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Rechercher : qui a peur de

  • Toute l’histoire de la peinture en moins de deux heures au Théâtre de l’Atelier

    hector obalk,theatre de l'atelierUne écharpe pendouille autour de son coup, d'un même geste il s'en débarrasse avec son pardessus aux contours indéfinissables, juste quelques secondes après être entré sur la scène du Théâtre de l’Atelier. A la manière d’un professeur de faculté qui se campe face à ses étudiants, il lance quelque traits d’humour pour apprivoiser son auditoire. Il faut en effet un peu de temps pour s’habituer à sa voix et à son rythme : Hector Obalk marmonne, râle un peu et glousse souvent. L’Historien d’Art a l’humeur espiègle et se paye une bonne partie de cabotinage. Il peut se le permettre, la peinture c'est son domaine. Critique d’art et réalisateur du documentaire Grand Art sur Arte, Hector Obalk est aussi Commissaire d’exposition. Comme le titre de son spectacle-conférence l’indique, en moins de deux heures, il a fait le pari de déballer toute l’histoire de la peinture.

    hector obalk,theatre de l'atelierAccompagné par un duo violoncelle et violon, qui glisse ça-et-là quelques très courtes phrases musicales, Hector Obalk décortique un mur d’images composé de 8000 tableaux. Hector Obalk commence son récit au 14èmesiècle, le peintre Giotto ouvre le ban, pour lui le poète Dante inventa le mot « artiste ». De la perfection des peintres de la Renaissance jusqu’au Maniérisme, mouvement sur lequel Hector Obalk s'attarde, le choix des œuvres présentées est totalement subjectif et s’étire jusqu’au 20ème siècle qui fait figure de période butoir. Au passage Vincent Van Gogh est bien égratigné, au milieu des rires d’un public passionné, on sent pourtant quelques mouvements de têtes gênées, peut-être même agacés. La critique est audacieuse. Puis, cubistes, surréalistes jusqu’à l’art abstrait où Yves Klein et comparses en prennent pour leur grade. L’art moderne est effleuré et l’art contemporain n'a pas le droit de citer, on sait que l’ignorance est le meilleur des mépris. C’est une attitude voulue par Hector Obalk et une occasion pour lui de se taper une tranche de rigolade. Cynique, l’orateur n’est pas politiquement correct. Il revendique son point de vue, exercé, et solidement argumenté… un rien réac. Feignant l'humilité, Obalk précise que chacun a la possibilité de se faire sa propre idée - sauf - quand il évoque ses craintes sur la technicité de la peinture qui pourrait-être en perdition, à force d’abstraction, à force de dépouillement…

    hector obalk,theatre de l'atelierAujourd’hui, qui saurait armer ses pinceaux aussi bien que le puissant Caravage pour s’attaquer à un clair-obscur ? Qui ferait ressentir le vertige infini du rebord texturé de ce bol représenté par Chardin ? Des questions se posent - ou pas - le public aime bien être bousculé. Classique ou contestataire, tant que l’Art fait parler de lui ! A la suite, certains auront l’envie de poursuivre par des documentaires proposés par Hector Obalk, d’autres préféreront continuer à parcourir les musées et les galeries faisant fi de ce monsieur-je-sais-tout. Peu importe, le pari est gagné.

    Laurence Caron

    L’Amour Victorieux- Caravage (1571-1610)

    Pommes, timbale d'argent et bol - Jean-Baptiste-Siméon Chardin (1699-1779)

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  • Il y a des sorcières à la Poste...

    Du 23 novembre 2011 au 31 mars 2012, à l'Adresse Musée de la Poste se tient une étrange exposition consacrée aux sorcières et aux mythes. 

    Socières Mythes et réalités

    Remarquablement bien illustrée, cette exposition retrace l'histoire de la sorcellerie à travers des anecdotes historiques, et, des traces ou reliques symptômatiques d'une époque obscure qui semble parfois s'étirer jusqu'à nos jours....

    Plus qu'une exposition, il s'agit  d'une lecture de l'histoire et des conclusions que l'on peut en tirer. 

    Incontestablement, le procès de la sorcellerie, fait généralement aux femmes, est le symbolisme d'une misogynie efficace.

    Quant aux Belzébuth, Asmodée, Astaroth et cie, ils dépassent l'orchestration initiée par la religion, cette matière protéiforme serait aujourd'hui le territoire préféré de l'ensemble de nos psychiatres. 

    Des  amulettes, de la vidéo, des peintures, des costumes, des grigris, des affiches de cinéma, des croix salvatrices, des poupées estropiées, des diables grimaçants sont mis en scène : voici des preuves irréfutables ! Il y a de quoi faire peur, il y a de quoi amuser. Mais ce qui est certain, c'est l'intérêt manifeste de cette exposition qui parvient à nous interpeller sur un "je ne sais quoi de déjà vu...", nous, visiblement toutes un peu sorcières...

    Laurence Caron-Spokojny

    A noter :  l'album de l'exposition est une véritable bible, il fait revivre l'ensemble des découvertes de cette exposition, il est en vente à la boutique (24 euros).


     

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  • L'incroyable Art du LEGO de Nathan Sawaya, jusqu'au 30 août au Parc des Expositions de la Porte de Versailles

    L’idée d’aller voir une exposition sur les légos n’était pas de moi. Au départ, ce fut plutôt une demande insistante de mon petit garçon de dix ans à laquelle j’ai répondu instamment, une sorte de devoir de mère modèle…

    L’espace sombre du Parc des expositions de la Porte de Versaillesthe art of lego est toujours aussi peu accueillant, aussi les premières sculptures qui s’avancent dans les allées semblent presque vivantes. Résolument pop, le travail de Nathan Sawaya  ne se résume pas seulement à l’éloge de la marque Lego et de ses constructions aux couleurs flash. La petite brique colorée, à l’ajustement simple, est un matériau efficace et moderne pour arriver à la réalisation d’un Art de la sculpture à part entière dont ses aînés wharoliens apprécieraient les compositions chromatiques.

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  • L'Orchestre de chambre de Paris célèbre les 50 ans de carrière du violoncelliste Philippe Muller, le 2 avril au Théâtre

    Gautier Capuçon, Marc Coppey, Henri Demarquette, Anne Gastinel, François Salque, Sung-Won Yang et toute la jeune génération du violoncelle français se réunissent autour de leur professeur Philippe Muller pour lui rendre hommage à l’occasion de ses 50 ans de carrière, le 2 avril au Théâtre des Champs-Elysées.

    De la musique de chambre à l’orchestre de chambre, un programme-festival illustrant toutes les formes de musique autour du violoncelle.

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  • Steven Isserlis invité par l’Orchestre de Chambre de Paris, sous la direction de Douglas Boyd - c’était le 10 janvier au

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    Les pièces composées pour le violoncelle sont aussi peu nombreuses que les concerts qui lui sont dédiés, heureusement l’Orchestre de Chambre de Paris ne manque pas d’idées et ses choix sont aussi riches qu’éclectiques.

    steven hisserais,orchestre de chambre de paris,douglas boydCe soir là, Douglas Boyd attaque avec le compositeur français Henri Dutilleux, le lyrisme et la précision de l’œuvre contemporaine régale les initiés et ouvre des horizons infinis aux profanes.
    Le très poétique Tombeau de Couperin de Ravel poursuit l’intention forte de L’Orchestre de Chambre de Paris, en particulier pour la mise en lumière de la musique française, et, enfin, la puissante Symphonie n°83 en sol mineur « La Poule » de Joseph Haydn révèle le Maestro Douglas Boyd au top de sa forme !

    "La musique donne une âme à nos cœurs et des ailes à la pensée.” Platon

    Au milieu de cette soirée très intelligemment dessinée, un cadeau. La venue de Steven Isserlis, le très majestueux et très expressif violoncelliste britannique, dans une interprétation du Concerto pour violoncelle et orchestre n°1 de Camille Saint-Saëns. L’instant est d’un romantisme inouï, la mélancolie brûle les veines et fait frissonner les fibres du corps et de l’âme… Steven Isserlis livre une œuvre passionnée et formidablement bien accompagnée par la virtuosité complice de l’Orchestre de Chambre de Paris.

    Cet émerveillement n’est pas prêt de me quitter, aussi je vous invite vivement à visiter le site de l’Orchestre de Chambre de Paris afin de réserver vos places pour un de leurs prochains concerts. Au Théâtre des Champs Elysées ou bien au CENTQUATRE, l’Orchestre de Chambre de Paris offre un programme musical d’une très haute qualité à partager par tous, pour tous.

    Laurence Caron 

    Il est à noter que l’Orchestre de Chambre de Paris propose un tarif exclusif pour les jeunes (jusqu’à 30 ans inclus) de 5 à 14 €.

    Renseignements : 0 800 42 67 57 (n° Vert gratuit, lundi au vendredi de 14 h à 18 h) – http://www.orchestredechambredeparis.com

    A lire, à propos de Steven Isserlis : http://www.lenouveleconomiste.fr/financial-times/steven-isserlis-violoncelliste-toute-la-musique-jusqua-wagner-a-ete-voulue-pour-glorifier-dieu-32306/  

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  • Exercice de style surréaliste et pop : le film ”PARIS N'EXISTE PAS”, de Robert Benayoun de 1969, est disponible en DVD

    ‘’Le temps est la substance dont je suis fait. Le temps est un fleuve qui m’entraîne, mais je suis le temps ; c’est un tigre qui me déchire, mais je suis le tigre ; c’est un feu qui me consume, mais je suis le feu’’. 
    Jorge Luis Borges

    En 1968, Simon (Richard Leduc), est un jeune artiste peintre en pleine crise d’inspiration. Lors d’une soirée il goûte une substance aux propriétés étranges et développe des capacités mentales qui lui permettent de voyager dans le futur et le passé. Il peut maintenant enjamber les époques en une fraction de seconde et s’amuser à observer la belle Félicienne (Monique Lejeune) qui occupait son appartement dans les années 30. Mais ses nouvelles facultés ne sont pas sans conséquence et perturbent l’équilibre du couple qu’il forme avec Angéla (Danièle Gaubert). Son ami Laurent (Serge Gainsbourg) tente de le rassurer et de l’arracher à ses « hallucinations. » 

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    La France de 1968 est en ébullition… En marge des révoltes qui grondent, l'art s'escrime à faire et défaire, détacher, renouer, fouiller, trier pour enfin créer.
    Sur une toile de fond psychédélique aux tonalités délicieusement seventies, le film de
    Robert Benayoun trace 93 minutes de délire existentiel, symptôme majeur d’une époque tiraillée douloureusement entre le passé et le présent.
    serge gainsbourg,robert benayoun,jean-claude vannierOutre cet air du temps qui imprègne chaque image du film, le réalisateur interroge sur des sujets aussi multiples que l’inspiration de l’artiste, la jungle du marché de l’art, le snobisme des marchands et la tyrannie de la mode. Ce questionnement est intemporel, radicalement actuel, à la manière d’un peintre surréaliste les plans et portraits se succèdent portés par les notes de Serge Gainsbourg et de Jean-Claude Vannier qui, à la veille de Mélody Nelson, dessinent un futur musical qui nous berce encore… et toujours.
    Car voilà, il y a Serge Gainsbourg, en chemises à jabots et vestes chic, il mâchonne méticuleusement un « fume-cigarette », un brin toujours décalé, en avance évidemment, et jeune, si jeune que vous n’en avez certainement pas le souvenir. Elégant, fin, détaché, timide, les plans de Gainsbourg sont cultes.

    Vintage à souhait, l’expérience est intéressante, le film « Paris n’existe pas » peut être considéré comme un film d’art et d’essai, autre écho de la nouvelle vague, mais il est surtout un témoignage, celui d’une époque en mouvement. Restez curieux, c'est peut-être la voie à suivre pour réapprendre à rêver à un autre futur... meilleur ?

    Laurence Caron-Spokojny

    Hier soir au Forum des Images (cycle CINEMAVILLE), la soirée  fut très intelligemment inaugurée par de la musique : le groupe "ERNEST". Ces musiciens définissent leur style comme "électro vintage"...  A vous de voir, c'est un groupe à suivre avec la plus attention et à découvrir ICI.

    Pour "aimer" la page facebook de "Ce qui est remarquable", c'est par ici

    Pour en savoir plus :
    Paris N’existe Pas a été sélectionné en 1969 à Cannes (semaine de la critique), à Locarno et à San Francisco. La musique, très présente tout au long du film a été composée par Serge Gainsbourg et Jean-Claude Vannier qui signent là leur première collaboration deux ans avant l’Histoire de Melody Nelson.

    Le réalisateur : Robert Benayoun est un homme de cinéma né le 12 décembre 1926 au Maroc. Le terme « Homme de cinéma » regroupe les différents métiers qu'il a exploré. Avant tout, Robert Benayoun est un écrivain. Ses nombreux ouvrages sur le cinéma et le surréalisme lui auront permis d'accéder à une autre dimension de l'écriture : la critique. En 1950, il fonde la revue l'Âge du cinéma avec Ado Kyrou. Ses critiques sont également publiées dans Positif, La Méthode, France Observateur et le Point.  C'est en 1968 qu'il décide d'être au plus proche du cinéma en réalisant son premier long métrage : «Paris n'existe pas ». Ce film conjugue ses deux passions : le cinéma et le surréalisme. Quelques années plus tard, en 1975, il réalise son deuxième et dernier long métrage ; « Sérieux comme le plaisir ». Il décède le 20 octobre 1996 à Paris, alors en pleine écriture d'un nouveau livre sur Steven Spielberg.

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  • A quelques pas de l’Opéra Garnier et de son fantôme, Jean Marais hante les étages de l‘élégant Eléphant Paname…

    L’exposition "Jean Marais" proposée entre les murs d’Eléphant Paname s’intitule « L’histoire d’une vie ». La vie telle qu’elle est racontée, celle qui est vécue avec toute son universalité : son injustice, ses coups de grisou et ses coups de chance. Et, c’est le cas pour Jean-Alfred Villain-Marais ; l’homme, loin d’être destiné au départ à une vie aussi artistiquement riche, laisse entrevoir par ses traces et objets intimes (lettres bouleversantes, mots touchants, passions griffonnées, déclarations hâtives, œuvres picturales inachevées ou accomplies, modelages patients, photos intimes et célèbres…) à quel point il était fait pour déchaîner les passions et faire vibrer les émotions, les attirer, les remuer et aussi les transformer. Jean Cocteau ne s’y est pas trompé.

    jean marais,éléphant paname,jean cocteau,laurence caron-spokojnyEn 1937, c'est la rencontre avec Jean Cocteau, à sa suite

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  • « Les jumeaux vénitiens » de Carlo Goldoni au Théâtre Hébertot

    Carlo Goldoni,Jean-Louis Benoît,Maxime d’Aboville,Olivier Sitruk,Victoire Bélézy,Philippe Berodot,Adrien Gamba-Gontard,Benjamin Jungers,Thibault Lacroix,Agnès Pontier,Luc Tremblais,Margaux Van Den Plas,Jean Haas,Joël Hourbeigt,Frédéric Olivier,Laurent Delvert,theatre hébertot,les jumeaux vénitiensDeux jumeaux, Zanetto et Tonino, sont séparés à leur naissance : Zanetto est élevé dans la montagne, Tonino à Venise. Le premier est un crétin, le second un habile homme. Vingt ans après, le hasard les fait arriver en même temps à Vérone pour retrouver leurs dulcinées : chacun des deux ignore que son frère se trouve dans la ville, ce qui va créer une succession de quiproquos, de situations invraisemblables et loufoques propres à semer le désordre dans les esprits et le désarroi dans les cœurs. Duels, amours et désamours, fuites éplorées, intervention de la police, retrouvailles, emprisonnement…

    En 1707, l’auteur dramatique italien Carlo Goldoni nait à Venise, pourtant on le placerait volontiers juste entre les auteurs bien français Molière et Marivaux. Avec cette folie rythmée si particulière à la commedia dell’arte et ce goût pour un réalisme infiniment moderne, la pièce « Les jumeaux vénitiens » au Théâtre Hébertot décape le Boulevard des Batignolles jusqu’au 31 décembre.

    Comme Goldoni, Maxime d’Aboville a commencé par étudier le droit puis c’est le théâtre qui l’a absorbé toute entier. Sur la scène d'Hébertot, il est en tête du peloton et joue deux rôles à la fois. La performance est inscrite dans l’ADN du comédien. En 2015, je crois l’avoir vu franchir le Boulevard du Montparnasse pour enchaîner le rôle de Charly Chaplin au Théâtre Montparnasse, juste après celui de The servant (Molière du comédien) au Poche-Montparnasse, à moins que ce ne soit pour Une leçon d’Histoire de France toujours au Poche-Montparnasse cette même année… Cette carrière menée à vive allure se fait cependant dans la justesse, Maxime d’Aboville distingue très précisément ses personnages. Les nuances des attitudes, postures et autres étranges accents de ces jumeaux vénitiens sont un régal pour le public, autant dans le comportement physique que psychologique. Le comédien joue avec une aisance rare, plus le public exprime sa joie, plus Maxime d’Aboville lui offre de quoi rassasier sa gourmandise, une véritable débauche de jeux. Et puis, il y a Olivier Sitruk, il campe un Pancrace cynique, entre Tartuffe sournois et vampire ténébreux : excellent ! La troupe qui noue et verrouille les rouages de la farce tout autour d'eux est bien choisie et maintient l’intrigue burlesque jusqu’au bout sans faillir. Les costumes de Frédéric Olivier sont souples et chatoyants, la mise en scène de Jean Louis Benoît est vive et efficace. La fin n’est pas tout à fait celle que l’on imaginait, bâclée, tirée par les cheveux, je ne sais pas bien… A vous de voir, sans tarder.

    Laurence Caron

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  • Le Mariage de M.Weissmann au Théâtre La Bruyère

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    Sans en avoir l’air : nous montrons du doigt, sans y prêter attention : nous nommons, et, souvent sans en prendre garde : nous dénonçons. Les mots lancés comme «communautarisme» ou «ségrégationnisme» répondent en choeur aux mots «racisme», «antisémitisme», et, de la façon la plus terrifiante qui soit, au mot : «terrorisme». Dans notre Monde chacun à de plus en plus de mal à trouver sa place, pour y parvenir la plupart d’entre nous commencent par observer la place des autres, c’est une façon de se situer, une sorte de point de vue, pas le meilleur. Car, par mauvais temps la malveillance prend ses aises, plus ou moins avouée, plus ou moins ressentie, pour parfois dépasser les limites, l’Humanité s’en trouve esquintée, on appelle cela «l’horreur» et plus grave encore il est question de "crime contre l'humanité". Ce fut le cas lors du massacre de Charlie Hebdo et de l’épicerie cacher de Vincennes ; à cela, les foules se sont levées, elles ont marché. Des écriteaux noirs comme des faire-parts de décès se sont dressés « je suis Charlie », il y a eu très peu de « je suis juif ». Pourquoi ? A cette question millénaire, je n’ai pas de réponse.
    En revanche, je peux vous recommander vivement d’assister à la pièce «Le mariage de M. Weissmann» au Théâtre La Bruyère, la plume de l’auteur Karin Tuil  se charge d'éveiller les esprits et elle peut être aussi un baume souverain...

    Le Mariage de M.Weissmann,salomé lelouch,plon,karine tuil,Jacques Bourgaux,Bertrand Combe,Mikaël Chirinian,Théâtre La Bruyère« Je m'appelle Saül Weissmann mais ne vous fiez pas à mon nom qui est juif, en dépit des apparences. J'ai été, pendant soixante-dix ans, un imposteur pour les autres et pour moi-même ». 
    Ainsi commence la confession du narrateur qui apprend de la bouche d'un rabbin qu'il n'est pas juif selon la loi de Moïse.

    L’identité est un «caractère permanent et fondamental de quelqu’un, d’un groupe qui fait de son individualité, sa singularité», selon le Larousse. Alors lorsque cette «identité», qu'elle soit en partie religieuse, sociale, ethnique, culturelle, professionnelle ou autre, est remise en cause, de quelle façon notre existence s’en trouve t’elle bouleversée ou même menacée ? Tout en cherchant à jauger l’influence de notre « identité » sur notre existence, par son propre regard intérieur ou bien par celui que porte les autres sur nous-mêmes, l’auteur Karine Tuil -aussi lorsqu’il s’agit de citer des sujets aussi graves que les camps d’extermination orchestrés par les nazis pendant la seconde guerre mondiale- traite un sujet souvent esquivé dans les conversations courantes (Interdit, Plon 2001, puis en Livre de Poche). Avec déférence et dans une véritable liberté d'expression, Karine Tuil fonce, rien n’échappe à cette chevalière des temps modernes dans sa quête de vérité. 

    Pour donner une existence scénique au roman "Interdit", et sur un ton résolument burlesque, Salomé Lelouch s’est intelligemment attelée à  l’adaptation et à la mise en scène. Délicatement, avec ce je ne sais quoi « d’éternel féminin » qui lie les mots aux mouvements comme pour un ballet contemporain, le propos se concentre sur l’essentiel. Dans un décor aux lignes pures, un rien minimaliste, trois comédiens formidables se partagent un seul rôle : Jacques Bourgaux, Bertrand Combe et Mikaël Chirinian. Intarissables d’inventions, ils expriment un jeu plein de complicité soutenu par un rythme sans faille réglé au cordeau. Habité de souvenirs terribles et d’anecdotes savoureuses, un univers vaste se déploie : une vie entière pour un seul homme, cela prend de la place…

    Et, comme pour tromper l’ennemi tortueux à l'insatisfaite question existentielle que chacun se pose : "qui suis-je ?" , le drame adopte le vocabulaire du bonheur à grand renfort d’autodérision, l’humour juif fixe un point d’honneur à se faire entendre et c’est un régal. La tendresse et la politesse du désespoir rivalisent d’élégance, les intentions de Salomé Lelouch sont souvent ludiques et les comédiens semblent s’y sentir parfaitement à l’aise. L'exercice est adroit, le résultat parfait.
    Toujours dans le rire, sans prétention, et, dans une rare franchise de ton, « Le Mariage de M. Weissmann » passe en un éclair (de génie), il reste un sentiment de paix, une sorte de compréhension immédiate, un apaisement… nécessaire.

    Laurence Caron-Spokojny

    lundi à 20h30 et dimanche à 15h30. Réservez sans attendre. 

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  • L'envers du décor au Théâtre de Paris

    pauline lefèvre,françois-eric gendron,florian zeller,danile auteuil,théâtre de paris,valérie bonnetonC’est un syndrome très français qui a la peau dure : quand un comédien ou une comédienne commence à plaire au public, les salles de spectacle et les médias en usent et en abusent. Il en est de même pour les auteurs. Florian Zeller est en tête de liste ces dernières années, sans compter ses pièces en tournée, l’auteur cumule les affiches à Paris avec Le mensonge au Théâtre Edouard VII, L’Autre au Poche-Montparnasse et L’Envers du décor au Théâtre de Paris.

     

    Daniel Auteuil et Valérie Bonneton tiennent les rôles principaux de L’Envers du décor. Le premier est le grand comédien que nous connaissons, aussi bien pour ces prestations cinématographiques que théâtrales, et l’autre est une comédienne dont la carrière au cinéma depuis 20 ans additionne un joli palmarès, et dont la popularité est à son comble, depuis bientôt dix ans, avec son rôle dans la série télévisée : « Fais pas ci, fais pas ça ». 

    Cette fois-ci, le ‘spectacle vivant’ aurait mieux fait de conserver sa magie plutôt que de nous dévoiler L’envers du décor. Ce n'est vraiment pas folichon. L’auteur se penche, à nouveau, sur les complications quotidiennes d’une petite bourgeoisie française pas très attrayante : une histoire de couples et d’amis, dont l’un a quitté sa femme pour une jeune et jolie blonde…

    L’écriture de Florian Zeller est toujours aussi riche et au rythme enlevé : le parti pris est à la rigolade, à en croire les réparties -parfois vulgaires- du personnage de Daniel Auteuil. Mais cet humour facile a du mal à trouver de l’élan sur un terrain aussi mou. Les pensées dites à haute voix par les comédiens sont infiniment longues, et ne valent certainement pas autant d’efforts d’articulations, et autres gesticulations de jeu, de la part des interprètes. Et puis pour faire rire, il faut d’abord émouvoir, ce qui ne semble pas avoir effleuré l’auteur. L’intensité de la plume de Florian Zeller, d'habitude si intelligente et si sensible -notamment dans la pièce Le Père- semble s’être égarée quelque part… 

    Valérie Bonneton décape la scène, affutée et précise, alors que son partenaire se démène en oscillant entre une interprétation mi-boulevard, mi-classique, sans parvenir à faire un choix pour donner un véritable sens à son jeu. Daniel Auteuil est aussi le metteur en scène de L’envers du décor, ce grand écart entre son rôle de comédien et son regard sur la pièce explique peut-être ce manque d’implication dans son interprétation. 

    L’ami enviable, François-Eric Gendron, et la jolie petite amie, Pauline Lefèvre, font ce qu’ils peuvent pour exister, leurs rôles sont un peu escamotés, autant dans l’écriture que dans la mise en scène… 

    Une aussi belle scène de Théâtre, une aussi talentueuse distribution pour un auteur aussi reconnu, et avec une aussi importante couverture médiatique, ne font pas forcément une bonne pièce. L’envers du décor doit rester dans l’ombre. 

     L.Caron-Spokojny

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  • Le Crime de l'Orpheline au Théâtre Le Ranelagh

    Florence Andrieu,Flannan Obé,Philippe Brocard,Philippe Lelièvre,Marcela Makarova,Jeannette Salvador,Florence Andrieu,Flannan Obé,Philippe Brocard,Delphine Dussaux,Casilda Desazars,Philippe Sazerat,Eymeric François,théâtre le ranelagh,le crime de l'orphelinePhilippe Lelièvre porte bien son nom, il est un homme pressé. A la radio, à la télévision, au cinéma, il écrit, il anime, il joue, il dirige, il est un touche-à-tout intrépide et curieux. Et puis, il y a la scène, sûrement la source de ce renouvellement artistique dont cet artiste fait preuve. Pour Le Crime de l’Orpheline, Philippe Lelièvre est à la mise en scène, la pièce se joue dans la salle boisée du Théâtre le Ranelagh depuis le 1er avril, et - comme sa date l’indique - il s’agit d’une farce.  

    Sous la grisaille de la ville, une orpheline loge dans une petite chambre toute triste. La jeune femme, sous l’emprise de sa tutrice, découvre les affres de son cœur et ses premiers émois… 

    Dans un décor étonnant, dont le vocabulaire appartient au registre du merveilleux, et qui n'a absolument rien à envier aux plus grands scènes, deux artistes, comédiens-chanteurs-danseurs, et un pianiste, tiennent 1h20 de spectacle. 
    Seulement, le décor, de Casilda Desazars, penche, et, les personnages, vêtus des ravissants costumes d'Eymeric François, penchent eux aussi. Il y a comme un souffle, étrange, un peu à la façon de Tim Burton. L’atmosphère frisonne. 
    Dangereusement, l’amour - parabole poétique d’une innocente Colombine et d’un aérien Pierrot - glisse pour se transformer en une aventure burlesque, complètement fêlée et savoureusement sanguinolente.
    La scène du Ranelagh est à la fête ! Les artistes chantent, pas comme il est courant de l’entendre dans le genre, souvent très effrité, de la comédie musicale sur nos scènes parisiennes - ici, on chante bien et pour de vrai. Il y a un brin d'air d'Opérette qui raisonne, à ses plus belles heures, de celles dont Camille Saint-Saëns disait : "l'opérette est une fille de l'opéra-comique ayant mal tourné, mais les filles qui tournent mal ne sont pas toujours sans agrément"Kurt Weill ou Franz Léhar veillent au grain et inspirent très largement le phrasé musical dont les deux chanteurs lyriques servent une interprétation exquise. L'élégant Flannan Obé, à l’image du bouleversant  Baptiste (Jean-Louis Barrault dans Les enfants du Paradis), et, la piquante Florence Andrieu, digne héritière de Louise Brooks et Clara Bow, offrent un jeu tout en finesse et une interprétation forte, ils sont accompagnés au piano très justement par Philippe Brocard. 

    L’envoûtement est délicieusement vintage, il a la saveur de la mythique de l'attraction qui comblait l'entracte du cinéma de nos parents, et l’accent est radicalement punk, les fantômes du Grand-Guignol de la rue Chaptal ou du Boulevard du Crime sont certainement cachés entre les plis du rideau rouge du Ranelagh. Bourré de références cinématographiques réinventées, Le crime de l’orpheline est aussi un hommage puissant au cinéma muet. Charmante et grinçante, drôle et sensible, l’histoire est chantée puis rythmée par des interprétations muettes, des mimes savants, de très précises respirations romanesques bousculées par la fantaisie périlleuse de Philippe Lelièvre.
    C’est une vraie réussite. La prouesse et la qualité artistique du Crime de l’Orpheline en font un spectacle musical d’une rare richesse et un instant terriblement amusant ! 

    A recommander très vivement pour TOUS !

    Laurence Caron-Spokojny

     

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  • Patrick Dupond : l'envie de danser

     Patrick Dupond est sans conteste le plus grand danseur de sa génération.
    Cela le monde entier en est convaincu, sauf lui...

    Patrick Dupond,danse,laurence caron,institut du monde arabe,danse,laurence caronIl est une star absolue. Au delà du travail et des tortures disciplinaires imposés par l'art de la danse, il a été touché par la grâce. Présence, charisme, charme et humour le caractérisent, et toujours avec cette générosité dont lui seul possède les codes. Personne n'oserait remettre en question l'insolence du talent de Patrick Dupond, il n‘est pas un homme comme les autres, il est différent du commun des mortels. Pourtant, il semble que le danseur lui même tenterait d'ébranler ces certitudes. 

    patrick dupond,institut du monde arabe,danse,leila da rocha,fusion,laurence caron(Fusion avec Leila da Rocha)
    Le voici sur la scène de l’Institut du Monde Arabe aux côtés de Leila Da Rocha, danseuse orientale de Soisson...

    Le propos de FUSION est une sorte de passerelle entre le jeune danseur adulé et un danseur (moins jeune) oublié et meurtri, c’est en tout cas ce qu’il veut nous faire croire. La rencontre avec Leila da Rocha le «ressuscite» et est symbolisée par un croisement entre la danse orientale et la danse occidentale.
    Pour la rencontre de l’orient et de l’occident, on pense tout de suite à Maurice Béjart qui s'est influencé du répertoire chorégraphique persan. Le maître a reconnu lui-même que cette démarche fut déterminante pour l’ensemble de sa carrière, et, participant ainsi à créer les fondations d’un nouveau genre : la danse contemporaine.
    Bien loin, il s’agit plutôt ici de danse du ventre et de gracieux mouvements de poignets. La performance est agréable, le visage de la belle est envoûtant. A ces côtés, Dupond saute, s’élance, tourne, s’escrime, traverse la scène les bras tendus, il tente d’attraper quelque chose ou de le retenir. Les pas sont résolument élégants, le port est altier, la grâce est là intacte, mais il y a comme un doute, quelque chose de malhabile, un manque de confiance. Cette fragilité, Leila Da Rocha propose de la canaliser en l’emmenant sur son territoire...
    Seulement cette terre n’est pas assez vaste. Patrick Dupond est à l’étroit. Il est une étoile, il y a quelque chose d’universel et d’intemporel dans cette «fonction». Dupond est fait pour s’exprimer sur des plateaux de bois précieux, se couler dans des costumes de soie imaginés par les plus grands couturiers, être guidé par les chorégraphes les plus innovants. Alors bien sur, sa danse n’a plus la même effronterie, la vie et les années se sont chargées de lui infliger des souffrances autant physiques que psychologiques. Il a changé, il a vieilli.
    Et alors ?
    Il est un artiste. Il est le seul à porter ce nom «Patrick Dupond» ; la star, longtemps unique à être connue outre atlantique et outre tous les océans d’ailleurs.

    patrick dupond,institut du monde arabe,danse,leila da rocha,fusion,laurence caron

    (Salomé de Béjart)

    Trêve de nostalgie. Il faut avancer. Ses épreuves tragiques doivent se transformer en énergie créatrice, le grand interprète qu’il est doit s’en nourrir. On peut entrevoir même une nouvelle dimension à son travail... Tragique ou comique, Dupond est avant tout un comédien et on ne peut ignorer cet avantage. Le merveilleux Salomé de Béjart ne sera peut-être plus jamais dansé par Dupond : c’est ainsi.
    Et alors ?
    Continuons. Tournons la page et écrivons la page suivante. Vite. Il faut reprendre le fil de l’histoire.
    Quel chorégraphe contemporain pourrait lui écrire un rôle, un solo ?  Qui oserait guider les pas de Patrick Dupond afin qu’il soit rendu au public ? Qui aurait le talent d’inscrire Patrick Dupond dans la danse d’aujourd’hui et non pas uniquement dans un passé qui a le goût trop amer des regrets ?
    Maîtres chorégraphes, un peu d'audace s'il vous plaît, à vous de jouer ! 

    Laurence Caron-Spokojny

    Institut du Monde Arabe 

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  • « La Ménagerie de verre » au Poche-Montparnasse

    la ménagerie de verre,Cristiana REALI,Ophelia KOLB,Charles TEMPLON,Félix BEAUPÉRIN,Jean-Michel ADAM, Romain LALIRE, Vadim SHER,François LOISEAU,Alma de VILLALOBOS,Pauline DEVINAT,Julie MAHIEU et Anaïs SOUQUET,Marcel RONDELEZ,charlotte rondelez,ISABELLE FAMCHON,tennessee williams,poche-montparnasseL’auteur américain Thomas Lanier Williams, dit Tennessee Willliams, n’a pas eu une enfance facile. L’un des plus grands dramaturges du 20ème siècle a certainement puisé son inspiration dans cette famille malheureuse et chaotique.

    Saint-Louis. Au sud des Etats-Unis, un père alcoolique, absent la plupart du temps, une mère désabusée, et, une sœur fragile, perturbée, sont les personnages principaux de La Ménagerie de verre, une des premières pièces de Tennessee Williams écrite en 1944. Une résonance douloureusement autobiographique.

     "La pièce se passe dans la mémoire et n'est donc pas réaliste …" *

    Pour nous faire rencontrer la violence de ces sentiments, Tennessee Williams à la délicatesse de « se » raconter par la voix d’un narrateur, Tom le fils. Comme une projection de lui-même, un jeune garçon étouffé par sa mère, et, des responsabilités qu’il n’a pas choisies. Une vision distancée par le temps, transformée par les souvenirs. 

    "Car le temps est la plus longue distance entre deux endroits…"*

    Aux situations dramatiques, l’auteur ajoute des notes d’humour, désespérées certes mais savoureuses. La pilule passe mieux et évite les ornières du pathos. L’écriture élégante, fluide, bouleversante, si bien menée qu’elle vient soulever les personnages, comme dans un songe, un état de semi-conscience.

    Un souvenir sans concession mais qui ne porte pas de jugement. 

    Sur une étagère dont elle ne peut s’échapper, la scintillante Ménagerie de verre avec laquelle les protagonistes (et le public) tissent de poétiques paraboles entre cette famille et les animaux translucides, apporte un peu d’éclat au petit appartement dessiné par Jean-Michel Adam. Le décor de ces tristes vies se fond en teintes orangées comme à cette heure tardive où le soleil hésite à se coucher. François Loiseau y apporte quelques bougies, petites flammes à la lumière vacillante... Une dualité s’installe, entre rêve et réalisme, symbolisme et sincérité, amour et haine. Charlotte Rondelez est aux manettes d’une mise en scène habilement dépouillée, sobre, en ombres suggérées et à quelques effets vidéo près. Désespérés, les personnages tentent de repousser les murs d’un espace qui semble se refermer sur eux. L’atmosphère se sature de regrets, fantasmes et faux espoirs. En mode survie, l’issue en sera la fuite, pour le personnage principal comme pour l’auteur…

    Courtisée par un essaim de « galants », coquette et impertinente, allant se réfugier (ou s’y faisant piéger) entre les pages du roman fleuve de Margaret Mitchell Autant en Emporte le vent, Amanda joue à « on fait comme si j’étais » Scarlett O’Hahara… Cherchant à échapper à cette caricature de femme d’intérieur des années 30, Amanda demeure cette mère louve interprétée par Cristiana Reali qui a en trop aimer ses enfants serait capable de les bouffer. Puissante, furieuse, Cristiana Reali a l’immense tâche d’interpréter un rôle aux accents universels. Un peu toutes les mères à la fois, un monstre d’amour aussi envahissant que faillible. L’interprétation de la comédienne atteint des sommets. Tendue comme un arc, la très belle comédienne bascule avec maîtrise dans un abandon, abyssal. Malgré ce vertige : pas un seul faux pas. Entière, divine, magnifique !

    Et puis, il y a les autres. Tous formidables ! Ophelia Kolb, la sœur égarée, est attendrissante et aérienne. Charles Templon est un jeune Tennessee que l’on est près à suivre dans sa carrière, de comédien pour l’un, et d’auteur pour l’autre tant son emploi semble réel. Et, Félix Beaupérin est un « galant » fantaisiste qui passe de la lumière à l’ombre de son personnage avec précision. 

    Une remarquable distribution artistique à la hauteur du chef d’œuvre de Tennessee Williams, à voir absolument comme cela est souvent recommandé pour les pièces qui lancent le début de la saison du Poche-Montparnasse

    Laurence Caron

    *phrases extraites de la pièce

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  • Les deux frères et les lions au Théâtre de Poche Montparnasse

    AFF-LES-DEUX-FRERES-Reprise-1-768x1148.jpgLe très britannique Charlie Chaplin disait : «L'obstination est le chemin de la réussite», c’est certainement la devise suivie par ces frères jumeaux. Partis de «rien» et stigmatisés par le mal des sociétés modernes (soit une société qui porte une trop haute opinion d’elle-même), ils sont, cinquante ans plus tard, anoblis par la Reine Elizabeth. Londres est leur territoire de jeux et de conquêtes, groupe de presse ou hôtels de luxe, rien n’échappe à leur soif. Les deux anglais malmenés par l’injustice sociale dès l’enfance prennent ce que l’on ne leur a pas donné, ils se servent largement, profitant d’une vague de capitalisme qui à la fin du 20ième siècle atteint des sommets. 

     

    Parcourant le monde, de la City à Wall Street, les deux magnats se dissimulent dans des paradis fiscaux et frôlent les murs pour échapper aux tabloïdes. Farouchement indépendants, les frères-amis font l’acquisition d’un île anglo-Normande sur laquelle ils construisent un château élisabéthain totalement délirant, débauche architecturale de marbre, vitraux et mosaïques et d’installations high-tech dernier cri. L’empire a maintenant une terre, presque un pays, pour lequel ils se battent corps et âmes quand ils se font rattraper par l’Histoire, confrontés au Droit Normand. Un droit féodal phallocrate tenu par le seigneur de Serq, ombre de la Reine…. 

    Ce conte moderne est inspiré d’une histoire vraie, Hédi Tillette de Clermont-Tonnerre a enquêté en prélevant des extraits de presse de ces deux vies abracadabrantesques. Avec discernement l’auteur et comédien crée des portraits burlesques et tendres à la fois, dans un monde brutal où la réponse de ceux qui sont oubliés l’est tout autant. Les thématiques sensibles abordées par la pièce sont inscrites dans l’actualité, de la violence des incompris à la condition féminine aux relents moyenâgeux. 

    Hédi Tillette de Clermont-Tonnerre dissèque des corps égoïstes et cyniques avec une empathie singulière. Pourtant, les véritables jumeaux milliardaires se sont plaints de l’outrecuidance de ce jeune auteur pour s’être emparé des faits réels pour en broder ce comte. Un procès est en cours, la démarche est étonnante si l’on en croit la volonté des protagonistes de garder le secret sur leurs vies, et bien éloigné de l’humour et du flegme britannique… Espérons que la morale de l'histoire soit que le pouvoir de l'argent ne doit pas prendre le pas sur la liberté de création !

     

    Le rythme est vif, les répliques cinglantes et la pantomime fait naître des fous rires impossibles à contenir. La complicité de jeux de Romain Berger et d’Hédi Tillette de Clermont Tonnerre tient un équilibre d’une rare élégance même lorsqu’il est bousculé par quelques acrobaties et danses loufoques. Dans une mise en scène très créative de Vincent Debost, les deux comédiens envahissent l’espace qu’il s’agisse de la scène, des rangs de spectateurs jusqu’au hall du Poche-Montparnasse. Le public est sous le charme et heureux par tant de partage. Le Théâtre est une fête même lorsqu’il s’agit de sujets graves et sensibles, nous en avons déjà convenu entre ces lignes, le Théâtre est la vie mais en mieux. Merci les artistes ! 

    Laurence Caron 

    De Hédi TILLETTE DE CLERMONT-TONNERRE. Mise en scène Vincent DEBOST et Hédi TILLETTE DE CLERMONT-TONNERRE

    Jusqu’au 17 mars 2019 - Du mardi au samedi à 19h, dimanche 15h

    Pour les chanceux qui iront ce jour là ! Débat proposé à l’issue de la représentation du 13 février sur le Droit normand, animé par Sophie Poirey, Maître de Conférences en Droit normand à l’Université de Caen-Normandie.

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  • Bells and Spells au Théâtre de l'Atelier

    aurélia thierrée,victoria thierrée-chaplin,théâtre de l'atelierPour Bells and Spells la scène du Théâtre de l'Atelier déborde. Ce sont des masques extraordinaires, des habits aux couleurs du temps, des danses folles, des étoffes scintillantes, des êtres surnaturels qui s’animent, des chapeaux ou des abats jours ravissants, des peintures qui prennent vie et des décors qui glissent comme sur l’eau.  L’univers de Bells and Spells d’Aurélia Thierrée, dessiné par sa mère Victoria Thierrée-Chaplin, est complètement dingue. Une folie douce au demeurant car c’est toujours d’amour dont il s’agit.

    Après L'Oratorio d’Aurélia et Murmures des murs, dans Bells and Spells Aurélia Thierrée est cleptomane d’objets de toutes sortes ; rebelles et orgueilleux, bijoux et breloques finiront par prendre possession de la naïveté de leur ravisseuse. 

    aurélia thierrée,victoria thierrée-chaplin,théâtre de l'atelierAccompagnés par des artistes aux mines déconcertantes, Aurélia Thierrée et Jaime Martinez forment quelques pas de deux sous lesquels naissent des mondes oniriques et drôles. Du fond de ses grands yeux bleus étonnés et de son sourire confiant, Aurélia Thierrée s’émerveille du monde et s’applique à transmettre avec une grande justesse tout cet enchantement au public.
    Des spectateurs suspendus, médusés, transportés ailleurs. 


    Avec l’insolence d’une fée, elle transforme les choses les plus simples, autant que les sentiments les plus humbles, en trésors inestimables, cela n’est pas s’en rappeler le talent de son illustre aïeul. Lissé par un sens du surréalisme audacieux, les époques se mélangent des années 30 au Moyen-âge, un rétropédalage sur une machine fantasque faite de portes manteaux grinçants qui pourrait sembler un brin mélancolique mais qui fait appel surtout à un vocabulaire artistique original se moquant bien de l’espace et du temps. 

    En écho à son frère James Thierrée qui mène tambour battant son « Raoul » à la Scala de Paris, l’alchimie créée par la mère et la fille Thierrée-Chaplin assemble imagination et ingéniosité pour un spectacle à la beauté sincère et pure.

    Laurence Caron

    photo ©Richard_Haughton

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  • Barbara, Un jardin de Silence à La Scala

    Barbara,L.,Raphaële Lannadère,Thomas Jolly,Babx,Sylvain Wavrant,Alexandre Dain,Thibaut Lescure,Antoine Travert,La Piccola Familia,Les Scènes du Golfe,Festival Les ÉmancipéésL’éclairage est savant, impossible de ne pas penser aux scènes sur lesquelles Barbara a régné, de l’Olympia au Théâtre du Châtelet. Une marque indélébile. Le plateau, chaleureux et baroque, est couvert de bouquets de fleurs. L’univers créé par Thomas Jolly est magique, l’atmosphère est d'une intimité troublante. On sent bien que le moment va être exceptionnel.

    Ce sont des apparitions fugaces, son allure, les accents de sa voix, Barbara chante et laisse s’échapper quelques confidences. Dissimulée derrière ses lunettes noires, celle qui rêvait d’être pianiste a une prédilection pour la chanson populaire, notamment celle des années 30. La reprise de "Elle vendait des p'tits gâteaux" de Vincent Scotto par L. est un instant formidable ! Puis la chanteuse devient auteur-compositrice, elle évoque surtout les méandres de l’âme et de l’amour.  

    Barbara est incarnée par Raphaële Lannadère, enfin pas tout à fait.... Raphaële Lanadière est d'abord "L.", une interprète géniale, à aucun moment il ne s’agit d’imitation mais plutôt d’une très sensible et très juste interprétation. Le musicien Babx accompagne attentivement, presque amoureusement, Barbara ou L.. Tour de passe-passe, on ne sait plus, qui est qui  Entre chansons, extraits d’interviews et lectures de textes, cet hommage rendu à Barbara fait apparaître l’artiste et la femme avec pudeur, dans une très grande élégance.

    L'insoutenable légèreté de l'Etre...

    Le metteur en scène et comédien, Thomas Jolly, est un trublion déchaîné dont les ardeurs humoristiques secouent les rangs des spectateurs de fous rires auxquels ici personne ne s’attendaient. « Un jardin de silence » est aussi une charge bien sentie au questionnement redondant, quasi surréaliste et toujours d’actualité, des journalistes à l’égard des artistes. 

    De Barbara j'avais retenue qu'elle nourrissait une véritable passion pour le jardinage, cela je ne pouvais que le noter, une façon familière de calmer les angoisses et de faire taire les fantômes, un autre « jardin de silence ». Ce soir là, on croit voir les bouquets de lys refermer leurs corolles, les projecteurs s’éteignent, personne ne veut quitter Barbara. A regret, le public retrouve le boulevard de Strasbourg, comme orphelin. Il y a cette drôle d’impression qui flotte, celle laissée par les belles histoires qui semblent toujours trop courtes. Mais que chacun se rassure, sa plus belle histoire d’amour c’est nous...

    Laurence Caron

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  • Rouge de John Logan au Théâtre Montparnasse

    rouge,théâtre montparnasse,niels arestrup,alexis moncorgé,john logan,jean-marie besset,jérémie lippmannSoirée intense au Théâtre MontparnasseA la fin des années 50, un grand restaurant New Yorkais souhaite une fresque du peintre Mark Rothko (Niels Arestrup) ; pour répondre à cette commande, Rothko engage un assistant (Alexis Moncorgé).  

    Dans l’atelier du peintre, les démons de Rothko se déchaînent, son anxiété du temps qui passe, sa quête de sens artistique et métaphysique et ses révoltes. Son assistant accuse les coups, écoute, apprend et fini par provoquer le maître de l’expressionnisme abstrait pour le pousser dans ses derniers retranchements…  

    Niels Arestrup se jette tout entier dans le personnage de Rothko. Irascible, tonitruant, excessif, cruel et égotique. Rothko est à vif. Plongé dans l’œuvre de Nietzsche (La Naissance de la tragédie à partir de l’esprit de la musique, 1872), Rothko appose un sens tragique à chacun de ses actes, de ses pensées et de ses rencontres. Plus qu’un questionnement, c’est un combat rapproché avec l’art, la vie et le monde. Une joute intellectuelle et passionnée dans laquelle Arestrup est parfaitement à son aise. Terriblement humain, terriblement abrupte et à la fois si sensible, si fragile, Arestrup, c’est son habitude, donne tout. Le comédien parvient par l’intelligence du texte de John Logan à projeter le public entre la toile blanche et les aplats de couleur, des fondus enchaînés spatiaux, intemporels. Les territoires des deux artistes semblent les mêmes. A croire qu’un tour de passe-passe aurait permis à Rothko de posséder le corps d’Arestrup. Le public est témoin d’une illusion parfaite, peut-être machiavélique, à laquelle personne ne souhaite changer quoi que ce soit, heureux et parfaitement consentant d’être aussi proche de ce qui fait la création, une alchimie bouillonnante presque palpable.

    Dans l’antre de la bête, le jeune comédien Alexis Moncorgé pourrait se faire dévorer en un rien de temps. La confrontation avec Arestrup-Rothko, c’est beaucoup pour un seul homme même s’il est l’un des jeunes comédiens les plus doués de sa génération. Mais, le petit fils de Gabin se défend et trace sa route. A pas feutrés, il impose un jeu subtile et sincère, il esquive les coups de griffes du monstre et lui fait face.

    L’ensemble est délicatement mis en valeur par Jérémie Lippman et Jacques Gabel. Dans un jeu aérien les œuvres de Rothko descendent du ciel, dont on ne sait où comme c’est le cas pour toutes les formes de créations. Du Rouge, certes, mais pas seulement. Pour apprendre à regarder autrement, vraiment, et aussi pour ne pas manquer le gros succès de la saison.

    Laurence Caron

    Rouge - Théâtre Montparnasse - Niels Arestrup, Alexis Moncorgé, Texte de John Logan - Version française de Jean-Marie Besset -Mise en scène Jérémie Lippmann

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  • Sorcières au Théâtre de l’Atelier

    théâtre de l’atelier,sorcières,Mona Chollet,Géraldine Sarratia  ,Élodie Demey,Mélissa Phulpin, Candice Gatticchi,Laëtitia Leporcq,Julien Mignot,Dune Lunel,SMITH, Spectrographies,Librairie de Paris,Anna Mouglalis,Annabelle Lengronne,Ariane Ascaride,Aure Atika,Christiane Millet,Claire Dumas,Clotilde Hesme,Constance Dollé,Eye Haïdara,Florence Muller,Garance Marillier,Grace Seri,Irène Jacob,Jennifer Decker,Marie-Sophie Ferdane,Suzanne de Baecque,Valérie Donzelli,Anne Pacéo,Clara Ysé,Fishbach,Franky Gogo,Léonie Pernet,Lucie Antunes,Mélissa Laveaux,P.R2B,YoaInitialement créé au Théâtre du Rond-Point en 2019, le collectif A définir dans un futur proche formé par des femmes d’Arts et de Lettres - Elodie Demey, Mélissa Phulpin et Géraldine Sarratia – porte sur scène Sorcières, et rassemble des comédiennes et musiciennes qui se partagent la lecture de ce plaidoyer mordant sur la scène du Théâtre de l’Atelier.

    Symbole d'une misogynie ancestrale, l'écrit de Mona Chollet, journaliste franco-suisse née en 1973, intitulé Sorcières, dénonce la violence, jusqu'à l'éradication, réservée aux femmes depuis des siècles sur tous les continents, en soulignant très intelligemment la légèreté du ton employé pour décrire cet obscure massacre.

    Chacune à sa manière, à jamais passionnées, les interprètes s'accaparent Sorcières, une enquête riche, truffée de références historiques et aussi (hélas) trop souvent contemporaines.

    La puissance invaincue des femmes

    Énergiques et conquérantes, désespérées parfois et souvent drôles, sarcastiques et piquantes, les anecdotes citées et les analyses éclairées plongent leurs racines dans une boue collante et nauséabonde dont il est vraiment difficile de se défaire. Comme se fait-il que ce discours paraisse encore tant d’actualité, presque trop familier ?

    Franchement, depuis quelques années le « féminisme » - très éloigné de celui défendu et porté haut par ma grand-mère - semble s’être un peu perdu, comme disloqué. Tour après tour, il réduit les femmes en éternelles victimes quand elles ne sont pas des militantes aux seins nus, ou bien il créé des frontières affutées, parfois terrifiantes, entre les différents sexes, des conflits de plus dont on se passerait bien. Difficile de se retrouver dans cet chaos, heureusement Mona Chollet remonte aux origines du mal... La connaissance et l’indépendance d’esprit, le non désir de maternité et même le célibat, le refus de l’esclavagisme domestique ou pire encore un vieillissement physique non dissimulé, ont été des motifs d’accusation et peut-être le demeurent ils encore. Ainsi, quand Mona Chollet évoque la maternité, l’horloge biologique ou simplement le vieillissement de la peau, on ne peut manquer de s’interroger, le véritable terrain de bataille est enfin à découvert. L’essayiste dénonce avec vigueur, rien n’est déguisé et tout est très sérieusement argumenté par des faits historiques. On préfèrera peut-être réléguer ces choses honteuses dans des sociétés très lointaines et très anciennes, forcément, la chasse, sous toutes ces formes, n’est plus une activité très tendance et les sorcières n’existent que dans les contes de fée. Pourtant, « La puissance invaincue des femmes », le prisme révolutionnaire, par lequel Mona Chollet nous intime de rester sur nos gardes, nous insuffle une énergie qui n’est pas prête de s’épuiser ni de renoncer ! L'illustration qui en est faite au Théâtre de l'Atelier est absolument immanquable.

    Laurence Caron

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  • ”Les Poupées Persanes” au Théâtre de la Pépinière

    Dans les années 70 en Iran cela fait plus de 30 ans que le shah Mohammad Reza Pahlavi fait régner un gouvernement corrompu et aux pratiques violentes. L’opposition se forme portée par des intellectuels laïcs, essentiellement des étudiants et des mouvements populaires, vite récupérés par les religieux. Le shah s’oppose très fermement à cette opposition religieuse jusqu’à faire exiler l’Ayatollah Khomeiny, leader emblématique devenu historique. Exilé hors d’Iran pendant 14 ans (notamment en France, difficile de ne pas se souvenir des images de sa sortie de l’avion Air France…), l’Ayatollah Khomeiny tire les ficelles de la révolution iranienne, il accuse le shah de tyrannie et diffuse sa propagande théologienne qu’il qualifie de «démocratie islamique».

    Téhéran, aujourd‘hui. Alors que le Prix Nobel de la paix vient d’être décerné à Narges Mohammadi, militante iranienne emprisonnée à Téhéran, Armita Garavand (16 ans) est dans le coma pour ne pas avoir  porté le foulard hijab dans le métro... juste un an après le décès de la jeune kurde Jina Mahsa Amini (22 ans), arrêtée par la même police des mœurs chargée d'appliquer les règles vestimentaires strictes pour les femmes. Dans ce pays où il est coutume de capturer des étrangers afin de les utiliser comme un levier de chantage diplomatique et financier, les violences à l’égard des femmes se multiplient, elles peuvent-être mariées dès l’âge de 13 ans et sont considérées responsables pénalement dés 9 ans, l'agression sexuelle n'est pas considérée comme un crime et si un homme tue sa femme pour adultère il n’est pas sanctionné, aucune femme n’a accès à des fonctions politiques de haut niveau, ... la liste est longue, infiniment.

    Inspirée par ses origines iraniennes, et de toute la complexité et la douleur de cet héritage, l’auteur Aïda Asgharzadeh a écrit « Les Poupées Persanes », elle y joue aussi avec une sincérité bouleversante. La pièce, déjà Moliérisée (Molière de l'auteur francophone vivant, Molière du comédien dans un second rôle pour Kamel Isker) a dépassé la 220ème représentation. La scène du Théâtre de la Pépinière réunit une jeune bande de comédiens et comédiennes (d’origines iraniennes ou pas) particulièrement dynamique et concernée par un sujet qui continue à faire écho à notre actualité. Cependant, ne vous méprenez pas, malgré le sujet traité, la pièce demeure un pur divertissement.

    La fine équipe a été rejointe début septembre par l’énergique Juliette Delacroix (Une histoire d’Amour, La Scala), la comédienne a relevé le défi en s'appropriant ses différents rôles, à toute berzingue elle passe du clown au tragique et a appris phonétiquement les répliques et chants venues d’Iran. La recette est adroite. D’abord, il faut dérouler le fil d’un des plus beaux contes amoureux de la culture persane, celui de "Bijan et Manijeh"  (Shâhnâmè ou Livre des Rois) ; ensuite, il faut souffler puissamment l’élan fougueux et courageux de la jeunesse iranienne des années 70, prête à en découdre pour gommer un monde ancien et créer un monde meilleur ; ne pas hésiter à surfer sur une vague théâtrale à l’esprit troupier qui rappelle les exploits drolatiques de l’équipe du Splendid ou même celle des Robins des Bois ; enfin, articuler l’ensemble avec la mise en scène de Régis Vallée, fabuleusement ingénieuse et incroyablement enlevée.  Sur un rythme effréné, six artistes d'un enthousiasme touchant se partagent une trentaine de rôles grâce notamment à d’astucieux jeux de costumes et de mimes qui inventent constamment des accessoires et de nouvelles situations.

    "Les Poupées Persanes" est une page d’Histoire qui demeure en mouvement et fait hélas écho à notre plus récente actualité, cette pièce est plus que jamais nécessaire pour l'éclairage qu'elle apporte tout en conservant sa vocation théâtrale, soit un pur moment d’amusement et d’émotion.

    LCS

    ·      A voir l’excellent documentaire « Femme, vie, liberté - Une révolution iranienne » sur Arte : https://www.arte.tv/fr/videos/113185-000-A/femme-vie-liberte-une-revolution-iranienne/

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  • ”En attendant Godot” à La Scala jusqu'au 8 avril

    alain françon,samuel beckett,eric berger,guillaume lévêque,andré marcon,gilles privat,antoine heuillet,la scala,en attendant godotEn 1996, c'est une claque ! Pierre Arditi est Vladimir, Marcel Maréchal est Estragon, Robert Hirsch est Pozzo, Jean-Michel Dupuis est Lucky, tous réunis sous la houlette de Patrice Kerbrat au Théâtre du Rond-Point des Champs-Élysées. Samuel Beckett a bondi d’entre les pages de mes lectures, plus vivant que jamais, la mise en scène et les interprétations données par chacun des comédiens restent figées dans ma mémoire pour cette production, impossible à dépasser...

    Cependant, depuis la semaine dernière sur le bord du boulevard de Strasbourg, la Scala affiche En attendant Godot.  Beckett reste irrésistible, et puis une mise en scène d’Alain Françon, une des vedettes du théâtre français, ne peut qu’éveiller l’interêt. En attendant Godot à La Scalacréé en juin dernier aux Nuits de Fourvièrepromet d’être un événement.

    Je sens encore les frissons qui irradiaient autour de Dominique Valadié dans l’intensité de son jeu dans Qui a peur de Virginia Woolf ? (2016), l'air du Théâtre de l'Oeuvre avait changé, magique, la mise en scène était signée Alain Françon… En fait, depuis plus de cinquante ans, le metteur en scène, plusieurs fois récompensé par ses pairs, multiplie les succès à un rythme soutenu.
    En amoureux respectueux des auteurs, Alain Françon fait revivre la pièce emblématique en dessinant le cadre et le jeux de ses interprètes avec une très attentive fidélité aux didascalies souhaitées par Beckett. Le goût commun de l'auteur et du metteur en scène pour l'abstraction se rencontrent à la perfection, l'art est dans le détail et ce sens de la précision ultime offre un sentiment de grande liberté qui laisse s’envoler l’imagination des spectateurs.

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    Ce sont de très adroits funambules, Gilles Privat et André Marcon s'expriment comme le ferait un couple de danseur dans le pas de deux d’un ballet poétique. Dans cet environnement froid et inhospitalier, imaginé sur un sol gelé et emmené vers un horizon sombre, les comédiens occupent l’espace tout entier, ils glissent, ils font se rencontrer la chaleur de leur échanges et l’humour de leur propos pour questionner l’invisible avec cette perspicacité, souvent d’une cruelle ironie, typique au registre de Beckett. En deux actes, la complicité de jeux de Gilles Privat et André Marcon, tendre, émouvante et drôle, reflète admirablement cette humanité dont Beckett révèle les profondeurs par des situations tout à fait anecdotiques pour ne pas dire banales. Réinventant ces personnages si attachants, les deux compères s’harmonisent à la perfection, ils sont rejoints par la prestation, presque dansée, elle aussi, et aussi poétique, d’Eric Berger dans le rôle de Lucky. La pièce a été écrite en français en 1948 (Éditions de Minuit, 1952), comme pour « Fin de partie » - un succès prolongé actuellement au Théâtre de l’Atelier – l'œuvre n’a évidemment pas pris une ride, elle est même d’une modernité tout à fait radicale. En fait, il n’y a qu’une vérité : Samuel Beckett demeure un génie ! Hâtez-vous d’aller à sa rencontre !

    Laurence Caron

     © photo : Jean-Louis Fernandez


    alain françon,samuel beckett,eric berger,guillaume lévêque,andré marcon,gilles privat,antoine heuillet,la scala,en attendant godotA lire :
    Alain Françon, la voie des textes d’Odile Quirot,
    éditions Actes Sud - collection le Temps du Théâtre.

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  • La déclaration d’amour de Philippe Besson au Théâtre : « Un Tango au bord de la mer » au Petit-Montparnasse.

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    La première page d’amour écrite par Philippe Besson pour le Théâtre réunit deux hommes :  ils se sont aimés, peut-être s’aimeront-ils encore ? Au creux de la nuit, au bar d’un palace, au bord d’une mer inconnue, leurs vies se croisent à nouveau.
    Les murs noirs du théâtre se sont évanouis pour laisser s’ériger l'architecture d’un hôtel de luxe (pour moi ce sera celui de Mort à Venise, mais vous avez le choix), le beau et le commun, l’amour et la passion, les regrets et les remords partagent une bouteille de vodka. Lui (Jean-Pierre Bouvier) a cinquante ans, il est un auteur célèbre, esthète, l’Autre (Frédéric Nyssen) a trente ans, il est un insouciant, insolent.

    L’amour unit les êtres et les révèle au monde, c’est en tout cas ce que Philippe Besson semble croire. Les questions existentielles de l’écrivain percent le fil des dialogues, sans même que l’on s’en aperçoive des aveux essentiels, parfois graves, sont dits. Sans concession mais avec une pudeur extrêmement mesurée, l’amour est raconté comme un prétexte au récit d'une vie.

    Les comédiens jouent en rythme, les dialogues et apartés se partagent très harmonieusement le champ des sentiments. Débordant d’humanité, Jean-Pierre Bouvier crée le personnage de l’Auteur avec de très exactes intentions de jeu, tendre ou drôle, tragique ou fantasque, toute une vie vécue. Philippe Besson a réussi son pari, pour sa première pièce de théâtre, ses lignes ont pris vie, elles ne tressautent plus uniquement dans le reflet des pupilles de ses lecteurs, elles bougent pour de vrai, elles sont vivantes. Le texte s’est emparé très subtilement de ces deux hommes, à moins que cela soit l’inverse. Le duo de comédiens Bouvier/Nyssen est exemplaire, à la hauteur du texte. Car il y a l’Autre, Frédéric Nyssen pour qui il est si simple de faire ressentir l’instant alors qu’il est si difficile de faire durer l’amour. Ces vies s’étirent entre comédie sociale et tragédie amoureuse, rien n’épargne les deux hommes. La sincérité est l’arme absolue de Philippe Besson. Doux et bienveillant, mais aussi lucide et parfois amer, 'Besson-dramaturge' a le don le triturer le meilleur et le pire.

    La mise en scène de Patrice Kerbrat enveloppe la scène et ses personnages avec la force de l’évidence. Les jeux de lumière isolent très intelligemment les apartés des comédiens alors que les déplacements donnent de francs élans aux soupirs contrariés, aux inflexions retenues et aux déclarations enflammées.

    Le propos de la pièce est intemporel et universel, il s’agit bien d’une histoire d’amour. Pourtant, même si on voudrait que l’homosexualité ne soit pas un sujet, il faut avouer que cette pièce est aujourd’hui d’actualité, elle est une réponse à la bêtise. Résolument contemporaine, «Un Tango au bord de la mer» au Théâtre du Petit-Montparnasse est une œuvre nécessaire pour cette première partie de siècle en mal d’amour.

    Laurence Caron-Spokojny

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  • Histoire du soldat, de Stravinski et Ramuz, jusqu'au 16 juillet au Théâtre de Poche-Montparnasse

    sebastiàn galeota,stéphan druet,aurélie loussouarn,fabian wolfrom,licinio da silva,claude aufaure,orchestre-atelier ostinato,théâtre de poche-montparnasse,stravinsky,ramuzUn soldat rentre chez lui et fait la rencontre d'un homme qui se révèle être le Diable, le soldat lui vend son âme incarnée par son violon contre un livre magique, promesse de richesses et de succès. 

    Depuis sa création en 1917, « Histoire du Soldat » est une œuvre complète. A la fois dramatique par le jeu de ses trois récitants, musicale par la proposition de sept instrumentistes et enfin chorégraphique. Pour ce qui est de la danse, Cranko, Robbins, Babillé, Kylian -rien que ça- et Gallotta -et d’autres encore- se sont déjà emparés du modèle ; difficile pour Sebastiàn Galeota d’y inscrire sa chorégraphie sur l’étroite scène du Poche-Montparnasse. Mais, l’intention reste juste, l’adroite mise en scène de Stéphan DRUET inscrit les arabesques de Aurélie Loussouarn  sur du papier millimétré.

    La musique de Stravinski n’a pas pris une ride -elle n’en prendra jamais- et le livret de Charles-Ferdinand Ramuz suit poétiquement la cadence. Reconnue comme une œuvre incontournable du 20ème siècle, cette variation du mythe de Faust est adoptée avec brio par le jeune et terriblement doué Orchestre-Atelier Ostinato

    Claude Aufaure est le Lecteur, un véritable rôle d’orfèvre qu’il tient de sa voix chaude à la perfection, Licinio Da Silva est un Diable créatif, extravagant et dépravé juste comme il faut, enfin Fabian Wolfrom est un soldat passionné et d'une authenticité désarmante. Le jeune acteur a une carrière qu’il mène déjà tambour battant, avec son tempérament de «jeune premier » -à la beauté du diable- au regard profond et lointain façon Gérard Philippe. 

    En deux mots ALLEZ-Y, cette œuvre théâtrale et musicale est d’une grande qualité. Je vous recommande avec insistance « Histoire du Soldat » aussi pour les enfants, Stravinski est assurément le meilleur guide.

    Laurence Caron

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  • ”Les amoureux de Marivaux” sont au Théâtre Poche-Montparnasse, dans une mise en scène de Shirley et Dino

    « Les amoureux de Marivaux » soupirent entre les murs du Théâtre Poche Montparnasse jusqu’au 14 mars. Les troubles de l’amour, si habilement piégés par la plume de Pierre Carlet de Chamblain de Marivaux, se dévoilent ici sous la forme d’un conte fantasque, d’un cabaret burlesque ou bien encore d’une revue déjantée, c’est comme il vous plaira, tant que vous vous amusez !

    Quatre comédiens se partagent une quinzaine de rôles, entre saynètes légères, esquisses baroques et intermèdes musicaux, l’intention artistique est étonnante, surprenante même. Mais la qualité de jeu des interprètes, l’originalité du ton et l’énergie déployée par ces « Mauvais Elèves » conquièrent le public, il y a comme un exercice de séduction, quelque chose se passe… Du charme, Bérénice Coudy et Elisa Benizio, les deux interprètes féminines, n’en manquent pas, le regard acier un peu étrange de Bérénice Coudy perce le rayon du projecteur, pendant qu’Elisa Benizio, clown et dramaturge sans limite, fait preuve d’un répertoire incroyablement vaste, de l’éberluée excentrique à la séductrice impitoyable, rien ne semble i

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  • A placer en premier sur la liste des cadeaux de Noël : AUTOPSIE de Bruno Mouron et Pascal Rostain aux éditions La Martin

    Bruno Mouron,la martinière,Pascal Rostain Bruno Mouron et Pascal Rostain sont des artistes multifacettes : photographes, archéologues et sociologues de nos poubelles contemporaines, mais aussi maîtres du recyclage dans la tradition des Nouveaux Réalistes.

    Tout a commencé pour eux en 1988 comme une plaisanterie, ils ont embarqué, sous les yeux amusés du chanteur, les poubelles de Serge Gainsbourg. Ils ont dispersé avec goût le contenu sur un velours noir et en ont fait leur première oeuvre d'art trash, vision presque caricaturale de la vie quotidienne du chanteur tant elle concordait avec l'idée que chacun s'en faisait. Puis, encouragés par Daniel Filipacchi, ils ont étendu leur champ de vision et entrepris de faire les poubelles d'autres stars du showbiz. D'abord en France (Brigitte Bardot), puis aux États-Unis (Sharon Stone, Marlon Brando, Jack Nicholson, Madonna, etc.) mais aussi de la politique (Ronald Reagan, Arnold Schwarzenegger) ou encore le monde de l'art (Daniel Buren, Pierre Soulages, Damien Hirst). Finalement, conscients de ce que révélait le contenu de ces réceptacles sur nos sociétés, ils ont étendu leur collecte à des poubelles « normales », au gré de leurs pérégrinations, poubelles de riches et poubelles de pauvres. Poubelles du monde.

     

    Format : Beau livre
    Genre : Reportage
    ISBN :978-2732460970
    Éditeur : Editions de Lamartinière

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  • Exposition de photographies de Francette Levieux, «Noureev, L’Insoumis», une exposition qui se dévore comme un roman...

    L’image, d’un danseur en pleine expression de son art, reproduite par la photographie, exige une précision encore plus importante que pour celle d'un acteur, l'exercice est millimétré, presque scientifique. Chaque détail compte, le pied, la main, la cambrure ou l’arabesque doivent se présenter sous leurs meilleurs angles afin de supporter d’être figés sur le papier ; comme s’il était possible d’arrêter le mouvement ? Cet art là, cette indéfinissable maîtrise du temps, la photographe Francette Levieux en fait son affaire.

    laurence caron-spokojny,francette levieux,rudolf noureev,ariane dollfusPendant plusieurs années, photographe de l’Opéra national de Paris, Francette Levieux a suivi, pas à pas, des trajectoires célestes comme celles de Roland Petit, Maurice Béjart, Noëlla Pontois, Patrick Dupond, Alvin Ailey, Luis Falco, Claude de Vulpian ou encore Vladimir Vassiliev… Discrète comme une petite souris lorsqu’elle se faufilait dans les coulisses de l’Opéra Garnier, Francette Levieux aimait être tout près des danseurs, juste sur la scène. Lorsque Rudolf Noureev dansait, il renvoyait la photographe se placer dans la sal

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  • REWIND... En course pour LES MOLIERES 2014 : Jean-Baptiste Maunier et Christine Bonnard pour La Chanson de l’éléphant de

    1720185336.jpgC’est un personnage fragile et puissant, celui de Michaël enfermé dans un asile de fous, qui marque les premiers pas sur scène de Jean-Baptiste Maunier (très jeune star à l’issue du filmles Choristes de Christophe Barratier en 2004). Exercé au jeu par l’école de Lee Strasberg de New-York, Jean-Baptiste Maunier, du haut de ses 22 printemps, livre une démonstration qui semble puiser au plus profond de lui-même, il ne s’épargne rien, les tourments de son personnage vibrent, douloureusement, méthodiquement il décortique, analyse, digère et donne. Intense et physique, il y a quelque chose de Brando dans ce grand gamin là mais aussi quelque chose de Jean-Louis Barrault, une poésie discrète, un genre de s'excuser... Lire l'article

     
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  • ”Bêtes de sexe, la séduction dans le monde animal” : une expo à se poiler de rire en famille.

    bêtes de sexe,palais de la découverte,isabella rossellini,green pornoLa fameuse, incontournable et somptueuse, expo Edward Hopper au Grand Palais restera rêvée. Après avoir fait la queue pendant 1h30, un dimanche matin, pour finalement renoncer car il y avait encore 1h00 d'attente - nous nous sommes rendus à quelques enjambées de là au Palais de La Découverte.

    Le Palais de La Découverte est tout de même sinistre. Ce temple scientifique a vraiment besoin d'un coup de jeune, ne serait-ce qu'un bon coup de peinture, pourtant cet espace est toujours aussi intelligemment bien distribué pour enfants curieux et parents attentifs. Les innombrables expos, et leurs machines inventives sur lesquels les enfants de tous âges défoulent leur soif de savoir, sont évidemment à parcourir, si vous ne les connaissez pas déjà.

    L'exposition du moment "Bêtes de sexe, la séduction dans le monde animal" est à voir absolument, elle est à la fois drôle et imaginative. La richesse documentaire, en références et en expériences, a les attraits pour passionner adultes et enfants.
    Le must, sans contexte, est la diffusion de ces pastilles admirables "Green Porno" inventées par Isabella Rossellini qui dépasse son rôle de comédienne pour devenir plasticienne et nous initier aux pratiques sexuelles des animaux et insectes. L'univers burlesque et déjanté d'Isabella Rossellini dans "Green Porno" (produit en 2008) est remarquablement intelligent, le rythme de ces petites fenêtres psychédéliques enrichi considérablement l'exposition qui sans cela resterait définitivement attristée par l'ambiance pesante du lieu. 

    Laurence Caron-Spokojny

    Toutes les infos ICI.

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  • BRASSAÏ est, selon son expression, un «pillard de beauté de toutes sortes»

    brassaÏ,hôtel de villeAutour de lui, il y a André Breton, Paul Eluard, Salvador Dali ou bien encore Kandinsky et Picasso, il y a sa passion immodérée pour les arts forains, les saltimbanques et les artistes, et puis il y a aussi sa fascination pour le mystérieux, le monde de l’étrange, comme un brouillard qui enveloppe la ville et dissimule les frasques et les amours de ses habitants…    

    Brassaï a le coup d’oeil infaillible, il ne rate rien. Il est un des premiers à remarquer l’importance des graffitis sur les murs de Paris, en les saisissant sur argentique il les fait entrer au panthéon de l’art primitif.
    Observateur des tendances, l’élégance des parisiens et des parisiennes ne lui échappe pas, tout autant que l’allure élancée de la tour Eiffel sur un ciel voilé. La nuit, arpentant les rues de Paris,  il piège dans sa boîte le reflet du clair de la lune sur les pavés de granit, la courbe savante d'un pont de la Seine et la drôle de rencontre avec un gavroche à l'accent des faubourgs.
    Le poète-photographe abolit les frontières sociales entre les hommes, il fige sur la pellicule la grande bourgeoisie et la canaille avec le même regard, la même tension affective, presque sentimentale aussi bien lorsqu'il choisit de photographier les filles de joie offertes au coeur des maisons closes ou les voyous qui magouillent au fond des ruelles.

    brassaÏ,hôtel de villeChampion toutes catégories du clair obscur, Brassaï est d’une exigence folle, chaque portrait, chaque paysage, chaque nature morte, chaque extrait de vie livrent un instant d’une force inouïe ; il n’y a pas une photo qui soit meilleure que l’autre, pas une photo qui éteigne le ton de sa voisine, l’exposition BRASSAÏ du salon Saint-Jean de l’Hôtel de Ville de Paris est une déclaration d'amour absolue d’un homme arrivé à Paris en 1924. Brassaï, de son vrai nom Gyula Halasz, était né en Transylvanie...

    Laurence Caron-Spokojny

    Le catalogue de l'exposition est complet et magnifique mais il faut avant tout se procurer, le très passionnant et très précis, petit catalogue "Brassaï, la maison que j'habite" (aux éditions Somogy, éditions d'art - catalogue de l'exposition du musée des Beaux Arts de Nantes et du Musée des Beaux Arts de Nancy en 2009 et 2010) - en vente à la sortie de l'exposition (8euros).

    Pour "aimer" la page facebook de "Ce qui est remarquable", c'est par ici

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  • Albums, Bande dessinée et immigration de 1913à 2013 : très belle, et très instructive, exposition au Musée de l'Histoire

    Louis le Portugais,Bilel,Malamine,Igor,Bouzid, Jiggs,Abdulah, Petit Polio,Aya de Yopougon,Goscinny,Georges McManus,AlbumsÀ travers plus de 400 pièces et documents originaux, planches de bande dessinée, esquisses et croquis préparatoires, films d’animation, entretiens filmés et autres photographies et documents d’archives, l’exposition se propose d’envisager le phénomène migratoire dans la bande dessinée.

    Aujourd’hui, la bande dessinée a définitivement acquis le statut de 9ème art et n’a jamais été autant exposée dans de grands musées. Plusieurs expositions récentes ont dressé des passerelles entre la bande dessinée et d’autres formes artistiques (Archi et BD, la ville dessinée ; Vraoum, trésors de la bande dessinée et art contemporain), entre bande dessinée et culture (de Superman au chat du rabbin) ou encore entre bande dessinée et histoire (Tardi et la Grande Guerre, Mobilisation générale : 14-18 dans la bande dessinée, Traits résistants). Cette exposition apporte sa pierre à l’édifice en convoquant pour la première fois toutes les formes associées du 9ème art pour raconter l’immigration autrement.

    Albums est une exposition d’histoires. Histoires de ces auteurs d’origine italienne, sénégalaise, algérienne, portugaise ou vietnamienne venus vivre et travailler en France mais aussi histoires de ces émigrés ou fils d'immigrés européens partis au début du siècle aux États-Unis tels que Georges McManus ou plus tard Goscinny qui ont contribué à créer un 9ème art.

    Albums ce sont aussi les récits de vie réels ou imaginaires d’Aya de Yopougon, d’Abdulah, Petit Polio, Bouzid, Jiggs, Igor, Malamine, Bilel, Louis le Portugais… Tous ces récits, histoires de personnes et de personnages, se croisent pour écrire une autre Histoire de la bande dessinée depuis un siècle.

    Science-fiction, récit historique, humour ou reportage, quel que soit le genre, chaque auteur enrichit son art, de son expérience personnelle mais aussi des collaborations qu’il a pu nouer au gré de ses pérégrinations, de ses références visuelles ou langagières, des techniques qu’il a apprises. L’exposition s’attarde ainsi sur la "fabrique de la bande dessinée". À l’instar de toutes formes de langage, la bande dessinée, depuis ses débuts, construit des images et archétypes de la figure de l’émigré. Les commissaires relèvent, analysent, questionnent les œuvres au prisme des migrations, sur l’existence d’une écriture graphique construite sur des représentations communes.

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  • BRASSAI, jusqu'au 8 mars à l'Hôtel de Ville de Paris

    Brassaï

    Brassaï a le coup d’oeil infaillible, il ne rate rien. Il est un des premiers à remarquer l’importance des graffitis sur les murs de Paris, en les saisissant sur argentique il les fait entrer au panthéon de l’art primitif. 
    Observateur des tendances, l’élégance des parisiens et des parisiennes ne lui échappe pas, tout autant que l’allure élancée de la tour Eiffel sur un ciel voilé. La nuit, arpentant les rues de Paris,  il piège dans sa boîte le reflet du clair de la lune sur les pavés de granit, la courbe savante d'un pont de la Seine et la drôle de rencontre avec un gavroche à l'accent des faubourgs. Lire la suite ici

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