elles ont de plus intime. Des panneaux de bois ornementés, des peintures, des sculptures, des maquettes, des faïences, des tapisseries monumentales, des bustes, des horloges et des meubles admirables, tout est là, presque «dans son jus», et la légère odeur de «renfermé» ajoute un charme indescriptible.
    L’ombre furtive de Marcel Proust frôle un mur et Marie-Antoinette suggère d’offrir des brioches au peuple, la Marquise de Sévigné n’en finit pas d’écrire sa correspondance alors que Juliette Greco prend la pause, Robespierre échafaude de nouveaux plans machiavéliques tandis que Madame de Récamier lance une oeillade insolente, le charisme de Marat est un peu troublant... Personnages célèbres ou inconnus, ils ont vécu, marqué et souvent orienté l’histoire de la capitale.

    musée carnavalet,exposition,laurence caron-spokonyAprès un rapide coup d’oeil aux jardins somptueux pour lesquels nous nous promettons de revenir, les enfants affichent quelques signes de fatigue : déjà deux heures de visite. Pourtant il y a encore l’Orangerie, restaurée depuis une dizaine d’années, et ses collections préhistoriques et gallo-romaines, ce sera pour la prochaine fois...
    A l’image de Paris, il faudrait toute une vie pour visiter l’ensemble de la collection du Musée Carnavalet. 

    Parisiennes, parisiens, montrez patte blanche à l’entrée du Musée Carnavalet, votre pedigree ne s’en trouvera que plus remarquable. Quant aux autres, si vous souhaitez déchiffrer, un peu, les codes de la belle assurance de ces parigots, vous trouverez ici les principaux indices...
    Laurence Caron-Spokojny 

    musée carnavalet,expositions,laurence caron-spokojnyLe Musée Carnavalet comprend également la Crypte Archéologique du Parvis Notre-Dame, musée de site qui présente l’évolution de la ville de l’Antiquité à nos jours, et les Catacombes de Paris, où, à 20m sous le sol, le visiteur découvre les carrières de pierre , qui ont permis de construire l’habitat des Parisiens depuis l’époque gallo-romaine, et l'ossuaire, conçu au début du XIXe siècle, pour accueillir les ossements de 7 à 8 millions de Parisiens. 


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  • Les beaux films de Sydney Pollack

    Sur TCM (Turner Classic Movies), la chaîne dédiée au cinéma et à laquelle il faut être abonné sans-discussion-aucune, j'ai pu voir ou revoir, à vrai dire je ne sais plus, L'Ombre d'un Soupçon, mystérieux drame lyrique entre Kristin Scott Thomas et Harrison Ford… Car justement c'est imparable, on peut voir et revoir à volonté, sans jamais se lasser, et toujours avec délice le cinéma de Sydney Pollack.

    Théoriser sur l'immense carrière cinématographique de Sydney Pollack serait présomptueux, car en plus d'être acteur et réalisateur, Sydney Pollack fut aussi un brillant producteur aux choix osés, notamment Présumé Innocent, Raisons et sentiments ou bien encore Retour à Cold Mountain. Mon envie est bien moins ambitieuse. Juste, il est THE réalisateur incontestable du cinéma romantique hollywoodien, c'est dit.

    Le talent du réalisateur n'épargne aucun genre, sur une large palette de sentiments, il jongle entre les rapports humains ou avec la nature  avec un western écolo (Jeremiah Jonhson, 1972), il peut offrir une comédie sensible (Tootsie 1983) ou une fresque romanesque (Out of Africa, 1986). En parfait défenseur des valeurs humanistes, Sydney Pollack attire l'attention sur des sujets difficiles comme sont les douloureux clivages sociaux et économiques (On achève bien les chevaux, 1969), les rouages politiques plus ou moins grinçants (Les Trois Jours du Condor, 1975), la liberté de la presse et ses travers (Absence de Malice, 1982),… C'est une Amérique contemporaine et à la fois nostalgique (Nos plus belles années, 1973) aux accents de tragédie greque, l'artiste aime à nous torturer en nous rappelant le pouvoir de notre libre arbitre tout en laissant toujours une place à un profond espoir en l'humanité. L'Homme n'est jamais totalement méchant ou parfaitement bon, il est la somme de ses contradictions, la somme de ses expériences. D'ailleurs, Sydney Pollack  ne condamne pas, il met en garde, notamment une certaine presse qui ne démontre plus mais qui glisse peu à peu vers une forme de dénonciation (voici un sujet qui trouve aujourd'hui un parfait écho dans notre actualité...). Le crédo du réalisateur, sans cesse renouvelé par de nouveaux sujets, est de montrer la face cachée des institutions qui ont soit-disant la mission première de transmettre les idéaux de notre société.

    Il est de bon ton de désigner la foisonnante production du réalisateur comme s'agissant de «films engagés», n'est-il pas question tout simplement de vrai cinéma ? C'est un cinéma qui raconte avec un language qui se veut compréhensible par tous. Le réalisateur dirige les acteurs à la perfection pour les faire parler de sa propre voix, la précision du scénario frôle la technicité horlogère. Quand en plus Sydney Pollack se projette dans la (belle) personnalité de Robert Redford pour s'incarner, cela atteint la perfection... De Burt Lancaster à Tom Cruise, Sydney Pollack aime les acteurs, et ils lui rendent bien. Le regard du réalisateur est si humain que ses films en deviennent universels et surtout (même pour les tenues entre Croisière et Hippies de Barbara Streisand dans Nos plus belles années) intemporels.

    Laurence Caron-Spokojny

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  • Le monde enchanté de Muriel Robin...

    muriel robin,théâtre du châtelet,tsoin tsoinIl y a des artistes dont les ondes, les images et les écrits s’emparent et ne se séparent pas. Les médias français et le système artistique fonctionnent ainsi : on aime passionnément, on utilise frénétiquement et on use avec acharnement. C’est comme ça, lorsqu’un artiste plaît, il est partout ; et même, lorsqu’il disparaît de la scène pendant des années, le sentiment de le voir et de l’entendre demeure.

    Muriel Robin est de cette trempe, son absence de la scène pendant 8 années est passée à la vitesse de l’éclair. Théâtre, cinéma, télévision, la comédienne était bien là, finalement  seul le « one-woman show » avait été mis de côté. Puis en 2013, elle triomphe, à nouveau seule en scène, dans « Muriel Robin revient…Tsoin Tsoin » jusqu’en 2014, et enfin pour la dernière, ce lundi 22 décembre au Théâtre du Châtelet…

    Rockstar, Muriel Robin en a l’allure et le charisme, c’est d’ailleurs de la musique qu’elle aurait aimé faire. Selon les règles de l’art dramatique,

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  • Colorature : MUMMENSCHANZ au Casino de Paris

    Depuis sa création en 1972, Mummenschanz expérimente, exerce, transforme et déploie un art particulier. Ce spectacle s’attache à rester au plus proche de ses spectateurs afin d’émouvoir et éveiller les sens de tous.

    Mummenschanz est un conte sans fin, l’inspiration est fantastique et fantaisiste, les histoires se délient sans début, sans fin. Soufflé par le glissement des étoffes et matériaux sur le plateau du Casino de Paris, imprégné par les soupirs de ces danseurs marionnettistes, le silence emplit l’espace pour composer une musique que seules nos émotions perçoivent.

    Simple et sophistiqué à la fois, les formes, soieries, fil de fer et autres rouleaux de papier forment un ballet où l’humour joue des coudes aux côtés de la poésie. Les disciplines artistiques sont largement ratissées et maîtrisées, de la danse classique à la pantomime, nous nous doutons que le travail et la recherche artistiques sont bien menés tant le spectacle reflète une forme d’art brut abouti, et, à la fois savant.
    Les artistes humblement cachés de Mummenschanz s’expriment pleinement dans un langage artistique harmonieux, bourré d’inventions, chacun y trouve son compte adulte comme enfant, égaux.

    Laurence Caron-Spokojny

    Du 21 au 26 mai 2013, pour la première fois au Casino de Paris et pour 6 représentations exceptionnelles : un spectacle culte, inclassable et unique à savourer en famille ! 

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  • Le feu sacré de Gersende Perrin !

    jean-luc tardieu,gersende perrin,francis perrin,théâtre la bruyère,comme un arbre penché,simon lelouchSur la scène du ravissant Théâtre la Bruyère, un homme veille au chevet de son meilleur ami, atteint d’une paralysie totale, ce dernier ne s’exprime plus qu’en clignant des yeux. Au bilan d’une vie, ou plutôt de deux vies, remords, confidences, amitié et jalousie s’expriment et se confrontent…

    jean-luc tardieu,gersende perrin,francis perrin,théâtre la bruyère,comme un arbre penché,simon lelouchL'auteur de « Comme un arbre penché », Lilian Lloyd, a emprunté son pseudonyme à Harold Lloyd, acteur burlesque américain, star du cinéma muet des années 20. Loin de la cascade de son illustre mentor (accroché aux aiguilles d’une pendule), c’est par l’écriture que Lilian Lloyd fait entendre sa voix aussi bien au cinéma, en multipliant sa participation à la production de courts métrages (récemment pour le beau court métrage de Simon Lelouch Nous sommes tous des êtres penchés), et, au théâtre depuis plus de dix ans (à l’affiche : Des accordés au Théâtre Le Bout, éditions Eclats d’encre). 

    jean-luc tardieu,gersende perrin,francis perrin,théâtre la bruyère,comme un arbre penché,simon lelouch,laurence caron-spokojny

     Sur scène, Francis Perrin alterne facéties et compositions variées, le comédien  fait quelques pas sensibles du côté du tragique dans lequel on souhaiterait le voir s’engager un peu plus… 

    A ses côtés, sa très remarquable femme Gersende Perrin interprète, par sa présence délicate, le rôle de « l’aide soignante ». Flamboyante à l’égale de sa chevelure rousse, et totalement imprégnée d’empathie, de pudeur et de courage, Gersende Perrin a un doux sourire et un regard profond, elle s’approprie si bien son rôle que ses apparitions, écrites toutes en ponctuations, finissent par occuper tout l’espace. Gersende Perrin est une comédienne magnifique.

    Pour harmoniser habilement cet ensemble, Jean-Luc Tardieu ne s’est à nouveau pas trompé. Sa mise en scène, fluide, dorlote les acteurs, mesure leurs déplacements avec énergie et naturel tout en épousant les nuances du texte. Avec Les vaisseaux du Cœur  actuellement à l’affiche du Petit Théâtre Montparnasse, le metteur en scène montre à quel point il sait donner du relief à  la profondeur des sentiments.

    La pièce de Lilian Lloyd, née sous l’impulsion de Michel Leeb, évoque un sujet douloureux qui pourrait être traité de la façon la plus triste qui soit : ce n’est absolument pas le cas. La plume de Lilian Lloyd triture le tragique avec des accents poétiques et quelques échappées drolatiques, ajoutés à cela une retenue modeste et ce ‘je ne sais quoi’ de surréaliste qui fait tant de bien à notre époque et à nos esprits…
    Comme un arbre penché va puiser aux confins de notre humanité pour en rapporter ce qu’il y a de meilleur. Une petite séance de «bons sentiments» est à recommander par les temps qui courent.

    Laurence Caron-Spokojny

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  • Fabrice Hyber au Palais de Tokyo

    « Ce n’est pas facile d’avoir de l’humour quand on est un artiste. Un artiste doit être très ennuyeux. Avoir un peu d’humour, ne pas se prendre au sérieux, ou pouvoir simplement en rigoler, ce n’est pas perçu comme quelque chose de tout à fait correcte pour un artiste. Je pense qu’au contraire, c’est être sérieux qui est vulgaire ». Fabrice Hyber.

    fabrice hyber,palais de tokyo
    (Matières Premières)

    Tout est dit.
    Comme j’aime ce texte de Fabrice Hyber qui inaugure le magazine du Palais de Tokyo (automne 2012) pour l’exposition « Les dérives de l’imaginaire ». Voici un artiste dont l’œuvre est touchante, définitivement tendre et poétique. Ici, le cycle de la vie, plus précisément celui de la nature, est symbolisé par un nuage vaporeux (véhicule extraordinaire et stellaire) rattaché à la Terre, par des filaments de pluie argentés… c’est une définition, la mienne, après tout symbolisez comme il vous plaira ce que vous voyez. Tout ceci est très beau et c’est très agréable à distinguer au milieu de ces multitudes de propositions contemporaines aux arguments souvent obscures. Non, à nouveau il ne s’agit pas ici de mettre à rude épreuve l’esprit pour en arracher des suppositions tortueuses ; l’univers de Fabrice Hyber montre ce qu’il y a derrière le rideau, l’œuvre (ou la vie) en plein épanouissement, tout en laissant le rêve conserver son rôle et sa vision fantasque nous engloutir.

    Une toile monochrome rouge est un condensé de rouge à lèvre, comme les boîtes de soupes de tomates d’Andy Warhol, on peut y révéler une forme de dénonciation, une ironie, pourtant cet artiste-là n’est pas si sombre, il est plutôt joyeux, un genre de poète de l’abstraction qui nous donne à voir (sans nous imposer de réflexion, chacun a le droit d’en faire ce qu’il veut) une définition de l’art, une vision, la vie.
    Trêve de verbiage. Allez faire un tour le pas léger, les mains dans les poches, le sourire aux lèvres et en sifflotant, au Palais de Tokyoallez vous perdre dans ces toiles accumulées et accrochées comme du linge au soleil.
    Partez à la rencontre de Fabrice Hyber.

    Laurence Caron-Spokojny

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  • La Route de Cormac Mc Carthy

    Récompensé par le Prix Pulitzer en 2007, La route de Cormac Mc Carthy livre les plus beaux échanges de la littérature entre un père et son fils.

    Outre le contexte épouvantable du monde dans lequel ces deux êtres sont précipités, cette vision moribonde efface toutes formes d'artifices afin que l'auteur touche à l'essentiel des sentiments.

    Ce livre m'a bouleversé, depuis sa lecture je vis avec lui, il m'accompagne ...


    la route, Cormac McCarthy

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  • Bienvenue dans le monde merveilleux de Sunderland...

    British à souhait : un brin rock'n roll, ambiance "Full Monty" (le film de Peter Cattaneo -1997) dans une Grande-Bretagne nostalgique à la jeunesse desabusée par un chômage abusif... 

    Perchées sur leurs talons, bijoux pacotilles tape à l’oeil, cigarette pendue aux lèvres, pull court et mèches rebelles, aguicheuses pour se défendre : Sally et sa meilleure amie sont abandonnées par leur famille, par la société, par la vie, les deux jeunes femmes se débattent. 
    Dehors, il pleut et le moral de la ville varie en fonction des exploits ou des déboires de son équipe de football.  


    petit théâtre de parisIl s’agit de trouver l’argent nécessaire pour que la petite soeur «toquée» puisse rester sous le même toit, il n'est pas question qu'elle retourne au «Centre». Sally est prête à tout. Est-il possible de s’extirper d’une vie que l’on n’a pas souhaité ?   

    Le propos est dramatique du début à la fin. Pourtant, Clement Koch, l’auteur de la pièce, déploie des trésors d’ingéniosité pour nous fait rire et rien n’est plus noble que de capter ainsi l’attention du public sur un sujet aussi grave. Les réparties fusent, et les rires pleuvent, eux aussi. Cela se passe tout en finesse. La justesse de la mise en scène de Stéphane Hillel laisse la part belle aux comédiens, ils jouent tous avec naturel tout en sachant faire vibrer les planches aux moments souhaités. Les rôles plein de charme sont admirablement bien distribués et l’écriture pour chacun est certainement un régal à jouer. Rien n’est lourd et grinçant, tout est fluide et presque aérien. Quand le rideau tombe, comme pour une bonne série tv, on attend la suite. 

    Finalement, Sunderland est un monde assez inattendu... 

    Laurence Caron-Spokojny

    Actuellement au Petit Théâtre de Paris.

    Avec : Elodie Navarre, Constance Dollé, Léopoldine Serre,Vincent Deniard,Vincent Nemeth, Thierry Desroses, Pascale Mariani et la participation de Bénédicte Dessombz.

    Mise en scène : Stéphane HILLEL, assisté de : Chloé Simoneau

    Décor: Jacques VOIZOT

    Musique: François PEYRONY

    Lumières: Laurent BEAL

    Costumes: Cécile MAGNAN

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  • « La leçon » au Théâtre de la Madeleine

    théâtre du corps,julien derouault,marie-claude pietragalla,théâtre de la madeleine,eugène ionesco,christophe rendu,alexis david,manon chapuis,solène ernaux messina,amelie lampidecchia,carla béral,robin sallat,antonin munoDepuis sa première représentation en 1951, « La leçon », une des premières pièces d’Eugène Ionesco, est jouée sans jamais s’interrompre -juste après La cantatrice chauve- au Théâtre de la Huchette depuis 1957 ! Cette fois-ci les mots d’Ionesco, totalement sarcastiques et absurdes, se transforment en une comédie dansée sous l’impulsion des chorégraphes et metteurs en scène Marie-Claude Pietragalla et Julien Derouault, sur les planches du Théâtre de la Madeleine.

    Peu courante et souvent mal considérée par la critique traditionnelle, spécifiquement en France, la confrontation des disciplines sur une même scène est une véritable prise de risque. Mais, l’Etoile Marie-Claude Pietragalla, nourrie de travail et de passions, et l’artiste, danseur et comédien, Julien Derouault, en ont fait leur credo en créant la compagnie Le Théâtre du Corps (Alfortville, 94). Ce centre de recherche artistique sur le sens, l’expressivité et la théâtralité du mouvement a notamment pour vocation de prolonger l’intention chorégraphique par la voix. Pour « La leçon » le texte théâtral apparaît ainsi de la façon la plus naturelle qui soit, soutenu par une technique précise, très savamment orchestrée, les danseurs ne semblent jamais perturbés ou même essoufflés par leurs prises de parole. Pourtant la danse est tendue, énergique et rapide. Cette danse ardente a quelques intentions chorégraphiques très voisines de celle proposées par Carolyn Carlson, difficile d’y échapper et de ne pas être marqué tant la création de Don’t look back, pièce intense signée Carslon créée en 1993 pour Pietragalla, a été une rencontre puissante. Un de ces événements magiques et exceptionnels pour lesquels on ne sait plus ‘qui influence qui ?’, cette espèce de choc intime aux frontières effacées entre la création et l’interprétation, comme cela a été le cas entre Maurice Béjart et Patrick Dupond pour la création de Salomé en 1986...

    Pour « La Leçon » je parie que le public ne s’y trompera pas et sera au rendez-vous proposé par le Théâtre de la Madeleine jusqu’au 3 décembre 2022. Eugène Ionesco aurait certainement adoré que ces mots soient dits et interprétés par toutes les fibres du corps humain. Voilà que l’extravagant et savant esprit de l’auteur s'exprime par les corps, ce sont des bras et des jambes qui s’élèvent en angles vifs, et des mains et des pieds qui écrivent eux aussi, une écriture vive et déliée, ou bien s’envolent en rythmes follement accélérés presque hypnotiques. La chorégraphie semble si intiment liée et si évidente qu'elle s’oublie derrière le génie de l’auteur, Ionesco se fond en un fantastique marionnettiste dont l’ombre fantomatique se superpose à celle de Julien Derouault, le professeur fantasque emporté par sa folie meurtrière. Puissant et virtuose, Julien Derouault est remarquable, le danseur emmène à sa suite les énergiques jeunes danseurs du Théâtre du Corps. Son élève, Manon Chapuis, terriblement talentueuse, ne craint pas de se confronter à son aînée en affichant une danse intense et poétique dont le reflet du caractère volontaire de Marie-Claude Pietragalla n’échappera à personne… Et puis il y a l’humour, grinçant et fin, Julien Derouault excelle en la matière, notamment lors de cette parodie du pas de deux de Gisèle : moment unique ou l’esprit s’échappe un temps pour aller chercher les images de la formidable et bouleversante Odile de Pietragalla en 1993, lors de l’entrée au répertoire du Gisèle de Mats Ek à L’Opéra de Paris.

    Bref, « la leçon » d’Eugène Ionesco est aussi celle de Marie-Claude Pietragalla et de Julien Derouault, un spectacle rare, ou l’intelligence et le divertissement se côtoient sans souffrir d’aucune comparaison.

    Laurence Caron

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  • Les Cahiers de Nijinski au Théâtre de l'Ouest Parisien de Boulogne-Billancourt

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    En 1918, Vaslav Nijinski n’a pas trente ans lorsqu’il commence la rédaction de ces cahiers. Durant six semaines, il écrit sur la vie, la mort, les sentiments, Diaghilev, la douleur, Dieu, la danse, à en perdre la raison. Celui qui maîtrisait à la perfection cet art de l’équilibre propre aux plus grands danseurs, celui qui émerveillait le public par des sauts d’une grâce et d’une puissance jamais vues, vacille irrémédiablement, bascule comme à l’intérieur de lui-même...

     

    Le ton est passionné, le propos est intelligent, sans concession aucune, et libéré de toutes formes de censures, les mots se délient. Sur la scène du Théâtre de l’Ouest Parisien, deux artistes remarquables, le comédien Clément Hervieu-Léger de la Comédie-Française, et, le danseur Jean-Christophe Guerri de l’Opéra de Paris, se fondent en un seul homme, et, donnent vie aux mots abandonnés par celui que l’on désigne encore comme « Le Dieu de la Danse ». Pour harmoniser l'ensemble, un homme de Théâtre, Daniel San Pedro, croise son talent avec celui d’une femme de Danse, Brigitte Lefèvre. Voici un équilibre parfait pour mettre en scène le déséquilibre, il fallait au moins cela pour supporter les envols et les sauts de Nijinski. 

    A l’image de ce décor pentu, vague déferlante ou montagne glissante, infiniment blanc, infiniment beau, l’artiste reste toujours au point culminant même lorsque son état est au plus bas. La sincérité de Nijinski, et, son acharnement à sonder l’obscurité des Hommes font oublier sa propre folie. L'oeuvre est précise, le discours est moderne et lumineux. Et justement la lumière, belle et sophistiquée, de Bertrand Couderc, embrase l’atmosphère en un écrin élégant.

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    Une dimension artistique nouvelle, le geste naît de la parole à moins que cela soit l’inverse ? Le théâtre et la danse, la parole et le mouvement, toute une vie bouleversante, fantasque, mystique et torturée, témoignée avec beaucoup de grâce, sur les planches du Théâtre de l’Ouest Parisien, marque à nouveau le passage indélébile d’un Dieu parmi les Hommes. Un souffle d'humanité à saisir en plein vol -indispensable- vous avez jusqu'au 18 janvier.

    Laurence Caron-Spokojny 

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  • NOW de Carolyn Carlson, au Théâtre national de Chaillot : le sens de l'harmonie.

    NOW s’écrit et se crie par la compagnie de Carolyn Carlson sur la scène du Théâtre National de Chaillot, son hôte pour ces deux prochaines années.

    carolyn carlson,théâtre national de chaillot

    Cette fois, la belle américaine s’est inspirée de la prose, philosophique et littéraire, de Gaston Bachelard, pour animer sa compagnie qu’elle souhaite : «ruche, espace de créativité et de liberté au sein duquel s’entrelacent geste et pensée poétique». Le dessin est toujours aussi beau, serein, il s’agit de percevoir l’espace, de l’apprivoiser sans le dompter, de l’épouser sans le contraindre. 

    L’art de Carolyn Carlson ne s’exprime pas uniquement par la danse, mais aussi par le son, la voix, une certaine théâtralité. Il y a toujours la musique, particulière, fluide, de René Aubry, qui se fond à la chorégraphie de façon indissociable.
    Les gestes semblent moins aériens qu’à leur habitude, il est question d'introspection, mais les danseurs s’élancent, sautent,

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  • Audrey Dana et Sami Bouajila montent sur le « RING » : un combat de charme, de chic et de choc…

    Après « Bulding » lors du Off d’Avignon cet été, Leonore Confino, auteur, et Catherine Shaub, metteur en scène, proposent « Ring » dans la petite salle du Théâtre de la Porte Saint-Martin.

    module.jpgCe qu’il y a d’intéressant dans le traitement d’un sujet aussi classique que « l’amour », et plus précisément l’étude des relations de couple, est le savoureux constat que les histoires des autres nous rassurent toujours. Pour deux raisons toutes simples : ou bien parce que l’histoire relatée nous rappelle notre vécu ou bien parce que nous ne l’avons pas vécu, peut-être pas encore ou bien jamais... 

    Par des effets de miroirs, lissés ou brisés, Leonore Confino renvoie des éclats de vies amoureuses et chacun en prend pour son grade. La recette est bonne, le public est friand : « ça y est, incroyable, on parle de moi !». Les répliques fusent, rythmées par une mise en scène toujours très sobre qui tend à mettre les comédiens en valeur. Sur un fond de décors vidéo (encore ! il faut s’y faire, c’est dans l'air du temps) aux lignes géométriques très pures, qui dénotent une atmosphère résolument urbaine soutenue par une création sonore tout autant contemporaine, les couples se font et se défont selon les mouvements inscrits par la chorégraphe Magali B. Décidément, Monsieur Jean-Claude Camus, directeur à la fois de la Porte Saint-Martin et de la Madeleine, a la volonté ferme de nous montrer un théâtre qui marie systématiquement les arts de la scène entre eux. Et cette fois-ci, l’équilibre est parfait, les apartés chorégraphiques donnent du grain au jeu des comédiens et mettent en relief le propos. 

    Le rôle de Camille est joué par Audrey Dana, et l’autre Camille est tenu par Sami Bouajila. L’homme et la femme portent le même prénom, cette astuce d’écriture gomme légèrement les clichés dans lesquels il est difficile de ne pas tomber pour un tel sujet. Mais les comédiens s’y vautrent avec plaisir dans ce jeu proche de la schizophrénie. Un méli-mélo adroit où chacun dévoile sa part de cynisme, de moquerie et parfois de tragique.
    Audrey Dana est intenable, trépignante, elle part chercher aux confins de sa féminité les arguments qui font osciller son rôle. La comédienne trace sa route et le choix de cette direction est le bon. Très à l’aise sur les planches, elle frôle l’esprit de Jacqueline Maillan qui veille toujours dans les cintres des bons théâtres, la scène et l’humour lui vont bien, très bien.
    Quant à l’autre Camille, son élégance n’a pas d’égal, Sami Bouajila, comme un danseur qui met en valeur sa partenaire lors d’un porté, se fait plus discret, délicat tant par sa présence que par son jeu. Il accompagne, il séduit aussi, il s’est éloigné un temps de son registre habituel mais sa sincérité est tout aussi forte.

    L’alchimie de ce couple et l'observation incisive, drôle ou tendre, des situations, nous rappellent à quel point il faut vraiment s’aimer pour supporter nos différences, mais aussi à quel point ce sont ces mêmes différences qui créent le sel d’une relation.

    Maintenant, c'est à votre tour de monter sur le ring... et si vous préférez juste assister au combat, c'est ici.

    Après avoir observé le monde du travail dans « Bulding », décortiqué les relations amoureuses dans « Ring », le duo artistique Confino-Shaub s’attaquera en janvier 2014 au thème de  la famille, vaste chantier, avec « Les uns sur les autres ».  Cela promet.

    Laurence Caron-Spokojny

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