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  • Fureur au Théâtre de l'Essaïon : une rage terriblement drôle !

    fureur,theatre essaion,victor haïm,stéphanie wurtz,benjamin bollenLa musique classique est un art qui s'approche du divin, et ceux qui tendent à la maîtriser peuvent parfois se considérer comme des sortes de divinités… 
    C’est le cas pour le  Maestro crée par Victor Haïm, formidablement interprété par Benjamin Bollen et astucieusement mis en scène par Stéphanie WURTZ, les lundis soirs sous la voûte (céleste pour cette fois) du Théâtre Essaion.

    Les musiciens d’orchestre sont un genre d’artistes à part… La formation en orchestre leur permet de faire corps afin de défendre leurs droits, dans un théâtre, ou bien face à un chef d’orchestre trop exigeant. Ce soir là, le chef d’orchestre a dépassé les bornes, et ses musiciens, syndiqués pour la plupart, ont décidé de le virer, le vote s’est prononcé à l’unanimité sauf une voix.

     

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  • "j'aime, j'aime, "j'aime" : L.A. Dance Project, du 5 au 9 mars 2014 au Théâtre du Châtelet

    « J’ai rêvé d’un compagnonnage d’artistes et d’un collectif de créateurs parce que la danse est disséminée partout. [...] Un projet autour de la danse et de tout ce qu’elle peut représenter aujourd’hui. » C’est ainsi que Benjamin Millepied s’exprimait au moment de lancer ce L.A. Dance Project, né de son amour de Los Angeles, scène artistique au bouillonnement incessant.

    Le danseur et chorégraphe français, produit d’une éducation chorégraphique parfaitement classique, nourri de Balanchine et de Robbins, veut créer un modèle original, donner une nouvelle définition de la collaboration artistique. Nommé directeur de la danse de l’opéra de Paris, il aspire cependant à rester proche de cette expérience féconde. déjà présent en 2013 au Châtelet, le groupe proposait des œuvres de Merce Cunningham, William Forsythe et Benjamin Millepied, ce dernier signant aussi une création mondiale. L.A. Dance Project offre cette fois de mettre en valeur des œuvres de chorégraphes délibérément hors des sentiers battus.

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  • "A suivre!", les Fables d’Isabeau de R. au Théatre de Dix-Heures

    jean michel joyeau,michel miletti,isabeau de r,hélène de serres,théâtre de dix-heures,juste pour rire« Le Cabaret des arts » fut la première enseigne du lieu, puis « La lune Rousse » en 1904 pour enfin être baptisé le  Théâtre de Dix-Heures  en référence au roman de Courteline « Les linottes » en 1912 : « Je vous dis que l’homme qui fondera un théâtre de Dix heures, pratique, confortable, élégant et où on ne jouera que des pièces gaies – car les heures ont leurs exigences – gagnera une fortune, par la force des choses, par le seul fait qu’il aura étanché une soif. »

    Cette prédiction littéraire s’est avérée juste. Le Théâtre de Dix-Heures, sur le trépidant boulevard de Clichy, mêle adroitement têtes d’affiches et nouveaux talents. L’esprit est à la découverte et au rire. Dans la salle chaleureuse de velours rouge, il est impossible de tricher, la proximité entre les artistes et le public est fondu de sincérité, presque épidermique.

    jean michel joyeau,michel miletti,isabeau de r,hélène de serres,théâtre de dix-heures,juste pour rireAprès les riches et belles heures de Jean Michel Joyeau et Michel Miletti, Juste Pour Rire dynamise le lieu depuis 2007. Les humoristes se disputent la scène ; pour confronter leur art, le choix ne doit pas être toujours aisé mais en cela Juste pour Rire possède un savoir-faire indiscutable.

    Parmi ces artistes, il y a Isabeau de R. Avec assurance, Isabeau franchit la scène, elle n’a pas vraiment l’air de s’excuser d’être là, vous êtes ici chez elle.

    Pour cette fois encore, il s’agit d’une bourgeoise (c’est son crédo), un peu réac ou plutôt nostalgique, elle jette un œil lucide sur les changements qui se sont opérés ces quarante dernières années. Entre stand-up, parodie burlesque et parfois même imitation, l’humour d’Isabeau n’attaque personne, elle épouse juste les courbes d’un personnage et témoigne d’une (sa ?) réflexion sur l’éducation, les parents, les enfants, la télévision. Isabeau regarde un univers immédiat, concret, elle titille les points les plus faibles, les nôtres ou ceux de votre voisin de fauteuil. Il y a plusieurs entrées, plusieurs niveaux de compréhension à son univers, ainsi chacun en prend pour son grade. Très efficacement, les sketches s’enchaînent selon une mise en scène d’Hélène Serres : "La Caissière" est un exercice textuel formidable, " Les Fables" sont des virgules indispensables, "Bonne nuit" est très bien vu,…  

    Isabeau de R. s’adresse à tous, charmeuse et pétillante, elle promet de vraiment beaucoup vous amuser avec "chic et décontraction". Rendez-vous au 36 boulevard de Clichy différentes méthodes vous seront proposées pour ne pas devenir « de vieux cons » (dixit Isabeau de R.)Laurence Caron-Spokojny

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  • TILT ! au Poche-Montparnasse : Bruno Solo et Sébastien Thiéry sont remarquables !

    Bruno Solo,Antony Cochin,tilt,poche-montparnasse,Sébastien Thiéry,Jean-Louis BenoîtLes mots se déplacent, ils vont et viennent, ils claquent les portes, ils se murmurent ou bien ils se crient, et même si les mots ont plusieurs vies et ont la faculté de fendre l’espace, ils restent une affaire d’hommes. Sans les hommes pour les écrire et pour les dire, les mots ne seraient rien.

    Sur les planches du Poche-Montparnasse Bruno Solo et Sébastien Thiéry sont les serviteurs efficaces et zélés de ces mots ; ces mots sont nés de la plume exercée de Sébastien Thiéry et ils sont mis en scène, au cordeau, par Jean-Louis Benoît. La performance d’Antony Cochin est aussi à remarquer, le comédien propose quelques virgules burlesques déjà inscrites sous l’enseigne clignotante « culte ». Lire la suite de l'article

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  • Pour porter un regard, à la fois un regard scientifique et humaniste, sur Albert Einstein et son siècle : deux géants, Francis Huster et Jean-Claude Dreyfus

    jean claude dreyfus ce qui est remarquable.pngEn 1934, Albert Einstein a fui l’Allemagne nazi, il est réfugié aux USA, à Princeton. A 55 ans, le lauréat du Prix Nobel de Physique rencontre, sur les rives d’un lac du New Jersey, un vagabond, écorché vif par la disparition de son fils sur le champ de bataille en 1918… 
    Les deux personnages, dont la relation se nourrit d’échanges intellectuels, souvent houleux, font croître peu à peu une véritable amitié.

     

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  • Pour ne plus jamais avoir peur de la nuit : le Muséum National d’Histoire Naturelle dévoile quelques secrets nocturnes…

    Dans l’écrin du Jardin des Plantes de Paris, entouré par les serres, galeries scientifiques, cabinets de curiosités et autres démonstrations paléontologiques, botaniques ou zoologiques, le Muséum National d’Histoire Naturelle entretient un rapport très privilégié avec le monde de l’imaginaire, parfois même de l’invisible… En cela, l’exposition « Nuit » est une sorte de consécration, le mystère est sondé dans ses recoins les plus obscurs. Et, c’est dans cet univers nocturne que le parcours de l’exposition est engagé.

    nuit,muséum national d'histoire naturelle

    Le chemin est précis, autant que les petits cailloux blancs semés par le Petit Poucet, il n’est pas question de s’y perdre mais plutôt de s’y laisser embarquer à la manière de Peter Pan qui tire les enfants hors de leur lit pour un voyage dans la nuit étoilée. La voûte Céleste et ses précieuses explications ludiques et didactiques sont là pour nous indiquer la route à emprunter. De très beaux animaux, comme seules les collections zoologiques du lieu savent les représenter, croisent des insectes rares et discrets alors que le sol se jonche de météorites précieuses. Un vol de chauve-souris effraie un instant, s’il se compare à l’ombre de la cape du Comte Dracula, pour finalement se révéler tout à fait inoffensif. Ici, tout est poésie, enchantement et découverte, seule la pollution lumineuse créée par l’Homme constitue la véritable menace…

    Le MNHN gomme définitivement la frontière qui subsistait peut être encore entre la science et le domaine de l'imaginaire : les deux avancent ensembles et se répondent. Le mystère éveille l’imagination, stimule l’esprit et la curiosité, aussi bien pour les enfants que pour les adultes.
    Entre ses murs, le Muséum National d'Histoire Naturelle participe une nouvelle fois à faire rayonner la nature selon un décryptage scientifique… fascinant !  
    Laurence Caron-Spokojny

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  • Les derniers jours de l'exposition "Living rooms" de Robert Wilson au Louvre

    louvre,robert wilson,marina bramovic,living roomsExposer son appartement dans les salons du Louvre est un privilège réservé au metteur en scène Bob Wilson. En 2008, Bob Wilson avait déjà mis en scène ses funérailles à la demande de l’artiste déjantée Marina Bramovic*, c’est dire à quel point la mise en scène ne supporte aucune limite pour Bob Wilson. 

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  • Les amants terribles, de Benoîte Groult, embarquent sur "Les vaisseaux du coeur", au Petit Montparnasse

    serge riaboukine,benoîte groult,les vaisseaux du coeur,petit montparnasse,josiane pinson,jean-luc tardieuGeorge sans ‘s’ - son nom inspiré par George Sand, annonce déjà la couleur - est une parisienne, raffinée et cultivée. Gauvin - dont le nom héroïque est emprunté à un des chevaliers de la table Ronde - est un marin pêcheur, simple et rustre.
    Entre ces deux héros, l’histoire d’amour se noue et se dénoue au rythme des pêches. L’amour partagé est passionné. Mais l’harmonie n’est pas au goût du jour, les contraintes sociales et culturelles enchaînent les amants et les contraignent à quelques rendez-vous entre Paris et des rives exotiques…

    « C’est trop compliqué d’écrire une histoire d’amour » : c’est ce qu’affirme l’héroïne de Benoîte Groult. Pourtant, l’auteure a su remporter le défit dans un écrit résolument moderne. « Les vaisseaux du cœur » dépasse le style du 'roman d’amour' qui consiste à décrire la puissance du sentiment amoureux. Benoîte Groult, avec l’alibi de la romance, affirme un engagement féministe, limpide et combatif. A cet esprit militant s’ajoute un amour immodéré pour la mer - partagé avec son mari, l’écrivain et journaliste, Paul Guimard - et se délie sous une plume aiguisée. « Les vaisseaux du cœur » ont remué la bonne conscience et bousculé les diktats à leur sortie en 1988, et c’est tant mieux !

    serge riaboukine,benoîte groult,les vaisseaux du coeur,petit montparnasse,josiane pinson,jean-luc tardieu,laurence caron-spokojnyDeux en scène, Josiane Pinson et Serge Riaboukine, jouent sur un quai ou sur le bord d’un ponton qui prend parfois l’allure d’un lit immaculé, théâtre de leurs ébats. Des pans d’étoffe d’un blanc pur, suspendus aux cintres, les empêchent parfois d’avancer, empêtrent leurs déplacements, comme autant de contraintes qui gênent leurs vies. Ainsi, Jean-Luc Tardieu peint la toile de fond de l’histoire selon une mise en scène impeccable qui, toujours, prend grand soin des comédiens et sert le texte avec raffinement.

    Josiane Pinson a adapté le texte de Benoît Groult. Parfaitement ajustée, elle se glisse dans la peau de George, elle touche juste, elle interpelle, et son personnage est souvent très agaçant, elle veut tout sans rien donner, et cela elle en est tout à fait consciente... Le temps de la représentation, elle incarne un féminisme qui poursuit la lutte (incessante et toujours d'actualité) ; l’amour physique, décrit en termes crus, est un prétexte pour faire entendre sa voix. Comparée à son amant, George semble être la moins libre à moins qu’elle soit la plus réaliste, il est à chacun d'entamer cette réflexion... Josiane Pinson fait aussi office de narratrice, et malgré l’importance de son texte, elle laisse toute la place nécessaire aux courtes répliques de son partenaire. Serge Riaboukine est Gauvin, il campe un marin pêcheur plus vrai que nature, il ne cesse d’opposer sa forte stature à une candeur masculine désarmante. La performance de l’acteur est d’une grande poésie nourrie par de très délicates intentions de jeu.

    Le couple de comédiens fait preuve d’une sincérité absolument magnifique. Il n’est pas question de confronter l’homme et la femme, mais plutôt d’assister à une sorte d’union sacrée qui tente de résister coûte que coûte aux contraintes imposées par la société mais surtout aux idées reçues de chacun. « Les vaisseaux du cœur » est encore une très, très jolie pièce proposée au sein de la toujours très artistique saison du Petit Montparnasse.

    Laurence Caron-Spokojny

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  • BRASSAI, jusqu'au 8 mars à l'Hôtel de Ville de Paris

    Brassaï

    Brassaï a le coup d’oeil infaillible, il ne rate rien. Il est un des premiers à remarquer l’importance des graffitis sur les murs de Paris, en les saisissant sur argentique il les fait entrer au panthéon de l’art primitif. 
    Observateur des tendances, l’élégance des parisiens et des parisiennes ne lui échappe pas, tout autant que l’allure élancée de la tour Eiffel sur un ciel voilé. La nuit, arpentant les rues de Paris,  il piège dans sa boîte le reflet du clair de la lune sur les pavés de granit, la courbe savante d'un pont de la Seine et la drôle de rencontre avec un gavroche à l'accent des faubourgs. Lire la suite ici

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  • « Hollywood » est un triomphe depuis deux saisons, après Daniel Russo, Samuel Le Bihan et Dominique Pinon, le Théâtre de la Michodière poursuit l'histoire avec Thierry Fremont, Pierre Cassignard et Emmanuel Patron.

    laurence caron-spokojny,théâtre de la michodière,daniel colas,françoise pinkwasser,hollywood,ron hutchinson,margaret mitchell,victor fleming,autant en emporte le vent,ben hecht,david o.selznick,jacques-emile ruhlmann,thierry fremont,pierre cassignard,emmanuel patronEntrer dans le hall du théâtre de la Michodière est déjà un voyage dans le Hollywood des années 30. La décoration précieuse, intacte jusqu’à ce jour, de Jacques-Emile Ruhlmann, ornée d’appliques stylisées, de moulures courbes et de lignes géométriques et de sa moquette graphique rouge et or, révèle ici la puissance esthétique des années Art Déco. On imagine aisément que la décoration du bureau du célèbre producteur de films David O. Selznick devait s’en approcher.

    laurence caron-spokojny,théâtre de la michodière,daniel colas,françoise pinkwasser,hollywood,ron hutchinson,margaret mitchell,victor fleming,autant en emporte le vent,ben hecht,david o.selznick,jacques-emile ruhlmann,thierry fremont,pierre cassignard,emmanuel patronL’enjeu est aux films en Technicolor ; en 1939, le tournage de «Autant en emporte le vent» est stoppé. David O. Selznick vire le réalisateur George Cukor et convoque Victor Fleming, déjà sous contrat pour «Le Magicien d’Oz». Pour une réécriture du script, du best seller éponyme de Margaret Mitchell paru trois ans plus tôt, David O.Selznick fait appel au talent du scénariste  Ben Hecht.

    Voici, Pierre Cassignard, Thierry Fremont et Emmanuel Patron pris dans un huit-clos délirant sur la scène d’un des temples parisiens du théâtre de Boulevard.

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    Faire un film a quelque chose de l’ordre de l’hystérie, une volonté farouche, et cela Ron Hutchinson, le dramaturge britannique, a su le décrire dans la composition de ses trois rôles essentiels : le producteur, le scénariste et le réalisateur. Les trois comédiens rivalisent de talent et leur joie de jouer ces personnages extravagants est communicative, le public est plié de rire. La mise en scène classique mais très efficace de Daniel Colas fait virevolter les comédiens, les artistes énergiques défoulent un jeu viril, nécessaire au propos. Les personnages ne se prennent pas au sérieux, ils doutent, et cette humanité désarmante parvient à s’exprimer dans un désordre débordant parfaitement orchestré.
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    Emmanuel Patron est tout aussi juste que Thierry Fremont qui, définitivement dingue, est si habité par son personnage qu’il se jette sur la scène dans un abandon magnifique ! Quant au rôle féminin (pas vraiment à son apogée) illustré par de charmantes  et très essentielles apparitions de Françoise Pinkwasser, dans le rôle de la secrétaire du producteur, rythment très subtilement l’enchaînement des scènes. C’est 1h40 de spectacle partagé dans la joie... Terrible !

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    La finesse du propos, ajoutée à la performance de ces très (très, très, très) grands comédiens, donne une vraie classe au parti pris burlesque de la pièce. Le théâtre de Boulevard affiche « HOLLYWOOD » au fronton du Théâtre de la Michodière en lettres de noblesse… pourvu que ce phénomène soit contagieux !

    Laurence Caron-Spokojny

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  • « Des fleurs pour Algernon » au Théâtre Hébertot, interprété par Grégory Gadebois : attention chef-d'oeuvre !

    image001.jpgCharlie Gordon est un jeune homme simple, il n’est pas bête, il est juste « simple ». Il travaille dans une usine dans laquelle il est chargé du nettoyage des toilettes. Régulièrement, deux de ses amis l’invitent pour boire un verre, ils le font boire pour se moquer de lui.

    A l’université Beekman, Charlie suit les cours de Miss Kinnian, il apprend à lire et à écrire avec une grande assiduité. Sa motivation extrême est remarquée par deux éminents professeurs qui lui proposent de démultiplier ses facultés intellectuelles par une intervention du cerveau totalement inédite. Cette intervention a déjà été réalisée sur une souris blanche, Algernon. Avant et après l’opération programmée, les scientifiques demandent à Charlie de noter, chaque jour, ses impressions sur un cahier… 

    Juste après Robert Hirsh (Le Père) et avant Michel Bouquet (Le roi se meurt), Grégory Gadebois est sur les planches du Théâtre Hébertot, et ce dernier est largement à la hauteur de ses voisins !

    Hier soir, Grégory Gadebois a englouti la salle entière dans les pages du journal intime de Charlie Gordon. Au départ, ce fut une nouvelle « Flowers for Algernon » écrite par David Keyes, publiée pour la première fois en 1959, et aussitôt récompensée par le Prix Hugo en 1960 ; puis en, 1966, l’histoire, transposée en roman, reçoit le Prix Nebula du meilleur roman (prix réservé à la Science fiction).

    image002.jpgL’adaptation de Gérald Sibleyras et la mise en scène d’Anne Kessler sont en tout point parfaites, résolument contemporaines, la part belle est faite à la magnifique présence du comédien et à la sincérité du texte. L’intense scénographie de Guy Zilberstein, les lumières ingénieuses d’Arnaud Jung et l’inventivité  sonore de Michel Winogradoff contribuent à offrir un écrin idyllique au jeu de Grégory Gadebois.

    Pour écrire ces lignes, j’avoue mon impuissance, je ne suis pas certaine de retransmettre ici  l’émotion incroyable ressentie dès les premiers mots prononcés par Grégory Gadebois jusqu’aux derniers, alors qu’ils retentissent encore… 

    La sensibilité brute révèle un travail, une recherche, de la part du comédien, incomparable. Le texte est oublié pour être éperdument incarné, Charlie Gordon prend vie d’entre les lignes de son journal intime. Il y a une juste mesure, respectée, et maniée avec la plus grande dextérité pendant 1h20 sans jamais faillir. Le comédien triture nos sentiments, il les fouille avec gourmandise avec la même aisance qu’un enfant plongé dans un sac de bonbon. La douce diction de Grégory Gadebois rythmée par sa gestuelle de virtuose ajoutent à la présence chaleureuse et intense du comédien. Pourtant, la pudeur est profonde, elle résiste, et l’angélisme du personnage fait fondre son auditoire. Le public est liquide, déplacé comme une marée, remué par une forte et indicible houle.

    Charlie Gordon s’introspecte méticuleusement avec les mots les plus simples, il observe ce double, absurde, une souris de laboratoire. La cruauté de l’humanité réside là dans ce rapport empathique bourré de tendresse, si bien décrit et si bien joué, entre un homme et une souris, ou bien entre un homme et lui-même. Et puis, il y a cet enjeu de l’intelligence qui se déploie avec arrogance pour dépasser l’affect ; le déséquilibre ultime, l’un ne va pas sans l’autre, son QI écrase toutes formes de sentiments, jugés inutiles… 

    « Des fleurs pour Algernon » est une parfaite fusion, absolue, entre un comédien et un texte. Et, trêve de bavardages, je ne saurai mieux vous l’exprimer ici que par ces mots : Au Théâtre Hébertot, « Des fleurs pour Algernon », interprété magistralement par Grégory Gadebois, est un chef-d’œuvre ! 

    Laurence Caron-Spokojny

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