En chairs et en os ! The Slits (« les fentes »), l‘un des premiers groupes de punk rock féminin britannique, fait battre le cœur de la capitale, il suffit de s’échapper du métro Strasbourg-Saint-Denis pour s’engouffrer dans La Scala.

Accrochez-vous, ça déménage !

Même si cela va être très difficile d'ébouriffer le brushing de la première ministre Margaret Thatcher, la jeunesse anglaise choisit de se démarquer du rock sentimental des années 70, le punk rock est né, radicalement contestataire, dans sa musique ou son apparence vestimentaire, le discours est avant tout social.

De sacrées femmes, archi talentueuses, Rachel Arditi, Charlotte Avias, Salomé Diénis Meulien, Camille Timmerman, Kim Verschueren, et l’unique garçon, James Borniche, sont scénographiés par Marie Hervé et mis en scène par Justine Heynemann. C’est génial ! C’est d’abord de la musique live, La Scala, et son bleu profond créé par le scénographe Richard Peduzzi, ne se refuse décidément rien. Les vibrations se projettent sans heurts, les supers artistes sont autant musiciennes/ns qu’actrices/teurs. On n’appellera pas ça de la comédie musicale, laissons définitivement ce genre aux américains. Il s’agit juste d’un spectacle complet, d’une sincérité et d’une générosité rares. Dans PUNK.E.S le divertissement est à son comble tout au long du spectacle, sans jamais omettre de délivrer un message quasi historique qui résonne (encore) jusqu’à nous, c’est fort.

Punk is not dead

Cette misère de la classe ouvrière britannique, si bien décrite dans les films de Ken Loach, la nouvelle génération n’en veut plus, elle la refuse en bloc, elle le crie en musique avec beaucoup de drogue aussi, pour aller plus vite ou pour oublier. Des enfants et des femmes battus, des licenciements en masse, les avortements clandestins, l’alcool ou la drogue, des ravages, des colères, seule la musique parvient (peut-être) à expurger ces peines et cela ne peut être autrement que par le punk.

Refusant d’appartenir à toutes formes de mouvements, même s’il s’agit du féminisme, les Slits participent pourtant au changement (long) qui s’opère notamment avec leur titre le plus connu Typical girls dans lequel elles fustigent l’image de la femme moyenne, celle que les publicités aiment bien ranger sur une étagère de la cuisine à attendre son mari. C’était il y a un peu moins de cinquante ans et pourtant… la fiction du réel fait voyager avec elle des vérités qui n’ont pas vraiment pris de rides, difficile de ne pas laisser échapper au moins un soupir de regret. Souvent drôle, terriblement attachant, furieusement musical, PUNK.E.S raconte à la vitesse d’un éclair les vies de quatre gamines dans le vent, authentiques et exaltées, qui ringardisent Sid Vicious avec délice. Et puis c’est aussi l’histoire d’un sauvetage où la Culture avec un grand C est un radeau puis un véritable vaisseau qui porte vers un ailleurs que l’on souhaite toujours meilleur. 

On se précipite, c’est jusqu’au 6 avril !

Laurence Caron