Noé, Malandain Ballet Biarritz au Théâtre National de Chaillot
Les Ballets de Biarritz sont à Paris. Depuis le 10 mai et jusqu’au 24 mai, Thierry Malandain présente la création « Noé ». En mélomane inspiré le chorégraphe accompagne son oeuvre par La Messa di Gloria de Rossini sur le plateau du Théâtre National de Chaillot jamais quitté par vingt-deux danseurs, archi talentueux, pendant près d’une heure trente.
Le très prolifique chorégraphe français est animé par tout ce qui est grand - Don Juan, Roméo et Juliette, Lucifer, Le Portrait de l’Enfante, Orphée et Eurydice, L’après-midi d’un faune - entre autres nombreuses créations depuis 1984, et particulièrement par ce qui est mythique notamment avec L’Envol d’Icare, une commande réalisée pour le Ballet de l’Opéra national de Paris, en 2006.
Un long banc occupe la profondeur de Chaillot, scène mythique aussi, résolument acquise à ce qu’il se fait de mieux en matière de danse contemporaine. Les danseurs y glissent d’un bout à l’autre dans une alchimie rythmée. Au sol un bleu pacifique et tout autour des vagues de perles bleues enveloppent des interprètes athlétiques et gracieux. Très heureusement, le mythe du déluge n’a pas l’intention de figurer un cortège d’animaux rescapés, Malandain emmène son propos bien au delà, il est question d’une « humanité en mouvement »...
Les amateurs se régalent. Malandain dresse un panorama à 360 du mouvement néo-classique. Il y a des poignets noués frappant le plat des cuisses qui rappellent les accents dramatiques de la démente Gisèle de Mats Ek, des ensembles frénétiques échappés du somptueux Sacre du Printemps de Pina Bausch, et des avancées qui se forment et respirent à l’unisson, au son de chants lyriques, comme dans la désormais très classique Neuvième de Béjart. Quelle époque ! La danse est un éternel recommencement comme la musique, toute l’Histoire de l’Art en somme.
Rien de nouveau sous le soleil donc, sauf que, libérés de cette technicité inventive du 20ème siècle révélée sans contexte par l’impulsion créatrice de Ninjinski, les danseurs de Malandain apparaissent être des créateurs à leur tour et apportent une interprétation magnifique et radicalement contemporaine. L’enseignement atteint la perfection dont il faut prendre de la graine (d’Etoiles). Les personnalités se distinguent les unes des autres. C’est beau et vraiment intéressant même s’il est parfois difficile de capter son attention à la fois sur le mouvement et sur les voix enregistrées, le regard et l’ouïe se font une concurrence acharnée.
Noé de Malandain est assurément une anthologie du mouvement pour qui a soif d’exaltation chorégraphique. A apprécier.
Laurence Caron
(photo Olivier Houeix)