ce qui est remarquable... un regard sur la culture pop - Page 13
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"La chanson de l'éléphant" est un air formidable !
« The Elephant Song » de Nicolas Billon a vu le jour au sein d’un atelier d’écriture à Montréal, puis joué au Festival Stratford du Canada, l’élégant texte est pour la première fois présenté en France sur les planches toujours aussi novatrices du Petit Montparnasse.
C’est un personnage fragile et puissant, celui de Michaël, enfermé dans un asile de fous, qui marque les premiers pas sur scène de Jean-Baptiste Maunier (très jeune star à l’issue du film les Choristes de Christophe Barratier en 2004). Exercé au jeu par l’école de Lee Strasberg de New-York, Jean-Baptiste Maunier, du haut de ses 22 printemps, livre une démonstration qui semble puiser au plus profond de lui-même, il ne s’épargne rien, les tourments de son personnage vibrent, douloureusement, méthodiquement il décortique, analyse, digère et donne. Intense et physique, il y a quelque chose de Brando dans ce grand gamin là mais aussi quelque chose de Jean-Louis Barrault, une poésie discrète, un genre de s'excuser...
En face, Pierre Cassignard donne une leçon différente au jeune acteur, d’un jeu plus classique mais tout aussi fervent, maîtrisé, il est ce psychiatre aussi directeur de son établissement ; sa performance est remarquable. Tandis que Christine Bonnard rythme les scènes par ses apparitions sincères et délicates dans le rôle de l’Infirmière Peterson.
La différence d’âge des deux acteurs, leur façon de jouer, et, l’écriture fine de chacun des rôles, opposent les deux protagonistes pour apporter toute sa justesse au propos. D’Amour il est évidemment question mais il s’agit de celui qui se cache, celui qui asservit, le pervers, celui qui ordonne et détermine les choses de la vie dès le départ et qui paralyse le libre arbitre pourtant si essentiel à notre humanité. Le metteur en scène, Bruno Dupuis, orchestre l’ensemble avec une grande simplicité apparente, la part belle est laissée au jeu des comédiens, emportés par la fluidité du texte, les déplacements sur scène scandent des sentiments bourrés de paradoxes… qui raisonnent encore.
La vidéo de Léonard et le décor très cinématographique de Sophie Jacob renforcent l'ambiance de thriller psychologique, la silhouette d'Alfred Hitchcock semble parfois se dessiner et les couloirs de l'hôpital psychiatrique de "Vol au dessus d'un nid de coucou" s'étirent derrière la porte.
Tout d’abord circonspect, puis intrigué, déstabilisé, puis tout à fait bouleversé, il est impossible d’en sortir indemne.
Magnifique, allez-y.
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L'exposition "Titanic" est prolongée jusqu'au 29 septembre, Porte de Versailles
Avec votre carte d'embarquement et votre audio-guide (adapté pour petits et grands), je vous conseille vivement de vous lancer sur les flots à bord de l'élégant Titanic.
Le voyage débute à la construction de ce géant des mers, puis par son énigmatique naufrage et enfin aux différentes campagnes d'exploration de l'épave et de ses objets. Ce plongeon en 1912 est une page historique à étudier avec la plus grande passion...
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"Mishima n'était pas un héros" de Laurence Caron. éd. Publibook
Chronique littéraire du magazine "Opérette, théâtre Musical" (août 2013) sur "Mishima n’était pas un héros" de Laurence Caron
Le public du Lyrique connaît bien le ténor Michel Caron, disparu en 2001, dont le nom a brillé au fronton des théâtres, des années 60 à la fin des années 80. Il a été une des vedettes du Châtelet, des grandes scènes de province et de l’étranger, du théâtre de Paris et de l’ORTF.
On a vu Michel Caron au cinéma et dans des publicités. L’objet du livre de Laurence Caron, sa fille, n’est pas de retracer une carrière. On aurait d’ailleurs aimé que l’auteur nous fasse partager autant les moments de gloire que les périodes plus difficiles, où les contrats se font plus rares. Laurence Caron écrit un beau livre sur la finitude et la violence du suicide. Car son père, Michel Caron, s’est donné la mort il y a dix ans, sans livrer d’explications sur son geste. Sa fille ne s’en remet pas. Elle inscrit son témoignage dans la quotidienneté d’une famille unie, inclut ascendance et descendance, et scrute à la lumière de ces évocations tout ce qui aurait pu expliquer l’irrémédiable. Vainement. A l’exception de quelques bribes.
Mais ni Mishima, ni Banville n’apaisent la douleur. La revanche (sur quoi ?) est dans cette vie, qui force les destins, qui arrache malgré tout de bons moments (en vrac, les vacances, Arletty, Offenbach…). Le livre évoque dans des pages pudiques, mais d’une telle justesse, les ravages de la maladie d’Alzheimer de la Grand-mère, ou encore maints détails sociologiques sur le vécu du métier, si particulier, de chanteur lyrique. Les parades tombent les unes après les autres.« Désormais, pour être à la hauteur de cette noblesse de sentiment, je m’emploie pour que son absence soit aussi importante que sa vie », conclut Laurence Caron. Le livre, peuplé de cette absence, bâtit une sorte de temple au disparu. Et si la conscience de la finitude était le meilleur rempart contre les formes imprévisibles, cruelles, que prend l’inéluctable départ, toujours injuste, toujours sans réponse ? Un très beau témoignage.
Didier Roumilhac (pour le magazine "Opérette", août 2013)
Laurence Caron, « Mishima n’était pas un héros », Publibook, 2013, 16 euros. -
DYNAMO : un feu électrique et coloré embrase le Grand Palais jusqu’au 22 juillet
Au début du XXème siècle, de nombreux courants artistiques se sont éloignés des codes établis de la représentation d’une œuvre, pour aller expérimenter la source de nos sensations premières, la vision, c’est alors que la contemporanéité de l’art a pris radicalement son envol.
Cent quarante deux artistes sont représentés dont le formidable et maître absolu (à mes yeux) Julio Le Parc déjà encensé entre ces lignes lors de son exposition au Palais de Tokyo cette année.
Emportés par le rythme trépidant et si riche de DYNAMO, nos précieux yeux sont mis à l’épreuve dans ce voyage extraordinaire, peuplé de néons, flashs et autres clignotants aux lignes courbes ou anguleuses.
Le Grand Palais se fond en véritable lieu d’exposition contemporain jusqu’à sa terrasse. Le parcours de l’exposition est ludique, les allées regorgent d’œuvres aux allures de trouvailles ingénieuses. Ce gigantesque cabinet de curiosité révèle des phénomènes qui peuvent mener jusqu’à la perte d’équilibre, des ballets de faisceaux fauchent le rythme de vos pas pour les emmener danser sur des crépitement de flashes. Quelques monochromes rivalisent avec des installations luminescentes, les miroirs argentés se déplacent et enveloppent le curieux pour enfin le diriger vers de somptueux mobiles de Calder, histoire de calmer les esprits avant le retour à la réalité…
L’expérience visuelle est telle qu’il ne faut pas craindre de se considérer un peu comme dans la peau d’un rat de laboratoire, mais c’est ce qui est appréciable. Cet enveloppement cinétique de nos sens devrait être prescrit de façon curative afin de nous libérer de toutes formes de préjugés face à l’art contemporain, une sorte de cure de jouvence.
A ce propos, les enfants ne s’y trompent pas : ils s’éclatent !Laurence Caron-Spokojny
ZYLVINAS KEMINAS
(Lituanie, 1969)"Beyond the Fans"
De l'ordre du sublime, l'éphémérité extrême de ces bandes magnétiques qui restent en suspension dans l'air, tenues par le brassage de l'air du ventilateur, forment un ballet délicat...
© Photos : L.Caron-Spokojny
Dynamo, un siècle de lumière et de mouvement dans l’art 1913-2013, Galeries nationales du Grand Palais Sur près de 4000m2, l’exposition montre comment, de Calder à Kapoor, de nombreux artistes ont traité les notions de vision, d’espace, de lumière et de mouvement dans leurs œuvres, en réalisant souvent des installations dans lesquelles le visiteur est partie prenante : les atmosphères chromatiques et changeantes d’Ann Veronica Janssens, les miroirs kaléidoscopiques de Jeppe Hein ou les réalisations in situ de Felice Varini.
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Colorature : MUMMENSCHANZ au Casino de Paris
Depuis sa création en 1972, Mummenschanz expérimente, exerce, transforme et déploie un art particulier. Ce spectacle s’attache à rester au plus proche de ses spectateurs afin d’émouvoir et éveiller les sens de tous.
Mummenschanz est un conte sans fin, l’inspiration est fantastique et fantaisiste, les histoires se délient sans début, sans fin. Soufflé par le glissement des étoffes et matériaux sur le plateau du Casino de Paris, imprégné par les soupirs de ces danseurs marionnettistes, le silence emplit l’espace pour composer une musique que seules nos émotions perçoivent.
Simple et sophistiqué à la fois, les formes, soieries, fil de fer et autres rouleaux de papier forment un ballet où l’humour joue des coudes aux côtés de la poésie. Les disciplines artistiques sont largement ratissées et maîtrisées, de la danse classique à la pantomime, nous nous doutons que le travail et la recherche artistiques sont bien menés tant le spectacle reflète une forme d’art brut abouti, et, à la fois savant.
Les artistes humblement cachés de Mummenschanz s’expriment pleinement dans un langage artistique harmonieux, bourré d’inventions, chacun y trouve son compte adulte comme enfant, égaux.Laurence Caron-Spokojny
Du 21 au 26 mai 2013, pour la première fois au Casino de Paris et pour 6 représentations exceptionnelles : un spectacle culte, inclassable et unique à savourer en famille !
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Le meilleur plan du dimanche matin !
La Galerie des Impressionnistes du Musée d'Orsay est sans aucun doute une des plus belles expositions à voir dans Paris... peut être la plus belle.
La palette sobre et à la fois colorée, de l'architecte Jean-Michel Vilmotte, et, les structures métalliques, de Victor Laloux, qui ont marquées les années 1900 laissent s'exprimer les oeuvres des Maîtres.
Manet, Cézanne, Degas, Pissarro, Renoir, Van Gogh, Caillebotte, Sisley,... se rejoignent dans un enchaînement mélodique pour réenchanter le visible et laisser voir l'invisible. Tout est là, les codes de l'art contemporain sont clairement démontrés.
La visite de cette galerie est un rendez-vous à renouveller tout au long de l'année, afin de ne pas se laisser distraire et se rapeller l'essentiel.Laurence Caron-Spokojny
ACTUELLEMENT A ORSAY : "L'Ange du Bizarre", une exposition fascinante et étrange d'oeuvres qui ont puisées leurs sources à la fin du XVIIIe siècle en Angleterre notamment avec l'essort de la littérature gothique. Très beau, seulement un peu macabre... vraiment flippant !
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Les lumières de Julio Le Parc
Comme j'aime ce lieu ! Les allées du Palais de Tokyo s'entrecroisent telles des rues, des étages, des dédales, des recoins, un désordre harmonieux, résolument urbain, en expansion constante. La grisaille d'un parking de supermarché de banlieue ou la blancheur d'une galerie contemporaine se suivent pour s'évanouir dans des douves sombres aux formes arrondies. On pose ses valises à l'entrée, avenue du Président Wilson, l'idée est de se perdre, la ballade est aléatoire, tout oublier donc, puis s'en échapper, respirer le grand air (...de Paris) léger, riche et ébloui. Ce vaste chantier accueille (entre autres artistes inventifs), jusqu'au 13 mai 2013, les installations et créations lumineuses du (par conséquent très lumineux) Julio Le Parc dans l'écrin attendu de l'exposition SOLEIL FROID.
Vue du vernissage de Julio Le Parc, lundi 25 février. © Photo : Didier Plowy
Parfaitement mises en scène, les oeuvres de Julio Le Parc s'épanouissent sur un parcours à la fois ludique (les enfants et ados adorent) et initiatique. Il s'agit ici de prendre une leçon radicale d'art contemporain, pourrait-on dire une révision des bases classiques de l'art contemporain ? Soit. De 1950 à aujourd'hui, l'artiste nous en met plein les yeux, cela flash, clignote, déstabilise, ennivre, perturbe, distrait, interroge, enfin c'est beau ! Quelquechose d'inédit, et à la fois très familier, se passe.Une chance, pour cette fois, que Julio Le Parc soit exposé au Palais de Tokyo : pour l'anecdote, cette artiste engagé, fervent défenseur des Droits de l'Homme, avait refusé en 1972 une rétrospective au musée d’Art moderne de la Ville de Paris en la jouant à pile ou face...© Laurence Caron-Spokojny"D’une manière générale, par mes expériences, j’ai cherché à provoquer un comportement différent du spectateur (...) pour trouver avec le public les moyens de combattre la passivité, la dépendance ou le conditionnement idéologique, en développant les capacités de réflexion, de comparaison, d’analyse, de création, d’action."
Julio Le Parc -
Marc Chagall, Entre guerre et paix, Musée du Luxembourg
Il y a une exposition à ne pas manquer cette année.
Il y a un homme à connaître ou à redécouvrir.
Il y a une histoire d'amour entre un grand artiste et la vie, dont il faudrait s'inspirer.
Il y a un lieu à visiter, et vous avez jusqu'au mois de juillet 2013.
Il y a l'exposition des oeuvres de Marc Chagall, entre guerre et paix, au Musée du Luxembourg.Informations ICI
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Du 27 mars au 30 avril 2013, la galerie Sakura (Paris Bercy Village) présente l’exposition « After The Final Curtain ».
© Matt Lambros - “Proctor’s Palace Balcony”
Pour la première fois en France, près de 20 tirages de l’artiste Matt Lambros dévoileront la beauté cachée des cinémas américains en déshérence (cliquer sur la photo pour découvrir ces splendeurs).
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Le livre "Alan Vega, conversation avec un indien" sous toutes ses formes
En livre broché ou en numérique "Alan Vega, conversation avec un indien" inaugure la nouvelle collection FUSION des éditions LE TEXTE VIVANT.
Pour la première fois, un livre entièrement dédié à la carrière d'un artiste, le musicien et plasticien Alan Vega, voit le jour sous différentes formes. En version brochée avec des flashcodes qui permettent au lecteur d'avoir accès au contenu multimédia (photo, vidéo, son), et, en version numérique enrichi : un régal à feuilleter sur ipad grâce au format de l'epub3.
Ce rock-book intimiste est à commander dès maintenant sur LETEXTEVIVANT et sur toutes les librairies classiques en ligne.
Rendez-vous à noter : le 27 mars à partir de 18h, une signature de l'auteur, Alexandre Breton, en présence d'Alan Vega, est attendue à la librairie du jour agnès b. (44 rue Quincampoix Paris 4ème). Ainsi qu'une exposition de photos de Pierre René-Worms, la projection d'une rencontre avec Alan Vega à New York, et la présentation du livre sur tablette... -
Mishima n'était pas un héros : mon témoignage
de Laurence CARON
éditions Publibook « Coup de cœur » 2013Témoignage
Résumé :
À soixante-douze ans, tout lui semble difficile, insurmontable. Une nuit de septembre 2001, Michel Caron décide d'en finir.
Comment appréhender un tel geste ? Comment échapper à la culpabilité, au sentiment d'impuissance, au gouffre béant s'apprêtant à dévorer une famille entière ? Sa fille Laurence s'interroge sur son départ et sa personnalité complexe ; un chemin de vie, parsemé de points d'interrogation en suspens.Homme de théâtre et de cinéma, ténor à la voix d'or, Michel Caron a vécu son art de la scène de la Scala de Milan aux planches de Tokyo. Sur les traces de son père, Laurence Caron signe avec pudeur et sensibilité un témoignage qui nous touche tous, où hommage, enquête et deuil, s'entrelacent pour un dernier au-revoir.
Biographie de l’auteur :
Laurence Caron-Spokojny est née en 1970 à Paris dans une famille d’artistes.
Après des études de lettres, elle s’attache pendant plus de dix ans à promouvoir le spectacle vivant dans de grands théâtres parisiens puis dans l’audiovisuel. Un évènement tragique bouleverse sa vie en 2001. Sa carrière professionnelle mise entre parenthèses, elle se consacre à sa famille et poursuit des études à l’École des Beaux-Arts. Dix ans plus tard, Laurence Caron s’exprime entre peinture et écriture; elle vous livre ici, dans Mishima n’était pas un héros, ce qui, un jour, a arrêté le cours du temps.16,00 € 150 pages ISBN : 9782342000269
L'ouvrage est disponible sur Amazon
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« Mozart composait-il en aryen ? » extrait d’une lettre de Richard Strauss adressée à Stefan Zweig lors de son exil à Londres.
L’illustre compositeur allemand, Richard Strauss, sollicite les talents de librettiste du très sensible, écrivain autrichien d’origine juive, Stefan Zweig. Cette « Collaboration » est le fruit d’une admiration mutuelle partagée par les deux artistes, puis ces échanges artistiques se transforment en amitié. Emmené tout entier par son art, voué corps et âme à son expression artistique, Richard Strauss impose le nom de Stefan Zweig sur les affiches de l’opéra qu’ils créent ensemble « la Femme silencieuse », cette œuvre ne se jouera que trois fois à Dresde… Adolphe Hitler a pris le pouvoir, en 1935 Stéphan Zweig quittera l’Autriche pour Londres, un long et interminable exil suivra jusqu’au Brésil.
Ronald Harwood, l’auteur, livre ici une remarquable leçon d’humanité. Une humanité qui n’est jamais tout à fait blanche, ni tout à fait noire, une humanité aux teintes grises pleine de nuances. Il soulève un questionnement philosophique essentiel sur l’Art, son terrain d’action et l’étendue de ses limites, et aussi sur la « fonction » même d’un artiste, le rôle qu’il tient au sein de la société, sa représentation, et sa foi en l'art.
La seconde guerre mondiale et son épouvantable déchaînement d’antisémitisme est certainement l’époque qui a reflétée ce qu’il y a de pire au cours de notre histoire proche. Et cette période, Ronald Harwood sait la décrire avec subtilité. La précision des dialogues est révèlée par un trait commun à la musique et à l’écrit : le ryhtme ! Et, « Collaboration » est servie par une mise en scène de Georges Werler tout aussi délicate placée dans l’écrin des décors très raffinés d’Agostino Pace.
Les comédiens (tous!) se glissent dans leurs personnages avec une habileté sans égal. Michel Aumont est totalement habité par Richard Strauss, et il en est de même pour Didier Sandre dans le rôle de Stefan Zweig ; la renommée et la grandeur de ces deux Monstres du théâtre sont aussitôt oubliées dès leurs premiers pas sur la scène du Théâtre de la Madeleine pour laisser vie à Stefan Zweig et Richard Strauss. Et puis, il y a la grâce, celle de Pauline Strauss, ou plutôt celle de Christiane Cohendy, un hommage tout entier rendu à toutes les femmes ; avec humour et raison, Christiane Cohendy canalise les affres de l’artiste, argumente pertinemment le propos, réserve de délicieuses sorties, un régal.
À n’en pas douter, Zweig et Strauss sont bien présents à chacune des représentations, attentifs, par-delà le paradis des artistes, ils doivent être ravis de voir ainsi leur « Collaboration » continuer d’une aussi belle façon sur les planches du Théâtre de La Madeleine. Quand de grands artistes s’emparent ainsi avec autant d’élégance de l’histoire d’autres grands artistes, une nouvelle histoire naît, intemporelle, elle gagne l’immortalité, une œuvre toute neuve s’inscrit. Bravo.
Laurence Caron-Spokojny
Photo : Bernard Richebé
Renseignement ici.
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La nouvelle foire internationale d’art contemporain Espace Cardin - Paris 8ème - 11 au 13 janvier 2013
La NEW Art Fair est la nouvelle foire internationale d’art contemporain qui propose de commencer l’année avec un regard neuf sur l’art d’aujourd’hui.Tout est nouveau : son concept pensé pour les acheteurs, sa programmation internationale (25 galeries) et ses services innovants.
Toutes les informations sur cette manifestation sont ici.
A Noter pour ce week-end : Des ateliers artistiques pour les 4-12 ans seront animés par le Musée en Herbe à l’intérieur de la foire le samedi 12 janvier et le dimanche 13 janvier 2013 à 14h30 et 17h30.
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"Bêtes de sexe, la séduction dans le monde animal" : une expo à se poiler de rire en famille.
La fameuse, incontournable et somptueuse, expo Edward Hopper au Grand Palais restera rêvée. Après avoir fait la queue pendant 1h30, un dimanche matin, pour finalement renoncer car il y avait encore 1h00 d'attente - nous nous sommes rendus à quelques enjambées de là au Palais de La Découverte.
Le Palais de La Découverte est tout de même sinistre. Ce temple scientifique a vraiment besoin d'un coup de jeune, ne serait-ce qu'un bon coup de peinture, pourtant cet espace est toujours aussi intelligemment bien distribué pour enfants curieux et parents attentifs. Les innombrables expos, et leurs machines inventives sur lesquels les enfants de tous âges défoulent leur soif de savoir, sont évidemment à parcourir, si vous ne les connaissez pas déjà.
L'exposition du moment "Bêtes de sexe, la séduction dans le monde animal" est à voir absolument, elle est à la fois drôle et imaginative. La richesse documentaire, en références et en expériences, a les attraits pour passionner adultes et enfants.
Le must, sans contexte, est la diffusion de ces pastilles admirables "Green Porno" inventées par Isabella Rossellini qui dépasse son rôle de comédienne pour devenir plasticienne et nous initier aux pratiques sexuelles des animaux et insectes. L'univers burlesque et déjanté d'Isabella Rossellini dans "Green Porno" (produit en 2008) est remarquablement intelligent, le rythme de ces petites fenêtres psychédéliques enrichi considérablement l'exposition qui sans cela resterait définitivement attristée par l'ambiance pesante du lieu.Laurence Caron-Spokojny
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Histoire de voir, show and Tell, à La Fondation Cartier
Il faut se précipiter à la Fondation Cartier pour admirer l’exposition « Histoire de voir, show and Tell » avant le 21 octobre. Les artistes exposés proposent un étonnant voyage des contrées australes aux rives de l’Amazone, des plages caribéennes aux quartiers de Tokyo, le monde entier s’exprime.
Le langage est vif, spontané, authentique. L’art redevient compréhensible (au cas où vous auriez perdu le fil, ce qui arrive lorsqu’il s’agit d’art contemporain), brut ou sophistiqué, il raconte une histoire, souvent des souffrances, des guerres ou bien des catastrophes naturelles, mais aussi des mariages, des naissances et des joies.
Ces artistes dont on dit «qu’ils n’ont pas suivi de cursus artistiques classiques» touchent juste, le symbolisme des couleurs, les matériaux utilisés, la vélocité du tracé, il y a quelque chose qui relève de la musique (world music évidemment) dans ces expressions picturales et sculpturales.Juste avant d’arpenter les allées de la FIAC, je vous recommande vivement ce voyage à la rencontre des origines. Ces œuvres, dites « naïves », qui démontrent que l’art tout entier est uniquement l’expression de l’âme humaine, vous invitent à comprendre qu’il s’agit ici de réenchanter notre vision du monde, en toute simplicité... La fondation Cartier y est parvenue.
Laurence Caron-Spokojny
Première visite ici : Fondation Cartier
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Stéphane Hillel, héros d’une vie pas si ordinaire
Jacques Nerson s’est échappé un temps des lignes du Nouvel Obs et du cocon douillet du «Masque et la plume», pour transposer sur scène le récit de Christian Giudecelli : «Tour de Piste» (Gallimard). Puis, le comédien Stéphane Hillel s’est glissé dans la peau de Chris, et dans celle de chacun des personnages qui peuplent la vie de ce "héros malgré lui".
Directeur du Théâtre de Paris et metteur en scène récompensé, Stéphane Hillel épouse les contours du texte de Christian Giudecelli avec une grande pudeur. Naïf, désenchanté, sombre ou au contraire tendre, passionné et heureux, Chris déroule sa vie. Et c’est alors que le miracle se produit. Cette vie à une raisonnance particulière, elle nous parle de nous, de vous, dans ses aspérités les plus infimes avec les mots les plus simples. De la naissance à la mort, le questionnement rythme l’existence et laisse apparaître toute la complexité de l’humanité. L’influence des événements, les paysages traversés, les rencontres provoquées ou manquées, enfin les sentiments vécus, non-dits ou bâclés, tout ce qui compose la vie d’un être de façon consciente ou inconsciente.
On s’émeut et on rit beaucoup, la performance du comédien plonge l'auditoire dans un voyage introspectif que le spectateur était bien loin d’imaginer. Stéphane Hillel vous emmène, vous le suivez toujours, mais, selon votre humeur, selon votre état, le chemin emprunté est plus ou moins escarpé, la route est longue mais la vie est belle...La magie du théâtre, l’adresse du comédien et la finesse du texte, font que chaque soir est différent, alors peut-être faut-il y retourner plusieurs fois pour renouveler l’expérience. Cela est certain, ce spectacle, né en Avignon pour se poursuivre au Théâtre des Déchargeurs, ne s’arrêtera pas là : "Tour de Piste" aura une vie remarquée.
Laurence Caron-Spokojny
A lire aussi : Stéphane Hillel, metteur en scène "Le Monde merveilleux de Sunderland"
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Fabrice Hyber au Palais de Tokyo
« Ce n’est pas facile d’avoir de l’humour quand on est un artiste. Un artiste doit être très ennuyeux. Avoir un peu d’humour, ne pas se prendre au sérieux, ou pouvoir simplement en rigoler, ce n’est pas perçu comme quelque chose de tout à fait correcte pour un artiste. Je pense qu’au contraire, c’est être sérieux qui est vulgaire ». Fabrice Hyber.
(Matières Premières)Tout est dit.
Comme j’aime ce texte de Fabrice Hyber qui inaugure le magazine du Palais de Tokyo (automne 2012) pour l’exposition « Les dérives de l’imaginaire ». Voici un artiste dont l’œuvre est touchante, définitivement tendre et poétique. Ici, le cycle de la vie, plus précisément celui de la nature, est symbolisé par un nuage vaporeux (véhicule extraordinaire et stellaire) rattaché à la Terre, par des filaments de pluie argentés… c’est une définition, la mienne, après tout symbolisez comme il vous plaira ce que vous voyez. Tout ceci est très beau et c’est très agréable à distinguer au milieu de ces multitudes de propositions contemporaines aux arguments souvent obscures. Non, à nouveau il ne s’agit pas ici de mettre à rude épreuve l’esprit pour en arracher des suppositions tortueuses ; l’univers de Fabrice Hyber montre ce qu’il y a derrière le rideau, l’œuvre (ou la vie) en plein épanouissement, tout en laissant le rêve conserver son rôle et sa vision fantasque nous engloutir.Une toile monochrome rouge est un condensé de rouge à lèvre, comme les boîtes de soupes de tomates d’Andy Warhol, on peut y révéler une forme de dénonciation, une ironie, pourtant cet artiste-là n’est pas si sombre, il est plutôt joyeux, un genre de poète de l’abstraction qui nous donne à voir (sans nous imposer de réflexion, chacun a le droit d’en faire ce qu’il veut) une définition de l’art, une vision, la vie.
Trêve de verbiage. Allez faire un tour le pas léger, les mains dans les poches, le sourire aux lèvres et en sifflotant, au Palais de Tokyo, allez vous perdre dans ces toiles accumulées et accrochées comme du linge au soleil.
Partez à la rencontre de Fabrice Hyber.Laurence Caron-Spokojny
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"VOLPONE ou le Renard" de Ben JONSON au Théâtre de la Madeleine
Ben Jonson et William Shakespeare étaient amis, et rivaux, ils ont en commun une modernité qui, sur le modèle de la tragédie grecque, rend le texte accessible et compréhensible par tous.
De remarquables comédiens, très bien distribués, s’appliquent sur la scène du Théâtre de la Madeleine à divertir un public tout de suite conquis dès les premières répliques. Roland Bertin est Volpone, sans concession aucune, ce grand comédien se jette corps et âme dans les méandres de ce personnage odieux et sans scrupule. Et comme la sauce prend, emporté par le texte, Roland Bertin en rajoute, des tonnes et des tonnes, sans filet… et c’est parfait. Nicolas Briançon, quant à lui, est un habile et formidable Mosca, subtil et gracieux il délie la trame de la farce sur laquelle une troupe de comédiens épatants s’exercent et remportent la démonstration avec brio. La mise en scène de Nicolas Briançon, très classique, est juste et laisse parfois entrevoir les meilleures pages du théâtre de boulevard. Les textes sont bien dits, les déplacements sont fluides, la musique est bien choisie, le tableau est réussi. Il s’agit de théâtre, les traditions très anciennes de cet art sont ressuscitées ou revues, quelques danseurs illustrent le propos, le décor, aussi sombre que les personnages, se modifie au gré de l’histoire, et, les postiches des comédiens renouent avec la tradition de la commedia del arte.
Volpone est sans aucun doute une des pièces programmées, par les théâtres privés parisiens, à ne surtout pas manquer.Laurence Caron-Spokojny
Une pièce de Ben Jonson - Mise en scène par Nicolas Briançon
Adaptation Nicolas Briançon et Pierre-Alain Leleu.
Avec Roland Bertin, Nicolas Briançon, Anne Charrier, Philippe Laudenbach,Grégoire Bonnet, Pascal Elso, Barbara Probst, Matthias Van Khache et Yves Gasc. Décors Pierre-Yves Leprince. Lumières Gaëlle de Malglaive. Costumes Michel Dussarat. RESERVATION ICI. -
Une virée à Buenos Aires avec Alfredo Arias
Woody Allen, Copi, le Mîme Marceau, Frederico Fellini, Charlie Chaplin,… et puis, il y a Alfredo Arias. Le plus parisien de tous les argentins signe là, avec ces deux spectacles « Buenos Arias » au Théâtre du Petit Montparnasse, une page d’élégance et d’humour, très personnelle.
Pour le premier spectacle, le music-hall étend son large répertoire, à la fois burlesque et charmant, grâce aux puissantes chanteuses, danseuses et actrices : Alejandra Radano et Sandra Guida. Les spectateurs fondent, les timbres jazzy et parfois rock, viennent se frotter langoureusement aux accents tragiques du tango. Pour le second, Antonio Interlandi et Alfredo Arias rejoignent ces deux grandes artistes, pour un conte fantastique endiablé qui retrace en partie l’histoire du cinéma argentin.
L’œil vif d’Alfredo Arias sur l’Argentine est plein d’ironie, lucide mais toujours tendre. Son univers résolument kitsch, les axes chorégraphiques choisis et les costumes de Pablo Ramirez font penser, sous une apparente simplicité, aux photos hautement sophistiquées de Pierre et Gilles.
Cet homme-là peut tout dire, il éveille la curiosité, aiguise la critique et nourrit les sens ; sans en avoir l’air, avec délicatesse, le message est délivré. En fait, Alfredo Arias a le don du bonheur ; il écrit avec un autre vocabulaire, par exemple celui pour lequel le mot « nostalgie » prendrait un sens résolument positif.En quittant la salle, les vibratos chaleureux raisonnent encore, l’envie d’entraîner un tango fourmille dans les jambes, les répliques efficaces des acteurs affûtent l’esprit, un billet d’avion pour Buenos Aires serait une bonne idée... Alfredo Arias est définitivement un artiste envoûtant.
Laurence Caron-Spokojny
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La série Homeland sur Canal+, quand la fiction flirte de trop près avec la réalité
La 64e cérémonie des Emmy Awards vient de récompenser la série Homeland mais aussi ses deux acteurs principaux, Claire Danes et Damian Lewis, pour les prix du meilleur acteur et de la meilleure actrice.
La série dramatique inspirée par le traumatisme post 11 septembre évite les travers, souvent très prononcés dans ce type de série, d'une sauce américaine un peu trop forte: les méchants (les terroristes) ne s'avèrent pas si méchants et les gentils (les américains) semblent parfois manquer de scrupules.
Sur un rythme enlevé, l'esprit est alerté, les acteurs charment et malgré quelques manques de partis pris de mise en scène, la fiction se noue à une réalité que nous souhaiterions éloigner.
Surtout ne zappez pas entre le journal télévisé et un épisode de Homeland, vous risqueriez de vous y perdre. Terrifiant.Laurence Caron-Spokojny
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Après leur triomphe en Avignon, Sacco et Vanzetti seront dès le 13 octobre au Théâtre du Petit Hébertot
« La liberté n’est pas la récompense de la révolte. La liberté c’est la révolte.» Sacco et Vanzetti, d'Alain Guyard.
23 août 1927, prison de Cherry Hill. Nicola Sacco est seul dans sa cellule pendant qu’on prépare la chaise électrique à son intention. Mais est-il vraiment seul ? Car voilà Bartolomeo Vanzetti, pourtant isolé dans une autre cellule. Nicola rêve-t-il ? Ou ne sont-ils tous deux que des fantômes, déjà exécutés ? Qu’importe, leur mémoire fait office d’unité de temps, de lieu et d’action. Tous deux se racontent, revivent leurs joies et leurs espérances, revivent l’histoire d’un procès truqué.
Sacco et Vanzetti est une pièce écrite par Alain Guyard, mise en scène par François BOURCIER et interprêtée par Jacques Dau et Jean-Marc Catella.
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C'est la rentrée !
Ceci n'est pas une nouveauté, la période se répète chaque année. Depuis le temps nous devrions être rodés, de plus cette accélération grossière du temps prend toute sa démesure avec la rentrée scolaire, si vous voyez de quoi je parle... L'humeur est électrique.
Pendant ce temps les Colonnes Morris se bardent d'affiches de spectacles, le périphérique est cerné de bâches publicitaires, les billeteries ronronnent, les expos s'accrochent à tous vents, ... les boîtes mails explosent. Pour éclaircir ce ciel culturel bien chargé, j'ai noté : La Biennale de la Création des Arts Décoratifs, Le Dessein du Geste à l’Hôtel de Ville de Paris, l'expo "Artist toy makers" à Lons-Le-Saunier et la fête des Puces de Saint-Ouen...
J'enquête afin de vous livrer ici mes premières impressions.
A noter tout de suite :
Le festival Rue-Stick Puteaux revient les 15 et 16 septembre 2012. Le public pourra découvrir toutes les formes d’expression artistique du street-art. Ce sont près de 60 artistes qui investiront les rues de Puteaux pour y créer de nombreuses œuvres collectives. Tout un panel de disciplines représentées : graffiti, Cellograff, collage, pochoirs, light painting ainsi que des projections de documentaires, une exposition de peinture et des ateliers de customisation. (entrée libre). -
Daniel BUREN, MONUMENTA 2012
Pas d'atelier, pas d'attache, rien de matériel en somme… Daniel Buren est un artiste libre. Il crée sur place, une forme de street-art. Je me demande si cette liberté, si visible dans son travail, s'est affirmée avec le temps grâce à l'expérience, ou bien s'il a toujours été ainsi ...
À sa décharge, la grande nef du Grand Palais est certainement un des lieux les plus inspirants qui soit. Cependant, les dimensions du lieu et son écho quasi-mystique peuvent aussi paralyser un probable élan créatif. Le pas ne doit pas être hésitant : il faut quand même le faire, et même être sacrément gonflé ! Ego surdimensionné de l'artiste ? Mégalomanie ? Folie des grandeurs ? On s'en moque. C'est BEAU à vous couper le souffle. Une démonstration évidente que je ne m'aventurais pas à vous décrire ici bas, ce serait dommage, il faut y aller.
Le succès de l’artiste et la renommée du lieu obligent à se lever tôt, les portes ouvrent à 10h, présentez-vous à 9 h 30, lâchez très généreusement 5 euros (gratuit pour les enfants), patientez et entrez !
Timidement d’abord, puis épaté, réjouie, enfin heureux, rien de plus à en dire, c’est une explosion de couleurs, une vague lumineuse qui inonde toute l’atmosphère, en quelque sorte : une définition picturale du bonheur.Laurence Caron-Spokojny
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Sara Giraudeau, au Théâtre Montparnasse, a "la France sur le dos"
La mémoire encore très marquée par la Jeanne d'Arc de Luc Besson et la très attachante interprétation de Milla Jojovich au cinéma, je me suis installée dans le (confortable) fauteuil du Théâtre Montparnasse, impatiente de découvrir Sara Giraudeau sur scène, et heureuse de me régaler à nouveau de l'impertinence de Jean Anouilh.
Sara Giraudeau, et cette fois-ci je ne parlerai que du premier rôle même si ses compagnons de jeux sont remarquables, est d’une grâce ! Il y a quelque chose d’un peu sauvage chez cette jeune comédienne, un talent pas encore bien mesuré qui dépasse de partout (et c'est tant mieux), un peu à la manière de son allure un peu dégingandée et à la fois si élégante. Ses intentions sont brutales ou douces, elle lâche tout. Elle attire tant la compassion du spectateur, qu’il est difficile de rester scotché dans le noir de la salle tant l’envie nous prend d’aller la sauver des griffes de l’histoire. Cette jeune Jeanne d’Arc, si sincère et si naïve, affronte l’obscurantisme avec une détermination solaire.
L’argument et les dialogues de Jean Anouilh vibrent d’une éternelle modernité, Sara Giraudeau s’en empare très simplement, avec une volonté aussi pure que son personnage. À la fois clown ou séductrice, la comédienne campe un personnage historique, sans peine et sans prétention.
Probablement que les voix entendues par Jeanne ont fini par s’adresser à Sara, pour que Mademoiselle Sara Giraudeau soit aussi juste.Laurence Caron-Spokojny
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Helmut Newtown au Grand Palais
Aux commandes la photographe Alice Springs ou plutôt Madame June Newtown qui, pour cette rétrospective au Grand Palais, est commissaire de l'exposition.
Les salles qui accueillent l'exposition semblent étroites comparées aux oeuvres colorées ou noir et blanc du maître absolu de la photo de mode. Cette mode est un prétexte, un support, Helmut Newtown s'attache ici à dévoiler son art.
Des tas de photos presque toutes reconnaissables, des polaroïds éparpillés dans lesquels on aimerait pouvoir fouiller, des icônes de la mode, des stars toujours en vogue, des mises en scène insensées, des poses sophistiquées, des courbes voluptueuses et des lignes parfaites… Le beau, plutôt la beauté de la femme, est dans son oeuvre le plus connu et reconnu. La femme s'est déjà libérée, là elle s'incarne, elle s'expose nue, puissante, chic et souveraine. Les formats verticaux des tirages s’élancent, le regard placé très haut des mannequins et leur assurance de prédatrice, que l'on attribuait autrefois aux hommes, mais ça c'était avant l'ère Newtown, laissent cette impression étrange d'être spectateur d'une oeuvre monumentale sans trop savoir comment l'expliquer.
Avec une précision d’horloger et une volonté farouche d’extraire l’essence même des choses, Helmut Newtown a figé une époque, ses révolutions, ses victoires et ses excès. Une vision juste, sans compromis, qui, comme le smoking d’Yves Saint-Laurent, est à jamais indémodable.Laurence Caron-Spokojny
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« La liberté n’est pas la récompense de la révolte. La liberté c’est la révolte. »
Immigrés aux Etats-Unis, Nicola Sacco et Bartolomeo Vanzetti sont deux anarchistes italiens. Ils seront exécutés en 1927 sur la chaise électrique pour des crimes qu'ils n'ont pas commis. L'absurdité de cet épisode judiciaire, et le scandale qu'il suscite, inspirera le réalisateur italien Giuliano Montaldo pour le film "Sacco & Vanzetti". Puis, ce sera au tour d'Alain Guyard. Remarquablement interprétée par Jacques Dau et Jean-Marc Catella, la pièce d'Alain Guyard «Sacco & Vanzetti», se résume à un sacré exercice de style qui se révéle passionnant. Depuis 2009, "Sacco & Vanzetti" enchaîne les dates dans toute la France, la pièce devrait se produire à Paris, l'impatience est grande...
Laurence Caron-Spokojny
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Suresnes Cité Danse : Happy Hip Hop party !
Quand une salle de spectacle porte le nom de Jean Vilar, il faut s’attendre à découvrir un lieu qui témoigne de l’idée de rendre toutes formes de performances, créations ou diffusions artistiques, accessibles au plus grand nombre. Avec «Suresnes Cité Danse» qui célèbre ici ses vingts ans de bons et loyaux services, Olivier Meyer, instigateur de l’évènement et maître des lieux, a relevé et tenu le pari.
La soirée anniversaire du jeudi 12 janvier 2012 présentait un florilège de ce qui se fait de mieux en matière de Hip-Hop. Avouons le, le terrain était neutre, réceptif, sain et à l'affût de la moindre découverte : en matière de Hip-Hop je ne connaissais rien... Ce temps imparfait est justement utilisé, je ne connaissais rien mais aujourd'hui je sais, je sais qu’il existe un univers autre, un affluent tortueux trace ses lignes près du large fleuve de la création chorégraphique contemporaine. Ces dernières années, par petites touches, j'ai approché les programmations de Suresnes et de la MC 93 de Bobigny, des rencontres étonnantes comme celle de Découflé, je savais que loin des ballets contemporains ou classiques du très renommé Opéra de Paris, et des créations des centres chorégraphiques des somptueux Mats Ek, Pejlocaj ou Pina Baush, et encore plus loin de la descente aux enfers des comédies musicales du Palais des Sports où des chorégraphes pitoyables célébrés par les biens vulgaires chaînes de télévisions en particulier une, je savais que, quelque part, il y avait autre chose...
Lydie Alberto, Céline Lefèvre, B-Boy Junior, Farid Berki, Amala Dianor, Doug Elkins, Fish, Mehdi Ouachek et Storm sont apparus pour délier sur scène une déferlante de mouvements, de performances physiques et des tas d’histoires à raconter, soutenus par les chorégraphies de Kader Attou, Sylvain Groud, Sébastien Lefrançois, Mourad Merzouki et José Montalvo.
La deuxième partie, plus attendue mais pas du tout convenue, orchestrée par le formidable inventeur de grâce José Montalvo, accueille les 30 chanteurs du jeune Choeur de Paris et les danseurs Lara Carvalho, Farrah Elmaskini, Julia Flot, Alfréda Nabo, Abdoulaye Barry, Simhamed Benhalima, Kevin Mischel, Nabil Ouelhadj : un mélange des genres fluide tenu par une exigence artistique égale.
Farid Berki, Monica Casadei, Blanca Li, Jérémie Bélingard, Sylvain Groud, Abou Lagraa, Laura Scozzi, Pierre Rigal, Robyn Orlin et Angelin Preljocaj sont invités pour la suite de ces découvertes. Je vous invite à découvrir la programmation dans son intégralité sur le site du Théâtre de Suresnes.
Ici, la rue raisonne et s'épanouie sur les murs comme dans un tableau de Jean-Michel Basquiat. La danse s'esquisse comme un coup de pinceau et la vidéo vient comme un collage donner une épaisseur indispensable à la sénographie. Une forme d’art urbain «authentique», même si je n’aime pas utiliser ce qualificatif d’ «authentique», cela peut sous entendre que l’art peut ne pas l’être : ce qui paraît absurde. Alors tout simplement il s’agit d’art, à sa place, tout à son aise, avec une très haute qualité technique et artistique, et, en tout point avec le pouvoir de divertir.
Laurence Caron-Spokojny
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La Cenerentola à Garnier
Hier soir, c'était la fête à Garnier.
Les couleurs infinies des mezzo-sopranos virevoltaient tandis que les élégants barytons et basses rivalisaient avec le ténor. Tout était parfait.
Gioacchini Rossini semait des notes légères et ravissantes, le bel canto remplissait l'air, bouffait l'oxygène, pour nous soûler de bonheur, dans une béatitude oubliée car trop rarement ressentie.
Enfin un véritable Opéra-Bouffe avec des chanteurs, sachant chanter et jouer la comédie, et admirablement bien chorégraphiés dans les pas de la mise en scène musicale de feu Jean- Pierre Ponelle (qui signe aussi les costumes et décors).
Karine Deshayes est une très romantique et très bouleversante Cendrillon entourée de (l'excellent) Dandini de Riccardo Novaro, l'Alidoro d'Alex Esposito, le Don Magnifico (vraiment magnifico) de Carlos Chausson et les deux soeurs de Cendrillon Jeannette Fischer et Anna Wall, sous la baguette délicate de Bruno Campanella. La prestation très raffinée, autant en voix qu'en jeux, du Choeur de l'Opéra de Paris est savoureuse.Un travail savant concentré sur l'oeuvre musicale, et vraisemblablement sur la véritable intention du compositeur, un respect total et inspiré, livre ici une oeuvre somptueuse de l'opéra, le vrai, le grand, celui qui devrait être connu et accessible à tous.
© LCSLa Cenerentola sera diffusée sur France Musique
en direct le samedi 17 décembre 2011 à 19h30/réalisation de la mise en scène : Grischa Asagaroff,
lumières : Michael Bauer. -
Duel, le 11 décembre à 15h, Salle Gaveau
Voici des musiciens classiques qui usent très savamment du burlesque pour se faire voir et se faire entendre.
La définition pourrait s'arrêter là, seulement Duel offre une lecture beaucoup plus sophistiquée. D'abord, il est question de maîtrise, celle de l'instrument, celle d'un art, celle d'une traduction de la musique. Pour ce faire, il est question de travail, un travail long, ancien, envahissant.Une fois la technique maîtrisée, l'interprétation dépasse tout, encore et toujours le musicien se replie sur son instrument pour tenter d'en sortir un langage commun. Une harmonie entre un objet de bois précieux et un Homme, quelle idée extravagante, l'art est véritablement une drôle d'invention humaine !Puis les années passent, l'homme grandit, vieillit un peu, l'instrument devient de plus en plus précis mais reste toujours aussi exigeant. Alors, la musique dévoile sa véritable personnalité, libre, elle se fait Art. Cet Art a besoin de public, il se façonne, tente de séduire et c'est enfin la rencontre : parfaite. C'est le cas pour Laurent Cirade, le violoncelliste, et, Paul Staïcu, le pianiste.
Voici autre chose. Une idée artistique. Un hommage au travail, le dur, le pas marrant. Le travail usé, seul, sur un tabouret d'instrumentiste, fondu sur son instrument avec pour seule compagne une pile de partitions annotées. Les artistes, propulsés par leur art, sont extirpés de leur solitude, ils s'expriment alors, tout à fait maîtres.
Le spectacle fait rire son public, tous les publics, c'est certain, les ingrédients sont tous là très justement dosés. De la performance et de la délicatesse, un grand raffinement en somme, une transmission impeccable, et surtout, du divertissement, celui qui anime et qui éveille notre plus grande joie et qui procure un bien être épatant.Ainsi, Laurent Cirade et Paul Staïcu nous livrent des années de travail et d'émotions dans un déferlement d'inventions, inédites et très très inspirées.
Reservez vos places sans attendre.Laurence Caron-Spokojny