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isabelle adjani

  • Kinship au Théâtre de Paris : Vittoria Scognamiglio, Isabelle Adjani et Niels Schneider

    franck joucla castillo,barnabé nuytten,dominique bruguière,dominique borg,théâtre de paris,vittoria scognamiglio,isabelle adjani,niels schneiderLe Théâtre de Paris, comme le Théâtre Hébertot et « Les cartes du Pouvoir », est à l’heure américaine avec un autre auteur contemporain : Carey Perloff. "Kinship" conte l'histoire d’un amour brisé, librement inspirée par le Phèdre de Racine.
    Comme hachés au couteau, les tableaux de Kinship s’enchaînent sur un rythme qui avale le temps, 1h40 sans entracte. L’ambiance est dépouillée, l'espace est réservé aux sentiments. Trois comédiens : Niels Schneider est un très juste et très passionné jeune premier, Vittoria Scognamiglio est une mère et amie, émouvante et sincère, et Isabelle Adjani est la femme amoureuse, et elle est… Elle est Isabelle Adjani.

    Le portrait de la star, une photographie en noir et blanc, descend des cintres, comme s’il était utile de nous rappeler sa beauté ? Il y a un arrière goût de Dorian Gray dont nous nous serions bien passés, puisqu’elle paraît là, en chair et en os, tout entière livrée à son désir de jouer.
    Un silence lourd se fait dans la salle, la lumière enflamme le visage de la comédienne, elle plonge le bleu de ses yeux dans les projecteurs et la vie, ou plutôt la pièce, commence. D’abord timide, la diction est hésitante, les mots se précipitent comme des enfants pressés vers la sortie devant le portail de l’école. Puis, rassurée, certainement par les qualités de jeux de ses deux compagnons de scène, faisant fi d’un public qui ausculte chacun de ses gestes, exhibant l’élégance de ses costumes et sacs à main, le personnage prend de l’assurance et s’empare de la comédienne ou plutôt l’inverse. Peu à peu, la comédienne dévoile un personnage complexe, elle dépasse le texte de très haut, à tel point que l’on souhaiterait l’écrit, de Carey Perloff, plus profond, plus introspectif...

    La frange sombre qui balaye son front ne parvient plus à cacher ses pensées, les amples costumes de soie ne dissimulent plus son corps, elle s'échappe, elle se libère par le jeu, l’enveloppe terrestre n’est plus, elle invente, elle joue, elle crée. En fait, elle est Phèdre, que ce soit pour cette pièce sous les traits de la rédactrice en chef d’un magazine américain, ou bien de Marie Stuart, de la reine Margot, de Camille Claudel ou encore d’un professeur de français dans un Collège de banlieue ("La journée de la Jupe" de Jean-Paul Lilienfeld en 2009). L’interprétation de son personnage est fondue par une technique irréprochable et par un sens très précis du texte. La voix est belle, modulée, vibrante, le geste l’accompagne. Précision. Rien d’inutile, rien de futile, tout est calibré, façonné par le Conservatoire et la Comédie Française, une science exacte, rien d’instinctif en somme à l’inverse de ce que l’on pourrait croire. Tout coule comme de l’eau, et rien, absolument rien, ne détourne le ruissellement de l’eau.

    La comédienne disparaît dans les coulisses, unique alchimie de simplicité et de majesté, elle laisse traîner derrière elle un parfum de mythologie, voulu ou inconscient, peu importe. Ce qui compte c’est le rêve, et Isabelle Adjani ne faillit pas, elle règne…toujours.

    Laurence Caron-Spokojny  

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