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Le Dernier Testament au Théâtre National de Chaillot, jusqu'au 3 février

olindo bolzan,stéphane facco,gaël kamilindi,lou de lââge,jocelyn lagarrigue,nancy nkusi,morgan perez,philippe berthomé,stephan zimmerli,marc lainé,mélanie laurent,ledernier testament,théâtre national de chaillotS’emparer du best-seller américain Le Dernier Testament de Ben Zion Avrohom de James Frey était un sacré défi.
Mélanie Laurent l’a fait, approprié, adapté, mis en scène et enfin livré en pâture au public et à la critique. Un mets de choix.

 

Top of the pop

Mélanie Laurent sait bien s’entourer : Marc Lainé et Stephan Zimmerli à la scénographie, et Philippe Berthomé à la création lumière. La belle actrice, et réalisatrice engagée, s’est aussi très bien inspirée, en mettant en scène ce qui se fait de mieux mais en omettant aussi que ce qui est attendu est aussi ce qui a déjà été vu. Le Théâtre ne fait pas de cadeau. Dans le foisonnement des propositions contemporaines des théâtres subventionnés, il est difficile de se distinguer. Ils sont nombreux à bousculer les codes, à faire bouger les lignes. Quant aux mises en espace scéniques, cet apparent dépouillement -très fréquent- il est le signe d’une époque en crise ou sorte de provocation face à une société archi matérialiste, le grand écart est périlleux, il faut tenir l‘équilibre pour éviter de tomber dans le médiocre : ‘ce qui est à la mode’. Cet équilibre là, Mélanie Laurent le tient, même si cela vacille un peu…

Comme un air de déjà vu

La terre battue qui couvre le plateau de la salle Jean Vilar de Chaillot n’est pas aussi noire que celle que l’on a vu se soulever sous les pas des danseurs de Pina Bausch quand ils ont célébré Le Sacre du Printemps, pour la première fois en 1975. Comme pour le tournage d’un film, des projecteurs marquent l’espace du plateau de Chaillot, dans un coin une petite table en formica, croulant sous les livres, a ce je ne sais quoi de chiche, un rien bobo chic, un peu comme cette petite salade bio ornée d’une demie tranche de saumon, sur le bord du canal Saint-Martin, et qui allège le budget autant qu’une semaine de courses pour quatre personnes… Très poétiques enfin, les effets vidéo recherchés et joliment conçus sont soutenus par un accompagnement musical minimaliste opposé à des envolées pianistiques plutôt lyriques comme issues d’un film de Jane Campion. 

Voici, la bienveillance du Théâtre subventionné au décor faussement déshabillé, « façon épure », tout en nous mâchant le travail : s’il s’agit d’un enfant on entend son rire, si les anges sont évoqués on entend leurs chants qui flottent au dessus du public. Et puis, une petite sphère bleue descend des cintres, la Terre paraît si dérisoire, autant que ce ciel d’ampoules à filament, digne du rayon électricité au complet du BHV, qui prend l’allure d’une voie lactée aux âmes évaporées… 

Le mieux est l’ennemi du bien

Les comédiens : Olindo Bolzan, Stéphane Facco, Gaël Kamilindi, Lou de Lââge, Jocelyn Lagarrigue, Nancy Nkusi et Morgan Perez sont remarquablement bien dirigés par Mélanie Laurent, ils ne semblent pas du tout effrayés par la taille du plateau de Chaillot. L’adaptation, conçue avec Charlotte Farcet, est floue dans la première partie du spectacle, les comédiens sont les narrateurs de l’histoire avant de l’interpréter. Puis, quand enfin l’action prend le pas sur le récitatif, les comédiens se révèlent, il y a des fulgurances, de la tendresse, des petites trouvailles amusantes, des idées que l’on sent prêtes à émerger et puis : « à trop vouloir analyser, on tue l’émotion »*, c’est peut-être ce qu’il s’est passé…

De l'amour à donner

C’est une étrange idée que d’être allé chercher ce messie américain, pour une première fois au Théâtre, il n’était peut-être pas nécessaire d’aller aussi loin pour exprimer des choses qui sont si près du coeur ? La tolérance, l’amour, la religion, la vie, la mort, la sexualité, l’Humanité toute entière dans la lorgnette de James Frey n’était sans doute pas le meilleur angle de vue. Au Théâtre, la simplicité n’est pas quelque chose que l’on montre. Les beaux sentiments de Mélanie Laurent se sont encombrés, à vouloir bien faire souvent on en fait trop, la jeune star devrait plus avoir confiance en son instinct, comme elle le montre déjà dans son jeu d’actrice. Le Dernier Testament est un beau message d'amour et un Théâtre qui laisse entrevoir des instants encore bien plus forts pour l'avenir. Vivement la prochaine étape !

Laurence Caron

*citation Jean-Loup Sieff

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