Tango after Dark jusqu'au 18 octobre à Pleyel (vendredi, 17 octobre 2025)
Après New-York et Londres, les chorégraphes et danseurs Germán Cornejo et Gisela Galeassi présentent Tango after Dark à Pleyel jusqu’au 18 octobre, sur la musique d’Astor Piazzolla jouée en live. Le couple de champions du monde de Tango est entouré par huit danseurs affutés et décidés à montrer le meilleur en matière de Tango, une danse particulière, adulée ou décriée, pour le moins fascinante.
Originaire de Buenos Aires, en duo, sur deux ou 4 temps et souvent accompagné du bandonéon, cordes piano et contrebasse, le Tango est aujourd’hui inscrit sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l'humanité de l’Unesco. Au 19ème siècle, le Rio de Plata, dite la rivière d’argent, estuaire commun à l’Uruguay et à l’Argentine, a participé au développement économique (courants migratoires et marchands) de l’Amérique latine avec l'Europe, l’occasion de faire débarquer des danses nouvelles comme la polka, la mazurka et la valse. Influencées grandement par la culture de la communauté noire issue de l’esclavage, notamment pour sa musique, ces danses européennes en couple se resserrent (dites "abrazo") en une étreinte, rythmée et séquencée : le Tango nait. Provoquant jusqu’à être jugé immoral à certaines période de l’Histoire, le Tango devient un genre artistique, véritable phénomène de société, à écouter et à danser.
Pour seulement trois soirs à Paris, les chorégraphes et danseurs Germán Cornejo et Gisela Galeassi entourés par quatre autres couples de danseurs chauffent à l’extrême le plateau de Pleyel. Les interprètes, dans un défilé ininterrompu de robes strassées ou savamment drapées, pour les femmes, et de costumes trois pièces élégamment cintrés, pour les hommes, rivalisent en prouesses. C’est une danse technique, séquencée, où rien ne semble laissé au hasard, comme la grille harmonique du jazz, l’improvisation devient une matière créatrice. Tango after dark est une véritable performance artistique. Les danseuses et danseurs éveillent chez les spectateurs des exclamations de surprise et d’admiration, les jambes puissantes des danseuses fendent l’air quand elles ne sont pas projetées en d’étourdissants tourbillons. Les entremêlements serrés des pas de deux, dont la complexité paraît impossible à dénouer tellement elle est sophistiquée, sont absolument époustouflants. Glissant d’attitudes langoureuses à des postures dramatiques, il demeure ces ports de tête altiers, ce chic inébranlable, une fierté en somme tout à fait unique au Tango. On soupçonne la répétition et le travail acharné de ces artistes pour parvenir à ce niveau de technicité qui malgré tout affiche une fluidité d’interprétation impressionnante qui fait corps avec la musique.
Car Tango after dark n’est pas uniquement un spectacle de danse, c’est aussi une soirée de concert où le répertoire d’Astor Piazzolla est joué en live. Sur un fond de rideaux scintillants et sous les feux d’une rampe d’éclairages éblouissants, les formidables musiciens du show accueillent aussi une chanteuse et un chanteur participant à recréer l’ambiance unique de Buenos Aires avec ses bars joyeux, ses démonstrations de Tango à chaque coin de rues, ses théâtres grandioses, et ses « milongas » endémiques (lieux où danser le Tango).
Astor Piazzolla, dont la musique est aujourd’hui jouée par les plus grands orchestres, a transformé le Tango, selon les codes d’excellence et d’exigence de la musique classique tout en étant très fortement inspiré par le jazz. L’enfant prodige du bandonéon était un fils d’immigré italien, né en Argentine mais élevé à New-York avant finalement de rejoindre Buenos Aires à dix-sept ans ; Ástor Piazzolla rêvait de suivre la carrière de son ainé, de dix ans seulement, le compositeur Lalo Schifrin. Avant Piazzola, Carlos Gardel avait déjà fait évoluer le genre notamment en remisant les textes improvisés pour des propos plus poétiques souvent inspirés par l’environnement urbain. Ajoutant le charme et la qualité de voix de Gardel, le Tango avait rencontré un énorme succès populaire à cette époque. Sur les traces de Gardel pour lequel Piazzolla a nourri une grande admiration, Piazolla va hisser le Tango au rang d’art à part entière en lui offrant ses lettres de noblesse. A Pleyel, les musiciens de Tango after dark maîtrisent le sujet à la perfection et parviennent à créer une atmosphère chaleureuse, terriblement subtropicale, à la fois intime et spectaculaire.
Plus qu’un spectacle de très haut niveau, Tango after dark est un voyage en Amérique latine, un échappatoire ensoleillé au centre de Paris…
Laurence Caron
10:44 Écrit par CARON | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : germán cornejo, gisela galeassi, Ástor piazzolla, carlos gardel, tango, pleyel | |
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